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Alice Cooper
From The Inside
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le 22 Juillet 2021 par NESTOR


Un bien beau "commentaire" de Feelgood, qui a tout d'une très sérieuse chronique. Je vois que visiblement cet album a opéré le même charme sur nous deux. Il est dans mon coeur au même niveau que Alice Cooper Goes To Hell. Peut-être parce qu'aussi étrange, aussi personnel, aussi barré.

le 22 Juillet 2021 par FEELGOOD


Vinyle acheté chez Juke Box, 80, Avenue du Maine, début 1985 lors d'un voyage scolaire, en même temps que Easy Action, Love It To Death, Welcome To My Nightmare et le Greatest Hits du Sab' pour faire bonne mesure.
En ce temps-là, j'ignorais tout de la genèse de l'album, l'article le plus complet en ma possession sur la carrière d'Alice Cooper (signé Hervé Picart) remontant au n°99 (octobre 76) du regretté magazine Best.
L'avantage de l'extraordinaire pochette du 33-tours, c'est son caractère explicite, permettant d'appréhender instantanément le thème de l'album et d'identifier les différents protagonistes du psychodrame qui va se jouer lorsqu'on posera le diamant sur la rondelle.

Le recto nous montre le visage d'Alice en gros plan, avec le make-up, sous un éclairage glauque. Deux portes apparaissent en superposition et la pochette s'ouvre, nous dévoilant un saisissant instantané de la vie quotidienne des patients d'un asile d'aliénés. Les personnages décrits dans les chansons apparaissent ici en action : Silkly, le joueur invétéré de "Serious", l'infirmière Rozetta, le couple infernal Millie et Billie, le vétéran de "Jackknife Johnny", etc. En haut à gauche, se trouve une petite porte, celle de la chambre capitonnée. À l'intérieur : Alice, affublé d'une camisole de force !
Le verso nous montre un bâtiment en briques. Les portes s'ouvrent, elles aussi, et dévoilent Alice et ses compagnons, libérés, se précipitant vers la sortie, infirmières et médecins leur faisant des gestes d'adieu.
Si le thème est évident, j'étais alors loin d'imaginer que tout cela avait un fond autobiographique.

L'album est produit et arrangé (dérangé-dixit les notes de pochette) par David Foster (pas spécialement connu pour être un spécialiste du rock qui déménage), en lieu et place de Bob Ezrin. Keith Olsen est crédité comme ingénieur du son. Les guitaristes Dick Wagner et Steve Hunter sont secondés par un certain Steve Lukather (on retrouve aussi Steve Porcaro aux synthés et Bobby Kimball dans les chœurs). Rick Nielsen de Cheap Trick joue sur "Serious". Des membres du groupe d'Elton John sont aussi présents : le bassiste Dee Murray et le guitariste Davey Johnstone. On entend même Kiki Dee, l'immortelle interprète du "Don't Go Breakin'My Heart" d'Elton dans les chœurs. Il est vrai que l'album est coécrit par Bernie Taupin, l'alter-ego d'Elton. Normal puisque Cooper et le Rocketman étaient voisins.
Alice n'avait certes pas attendu Taupin pour composer des ballades. Il n'empêche que certains titres sonnent comme du Elton John ("How You Gonna See Me Now"). On note aussi qu'Elton a parfois enregistré des chansons plus énergiques que celles figurant sur From The inside (par exemple, "Saturday Night's Alright for Fighting").
L'auditeur qui s'attend à du gros rock qui tache risque donc d'être surpris, voire destabilisé. From The Inside est un disque de rock FM, à la production policée, limite aseptisée, résumant ce qu'était devenu un certain rock US à la fin des années 70.
Le premier morceau, "From The Inside", surprend. Des notes de piano semblent annoncer une ballade, mais très vite survient un riff de guitare distordu sur fond de batterie disco (n'oublions pas que nous sommes en 1978 et qu'Alice a tourné dans un film avec les Bee Gees). La voix si caractéristique du Coop' sur un tel fond sonore crée un contraste intéressant. Les paroles décrivent avec acuité la situation du chanteur : "I got lost on the road somewhere Was it Texas or was it Canada Drinking whiskey in the morning light".
Deux autres chansons sont consacrées à Alice/Vince : "The Quiet Room" et "How You Gonna See Me Now". Formellement parlant, il s'agit de ballades californiennes archétypiques. Sauf que les paroles abordent des sujets sérieux (le séjour d'Alice en chambre capitonnée et ses inquiétudes concernant sa vie de couple, une fois libéré). Le mythique Bruce Gowers, réalisateur du célèbre clip de "Bohemian Rhapsody", tourna d'ailleurs une sympathique vidéo de ce qui deviendrait un tube (N°12 US), le dernier d'Alice Cooper avant "Poison", une dizaine d'années plus tard. Notons que la face B du 45-tours proposait un excellent morceau ne figurant hélas pas sur l'album : "No Tricks", fracassant duo avec une certaine Betty Wright.
Les autres chansons racontent l'histoire des différents patients de l'établissement. "Wish I Were Born ln Beverly Hills", le titre le plus classique du lot, qui aurait très bien pu figurer sur Billion Dollar Babies, met en avant une riche héritière des beaux quartiers ayant pété un plomb. Le narrateur du groovy "Nurze Rozetta" est un homme de Dieu obsédé par une infirmière sexy !
"Millie and Billie", duo avec une certaine Marcy Levy (qui chanta aussi aux côtés d'Eric Clapton), est la confession d'un jeune couple apparemment angélique, en réalité deux psychopathes qui se débarassèrent d'un mari gênant d'une façon que n'aurait pas reniée le docteur Lecter. Le contraste entre le fond et la forme est saisissant dans la mesure où cette chanson a tout d'une bluette de variété insignifiante. Les violons « hermanniens » de la fin remettront les pendules de l'auditeur inattentif à l'heure.
"Serious", un rock basé sur de gros riffs, met en avant Silkly, un joueur compulsif que sa passion a rendu fou. "For Veronica's Sake", pur prototype de rock FM à la Toto, demeure un titre à part dans la carrière du Coop'. Cette fois, le patient se fait du mouron pour Veronica, sa chienne adorée qui risque de finir euthanasiée.
Quant à l'émouvant "Jackknife Johnny", c'est le récit à la troisième personne des affres d'un vétéran du Viet-nam devenu junkie.
Enfin, "Inmates (We're All Crazy)" est un grand moment de folie collective, véritable ode à la folie et aux lunatiques, sorte de comptine enfantine perverse se transformant en pièce montée symphonique, permettant à l'ensemble de s'achever en apothéose.
Si la luxueuse pochette et le pedigree des gens impliqués indique que la Warner croyait encore au potentiel de l'artiste, l'album, sans doute trop personnel et déroutant, n'a pas fait un score extraordinaire dans les classements de l'époque (68 US, 61 GB). Il n'en a pas moins été réhabilité, Alice en personne déclarant qu'il s'agit de son préféré. C'est indéniablement son œuvre la plus autobiographique et peut-être la plus sincère. Ces dernières années, j'ai beaucoup réécouté From The Inside. Avec le temps, ce disque est devenu, tout comme son successeur, Flush The Fashion, l'un de mes préférés de l'artiste, alors que mes premières écoutes avaient été pour le moins mitigées.













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