Et voici un petit plaisir coupable. On ne peut en effet pas dire que la musique de CHEMICAL SWEET KID, des p’tits gars ben d’chez nous, à Metz (NDLR : Ah oui effectivement, c’est presque en France dis donc), soit originale. Mais qu’est-ce que l’originalité, en fait ? Le concept d’identité n’est-il pas lié aussi à certaines conjonctures ? Regardez les STRAY CATS : ils faisaient du rockabilly, plus ou moins, et ça n’aurait pas été original en 1957. Mais ils l’ont fait en 1981, avec le carton que l’on sait. Pour les chimiques, l’identité est facile à deviner : "PRETTY HATE MACHINE" pour le groove, "THE DOWNWARD SPIRAL" pour les textes et le traitement du son. Alors oui, faire du NINE INCH NAILS pur jus, évidemment, c’est pas original, non, c’est vrai, surtout qu’en France, on l’a beaucoup fait, on a même été champions du monde du metal indus à l’époque (la féconde période 1995-1998). Mais en 2017 ? Eh bien c’est fait avec un tel mimétisme, avec tant d’engouement, de bonne volonté, que vous pourriez bien vous y laisser prendre.

Evidemment qui dit metal indus dit aussi les soucis qui peuvent aller avec, notamment la répétitivité et les baisses de forme. C’est vrai que le disque dans son ensemble n’est pas constamment haut ; comme sur "Some Kind of Madness" malgré une recherche des sonorités typiques 90s, ou "Ghosts and Shadows" qui est plus lourd que le reste mais qui, du coup, manque un poil de fun, cet ingrédient sournois qui rend hypnotique ce genre musical pourtant au départ censé être nihiliste. Mais à chaque titre, ou presque, le groupe tente d’aller chercher au forceps le hit single indus qui tabasse, qui rentre dans le crâne. Le morceau d’ouverture est la meilleure tentative du genre, infectieux, gras, qui mériterait un passage en radio, mais les petits copains ne sont pas en reste : "My Apologies" joue avec les clichés REZNOResques (ce petit synthé X-Files !) pour notre plus grand plaisir.

"We Are The Same" et "Just Trying" partagent une certaine folie, une étrangeté malsaine (dissonance hors-440Hz sur "Trying") qui n’enlève rien au côté dansant et atmosphérique (CREMATORY n’est pas loin). Ca fait également plaisir de voir des essais, des tentatives d’expérimentation, pas énormes mais inévitables : "Fuck the Rest" qui oscille entre ternaire et binaire dans un duel rythmique sans merci, "Walk Hard" qui s’approche de la folie entre metal, musique de cirque et orchestre grand-guignol du Danny ELFMAN de 1994, et pour finir, un "That Smells" au début décevant qui se rattrape avec une seconde partie plus épique, plus définitive, une vraie preuve de savoir-faire et de générosité artistique. Une clôture d’album tout à fait satisfaisante.

Tout comme l’album dans son entier, d’ailleurs : on pourra fustiger le parti-pris du style, on ne pourra pas prendre en défaut la volonté de charmer l’auditeur, de lui donner peu ou prou ce qu’il attend d’un tel genre, tout en poussant un peu les codes, juste ce qu’il faut. Pas indispensable, ADDICTED TO ADDICTION est cependant de ces disques-sourire qui vous rappellent pourquoi vous aimez la musique. Et en prime, cocoricoooooooo, la France REdevient numéro un de ce style, devant les Allemands : ah oui vous en avez à la pelle, des groupes comme ça, mais nous, on a DIVISION ALPHA. Et si ça suffit pas, on vous envoie les trois albums de CHEMICAL SWEET KID et hop ! Blitzkrieg. Verstanden, Frau Merkel ?

Note réelle 3,5 mais je mets 4 pour encouragements du professeur :)