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Etienne DAHO - Pop Satori (1986)
Par AIGLE BLANC le 12 Janvier 2016          Consultée 4207 fois

La Notte, la Notte, le précédent opus d'Etienne DAHO, avait amorcé doucement un succès dont la croissance exponentielle culmina avec la sortie de Paris Ailleurs, son 5ième album. La Daho-mania qui avait alors saisi la France couvre la période qui s'étend de 1985 à 1991. Reconstituons les étapes essentielles de ce phénomène social et musical.
Le 18 avril 1985, le chanteur-songwriter donne un concert à guichet fermé ni plus ni moins qu'à l'Olympia. L'émission de rock française Les Enfants du Rock lui consacre un reportage à l'occasion duquel il croise la première fois son idole Françoise HARDY et chante en duo avec elle. Devenu célèbre du jour au lendemain suite à ce coup de projecteur télévisuel, il enregistre en 1985 le single "Tombé pour la France" qui atteint la 15ième place du Top 50. Le clip vidéo est signé par le débutant Jean-Pierre Jeunet, futur papa d'Amélie Poulain.

Pop Satori en 1986 se situe donc au coeur du maëlstrom d'où est née la légende DAHO. Disque de Platine dès 1987 et classé 5ième des Charts français, cet album marque non seulement la continuité d'un style musical ne cessant de progresser et de s'affermir depuis Mythomane (1981), mais propulse aussi la pop hexagonale des années 60, où elle s'était figée, vers une nouvelle ère, celle des très proches années 90 qu'il anticipe formidablement. Album de transition et de rupture, il marque aussi la fin de la période d'insouciance née au lendemain de mai 68 et qui avait vu l'éclosion de la contre-culture adoptée par les Jeunes, devenue la culture populaire dominante. L'ère SIDA allait mettre un sérieux coup de frein à cette allégresse faite de libération sexuelle et de fièvres du samedi soir.
Etienne DAHO, qui lors des cessions de Pop Satori à Londres passait ses journées au studio d'enregistrement, écrivait ses textes le matin et passait ensuite toutes ses nuits à faire la fête, ne se souvient pas d'avoir dormi pendant ces quelques semaines de folie. Cet opus d'une grande richesse brasse ainsi toutes ses références culturelles : le titre de l'album renvoie au roman Satori à Paris de Jack Kerouac, l'auteur emblématique, avec William Burroughs, de la beat generation. Y plane aussi l'ombre patriarcale de Serge GAINSBOURG ainsi que celle de Françoise HARDY, sa soeur spirituelle. L'album se clôt sur "Late Night" une reprise du Syd Barrett de l'époque PINK FLOYD.
Aux commandes de l'enregistrement, on trouve le grand William ORBIT, futur ingé-son de PRINCE, MADONNA, Robbie WILLIAMS et BLUR, alors leader du groupe Electro-Pop d'avant-garde Torch Song dont E. DAHO était fan depuis leur album Wish Thing (1984). En effet, son flair infaillible lui avait murmuré que ce serait l'ingénieur du son parfait pour donner à Pop Satori l'écrin sonore dont il rêvait. Seulement, pour d'obscures raisons financières, William ORBIT n'a travaillé que sur 3 titres : "Paris le Flore", "Quelqu'un Qui M'ressemble" et "(Qui Sera) Demain Mieux que Moi", le reste de l'album ayant été co-piloté par Rico Conning (acolyte de W. ORBIT), Arnold Turboust et Etienne DAHO.

C'est un énorme fossé qui s'est creusé entre les deux premiers opus et Pop Satori, d'abord et surtout sur le plan technique. Autant Mythomane et La Notte, la Notte se caractérisaient par une production typique de la synthpop avec son minimalisme louchant vers des sonorités froides, autant le présent album fourmille de pistes sonores colorées un brin brouillonnes mais témoins d'une ambition rare dans la Pop française. Passée l'impression de saturation que laissent les deux premières écoutes, l'oreille est à même ensuite d'apprécier l'enrobage esthétique dont ont bénéficié toutes les chansons, et pas forcément en premier lieu les singles les plus connus.

