Douze chansons virevoltantes aux antipodes de la production electronica trip-hop de la scène de Bristol alors en vigueur en 1995 et très éloignée aussi du courant brit pop.
Douze ambiances différentes. Guitare aiguisée un peu country Rolling Stone-ienne sur le très rythmé "Stargazer". Tension et ambiance "un rêve dans un rêve" sur "Not Forgotten" où l'auditeur s'assoupit dans les bras de Morphée avec cette phrase énigmatique à souhait : 'Do you forget how to sleep, do you forget how to forget ?'. Un talk over plus que réussi sur les couplets de "Double Life" puis explosion sur un refrain fantastique, avec un solo de guitare atypique en arrière-plan que Siouxsie a voulu créer en hommage au guitariste Mick Ronson des Spiders from Mars. La chanson qui donne le titre à l'album - The Rapture - est composée de trois mouvements; tout le morceau repose sur un motif joué au violoncelle, un motif qui est décliné, sublimé, (ce morceau "The Rapture" est bien sûr une référence directe au titre "Street Hassle" de Lou REED - autre grande chanson scindée en trois mouvements reposant là aussi sur une phrase au violoncelle). Et enfin, l'album se termine par "Love Out Me", dont la violence surprend, avec un texte là encore très personnel - 'Anger tinged with sadness, it has always been like this' - qui prend aux tripes et laisse l'auditeur bouche-bée.
The Rapture est un très bon album. Les arrangements de cordes sont du plus bel effet, ceux qui apprécient Songs for Drella devraient aimer. C'est un disque avec une exigence pour la qualité de l'écriture; il ne peut donc pas plaire aux curistes du dimanche qui ont encensé des disques médiocres comme Bloodflowers et The Cure (2004). Je trouve que The Rapture marche de pair avec le disque Vauxhall & I de Morrissey sorti en 1994, - un autre grand disque organique sans artifice paru durant la même période, le trait d'union entre ces deux albums étant le single Interlude, un duo Siouxsie/Morrissey là encore servi par des arrangements de cordes sur une production Spector-ienne. The Rapture vient de reparaître en double vinyl en édition half-speed remasterisée pour un rendu sonore optimal. C'est un disque qui demande à être redécouvert.