Quand j'étais ado, je me rappelais les vidéos marrantes de BILLY IDOL. Oh certes, je voyais ça de loin. Pour moi, c'était du punk rock pour midinettes avec un son quasiment AOR. Un rock préfabriqué mais on sentait que le bonhomme avait pigé l'air du temps pour se fabriquer un look original, une sorte de Mad Max sexy et concurrencer MADONNA pour le côté sex appeal . Il est certain qu'en 84 les vrais punks rockers se tournaient vers des combos plus authentiques comme les DEAD KENNEDYS, les LORDS OF THE NEW CHURCH ou OBERKAMPF (pour rester local). Donc, un social traitre le IDOL? Peut être, mais laissons ce débat aux intégristes "pounks" et les "meanstrameux". On évoquera surtout une autre façon de faire évoluer le punk vers quelque chose de plus sensuel. En tout cas, de plus hollywoodien c'est sûr.

Beaucoup oublient que l'idole des jeunes avait eu cependant un passé bien destroy (lisez ou relisez ses mémoires parues il y a quelques temps). En effet, en 76, Billy a 21 ans et craque complètement pour ce punk rock germant qui fiche la trouille à la perfide Albion. En rupture d'études, il se rapproche d'une bande de dévergondés, le fameux Bromley contingent, originaire de cette ville voisine de Londres où de futurs cadors de la scène en question préparent leurs armes : Sid Vicious, futur bassiste des PISTOLS, la jolie Siouxsie Sioux et son compagnon Steven Severin qui programmeront bientôt SIOUXSIE And The BANSHEES, Marco Pirroni qui jouera de la gratte au sein des pirates ADAM And The ANTS. Il y a aussi un autre gugus dénommé Tony James. Tous foutent le bordel aux concerts des pistolets sexuels qu'ils suivent partout jusqu'à la télé, scandalisant la ménagère anglaise adoratrice de la reine ou les vieux admirateurs de Churchill.

La plupart de ces zouaves vont donc fonder leurs propres groupes pour semer le chaos au Royaume qui se désunit à vue d'œil. Tony joue ainsi avec des futurs CLASH au sein des très provocateurs LONDON SS. Mais musicalement, la sauce ne suit pas et le groupe, malgré un patronyme ultra punk, sonne comme du sous DOCTOR FEELGOOD légèrement punky. En rupture de pub rock, Tony prend la basse, et avec Billy à la guitare, un certain John Towe à la batterie, ils fondent CHELSEA, mené par l'excentrique chanteur Gene October. Ce dernier, à l'ego démesuré, est jaloux de la créativité de ses comparses. Exit October, les trois malfrats le lâchent après quelques concerts forcément chaotiques, et créent GENERATION X.

Faut dire que le nom en jette et montre l'état d'esprit de certains jeunes occidentaux oscillant entre le "no future" pessimiste et le "je m'en foutisme" intégral et ne croyant plus aux rêves soixante-huitards de leurs ainés, les "baby boomers". Le combo commence à devenir populaire à partir de décembre 76, écumant les régions anglaises, allant même en France, en compagnie des opportunistes POLICE et des néo mods JAM. Mais les dissensions continuent : John Towe se barre pour rejoindre ALTERNATIVE TV alors friand de reggae et de sonorités kraut rock. Un gamin de 17 balais, Mark Laff, jeunot et plus malléable, le remplace.

Enfin le label Chrysalis Records les signe et un single suit : le célèbre "Your generation" qui, avec "New rose" des DAMNED et "Anarchy in the uk" des PISTOLS, va devenir un hymne emblématique, atteignant même la quatrième place de l'UK Singles Chart en septembre 77. Faut dire que le morceau répond au cahier des charges de la punkitude : rythmique à la RAMONES, solo à la Brian James, mais aussi la belle voix de BILLY, désormais chanteur. Quant aux paroles, elles reflètent l'état d'esprit de l'époque. "Je suis en train d'oublier votre génération /Les extrémités doivent justifier les moyens/Votre génération ne veut rien dire pour moi / Eh bien, la fin doit justifier les moyens / C'est temps où votre génération est arrivée à son terme". En gros, une réponse lapidaire au "My generation" des WHO que, paradoxalement, le groupe adore. Marc Bolan, l'ancien lutin glam et ami des DAMNED, ne pouvait évidemment que les inviter à son émission télé intitulée « Marc ».

L'album suit peu après, se classant quand même 29ème aux charts des 33 tours. Autres temps, autres mœurs. Leurs chansons sont plutôt divertissantes : à la fois bien catchy, elles ont une approche pop dans la descendance du British boom sixties (WHO, KINKS). Mais dans ce sous-genre, le punk pop, les BUZZCOKS ou les JAM à l'époque ont des compositions bien plus entraînantes. En dehors de "Your generation" paru sur une réédition ultérieure, il y a un autre énergique hit "Ready steady go", faisant référence à une des premières émissions télévisées britanniques sixties consacrée au florilège de la pop anglaise. Ce que l'on remarque aussi, ce sont des plans glitters plus ou moins bons ("From the heart", "Promises promises"). "Youth youth youth" possède par contre une violence décibélique à la WHO. Tout un travail sur les chœurs se réalise sur le médiocre "One hundred punks" ou l'excellent "Day by day". Enfin, "Kiss Me Deadly" est une sorte de ballade montrant le registre vocal de l'ami Billy, loin d'être mauvais.

Ainsi, les membres de GENERATION X furent de bons seconds couteaux (je dis bien des seconds) de cette nouvelle vague mais ils n'avaient pas la haine des PISTOLS ni le nihilisme rigolo des DAMNED ni l'éclectisme du premier CLASH. Pas de quoi crier à la découverte du siècle à la réécoute de ce premier forfait sonique.