Si la vie débridée et pop que menait Etienne Daho à Rennes continue ici à infuser ses chansons, il va sans dire que les thèmes abordés le sont avec un jusqu'au-boutisme en rapport avec l'accélération de ses expériences parisiennes de night-cluber. "Epaules Tattoo", "Pop Egérie O", Tombé pour la France" prennent toutes pour cadre une boîte de nuit et traduisent le vertige des sens d'une jeunesse qui se perd dans l'étourdissement. Les filles vont et viennent ("Pari à l'hôtel"), attendent le premier pas de celui qui dort à leur côté (la délicieuse "Qui Sera Demain Mieux Que Moi")... et quand les unions éphémères se désunissent il ne reste plus qu'à... s'enivrer sur la piste de danse pour oublier celle qui n'est plus là (la tubesque "Tombé pour la France"). Même la mort ne permet pas d'oublier le désir, le sexe ni la jalousie, et ce n'est pas l'ectoplasme des "4000 Années d'Horreur" qui nous contredira, lui qui assiste, témoin devenu impuissant, au ballet sans-cesse renouvelé des amants que sa bien aimée ramène du night club à l'aube.

Ce qui frappe d'emblée, c'est le bond qualitatif des textes depuis La Notte, La Notte. Les thèmes n'ont pas changé mais la façon de les malaxer à coups de rimes ludiques et sensuelles dénote un vrai talent d'écriture. L'ombre de Henry Miller et de Jack Kerouac infuse aux couplets et refrains un rythme tantôt fluide ("Quelqu'un Qui M'ressemble"), tantôt syncopé ("Epaules Tattoo") et distille une sensualité grisante : "Pas bouger, pas s'toucher, tester du pied, pas s'mouiller /C'est ma première nuit chez toi /Tout près tu reposes, avant que j'implose, peu importe j'ose ooh ooh / Tester du bout de l'orteil mon sommeil / Tu sais bien qu'au fond je veille / Pas besoin de prose, avant que j'explose, peu importe j'ose ooh ooh / Sur tes lèvres roses, un baiser je pose / Sur tes lèvres closes, c'est l'apothéose..." ("Qui Sera Demain Mieux Que Moi").

Le titre "Satori Pop Century" qu'E. DAHO entonne sans chanter constitue la clef de voûte de l'album. En effet, l'auteur y définit pour nous ce mot étrange "satori", mot japonais qui désigne un flash, une illumination, un éblouissement de l'oeil. Autrement dit, une expérience profondément exaltante, celle qu'a vécue le chanteur à Londres et à Paris pendant la réalisation de Pop Satori et qu'il s'est efforcé de traduire dans cet album pop ambitieux où se mêlent mélodies agréables et rythmiques syncopées à la Jean-Michel JARRE période Zoolook.

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   AIGLE BLANC

 
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- Etienne Daho (paroles et chant)
- Rico Conning (programmation, batterie)
- William Orbit (basse, guitare, claviers, percussions -titres 3-5-)
- Xavier Géronimi (guitares)
- Arnold Turboust (programmations, basse, claviers)
- Denis Bourhis (piano -titre 10)
- Jérôme Soligny (guitare -titre 10)
- Kako Bessot (trompette)
- Michel Gaucher (sax)
- Chris Lee (trompette -titre 3)
- Alex Perdigon (trombone)
- Anne Claverie (chœur)
- Robert Farel (chœur)
- Laurie Mayer (chœur)
- Mercedes Audras (chœur)


1. Satori Theme
2. Epaule Tattoo
3. Paris Le Flore
4. Pop Egérie O
5. Quelqu'un Qui M'ressemble
6. Tombé Pour La France
7. 4000 Années D'horreur
8. (qui Sera) Demain Mieux Que Moi
9. Pari à L'hôtel
10. Duel Au Soleil
11. Satori Pop Century
12. Late Night



             



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