Hannah Arendt avait une théorie : la natalité, c'est-à-dire l'arrivée inexorable de nouvelles générations, est porteuse de changement, de renouvellement des valeurs, des idées, etc. C'est une source de renouveau pour des sociétés ou des cultures qui, sinon, auraient tendance à se pétrifier et à tourner en rond...
Hélas, cette grande philosophe a oublié un effet pervers de cette capacité des nouvelles générations à faire table rase du passé, et LADY GAGA en est la preuve.
En effet, la quasi-totalité de sa musique et de son style vestimentaire soi-disant si excentrique provient directement d'un genre musical que ceux qui ont plus trente ans ont déjà connu jusqu'à plus soif, parfois avec horreur, à savoir ce qu'on appelait autrefois l'euro dance. Genre représenté par des groupes comme SNAP!, ACE OF BASE, TECHNOTRONIC, 2 UNLIMITED, et j'en passe.
Si vous avez un doute, regardez les vieux clips qui passent parfois sur le câble : LADY GAGA fait la même musique, et s'habille de la même façon, que les groupes (?) qui s'adonnaient à ce style au début des années 90. D'ailleurs, quand j'ai entendu "Poker Face" pour la première fois, je croyais que c'était un projet italien avec une chanteuse de façade, comme au bon vieux temps !
Du coup, pour ceux d'entre nous qui sont déjà passés par-là, il n'y absolument rien dans sa musique qui n'ait déjà été entendu. Elle ne fait que recycler ce genre musical à destination de ceux qui n'ont pas connu l'euro dance à l'époque, c'est à dire 1) les Américains et 2) les consommateurs de musique nés (en gros) après 1990. Pour les autres, et surtout pour 99% des Européens ayant dépassé la trentaine, la supercherie est flagrante.
Le seul équivalent (en termes de chiffres de vente), dans l'histoire de la musique pop/rock, est sans doute la Britpop du milieu des années 90, avec le grand recyclage des BEATLES, des KINKS, etc. Sauf qu'à l'époque cela avait permis à une génération de gamins de découvrir des vieux groupes glorieux et talentueux. Avec LADY GAGA, je ne suis pas sûr que l'on assiste à la réhabilitation d'un des requins de studio (Michael Münzing alias Benito Benites !) qui terrorisaient nos pauvres oreilles en ce temps-là.
Arendt n'a pas vu ce paradoxe : en faisant table rase du passé, les nouvelles générations oublient parfois que ce qu'elles prennent pour de la nouveauté - juste parce que ça vient de sortir - est une simple resucée sans éclat de quelque chose qui a déjà existé. Non pas d'ailleurs qu'écouter LADY GAGA soit honteux, chacun fait ce qu'il veut. Mais quand j'entends vanter sa créativité, ça ne passe pas.
J'aimais bien ACE OF BASE (l'été, en boite de nuit...). Mais "Alejandro" je peux pas.
