Sur le papier, Yessongs est le meilleur album live de tous les temps dans la catégorie « rock progressif ». Voyez donc : un TRIPLE vinyle (à l'époque de sa sortie), contenant tout Close to the Edge (1972), quasiment tout The Yes Album (1971) et les longs mouvements progressifs de Fragile (1971) – manque "South Side of the Sky". 2 heures de virtuosité à tendance ésotérique, jouées par des tueurs dans leurs instruments respectifs. Qui avait fait au moins aussi bien à l'époque ? Personne.

Pourtant, Yessongs, c'est dans les faits l'un des espoirs déçus les plus intenses dans son genre. Et ce à cause d'un sacré gros point négatif : la production. Le son est tout bonnement dégueulasse, c'est le mot, et plombe douloureusement la musique. Si encore on avait droit à quelque chose d'aussi brut que Earthbound (1972) ou le premier live de GENESIS (1973), pourquoi pas, mais la musique de YES ne se prête pas à quelque chose d'aussi bourbeux.

Et soyons honnête, même avec une meilleure production, Yessongs ne serait pas glorieux pour autant. Enfin, si, mais pas au point de devenir une référence majeure, même au sein de la discographie de YES. La faute à certains choix de claviers douteux (surtout sur "Starship Trooper"), mais aussi au chant de Jon Anderson, parfois à la ramasse. Étant donné qu'on parle de live, c'est à moitié pardonnable. À moitié.

À l'heure où j'écris ces lignes, YES a publié entretemps Progeny (2015), au son infiniment plus propre et mettant donc mieux en valeur le groupe sur scène lors de son âge d'or progressif. Yessongs devient-il donc caduc ? Non, car il reste un document référentiel en plus d'être plus exhaustif – plus long. Mais il faut bien avoir à l'esprit que sa réputation est surestimée.