Ah, la sale bête ! Combien de fois par jour est-il passé, ce foutu single ? 10 ? 12 ? Sur combien de radios, disons un large 40% ? Et pendant... plusieurs mois et ce n'est pas fini à l'heure qu'il est ? "Sign Of The Times", c'est bien simple, est une chanson qui ferait presque croire que Julien DORE ne passe pas sur les ondes. Et elle n'était pas parfaite, cette chanson, elle avait même presque tout contre elle : une construction désespérément linéaire, un refrain crispant, et trois pauvres accords : Fa Ré mineur Do et vas-y Louis. allez si on va être généreux, il y a un Do 7ème, ça fait 4, comme Christophe MAE, youpi. Après tout, qu'est-ce qu'on pouvait attendre du premier single d'un membre de ONE DIRECTION ?

Eh bien, la première surprise a été de voir ce single rentrer dans nos caboches bien plus vite que prévu. Il faut avouer que 1D, comme on les appelle, n'est pas le groupe le MOINS mélodique du monde (si si, il y a pire... suffit d'allumer les 60% restants), mais en solo Harry STYLES est d'un tout autre acabit. La voix d'abord n'est pas autotunée, ou si elle l'est c'est très bien fait et transparent. Mais surtout, les arrangements sont somptueux : si la chanson arrive à charmer malgré la liste de défauts longue comme la cuisse de ma soeur, c'est parce que le final est grandiose. Ca explose dans tous les sens. Alors intrigué, on achète le disque, on se passe la première chanson qui est une intro bizarre, mélangeant les guitares de "Dark Side of the Moon", un couplet RADIOHEADesque, et le refrain qui est... celui du single, piraté. Bon. Admettons.

C'est à partir du troisième titre, et sa basse qu'on dirait tout droit sortie de 1964, qu'on commence à se poser la bonne question : et si Harry STYLES était, ou au minimum aimait, les VRAIS musiciens ? Le doute fait place au plaisir d'écouter une petite suite de chansons pas toujours formidables, mais qui ont toutes pour point commun une production très roots, très US fin d'années 70. Il y a du BEACH BOYS version zen là-dedans, du SIMON & GARFUNKEL ("Sweet Creature"), du TOTO période "Tambu" ("Ever Since New York", chouette chanson assez prenante), du folk sudiste ("Two Ghosts"), et l'inévitable ballade voix + cordes de fin, attendue mais mignonne.

Attendez, ce n'est pas tout ! Le gamin s'essaie aussi au rock et il faut dire qu'on a déjà entendu bien pire. "Only Angel" est du AEROSMITH, "Kiwi" fait penser à David JOHANSEN au début de sa carrière solo, et lors de ses cris et feulements, il est tout à fait crédible. Même quand il rate, il rate avec une certaine bonne humeur : "Woman" va n'importe où, se permet n'importe quoi (c'est quoi cette rythmique à base d'appeau pour canard à col vert ?), et dégage un délicat fûmet de psychédélisme. En réalité, malgré un son évidemment taillé pour les oreilles de 2017, ce disque aurait dans sa grande majorité pu sortir en 1979. Cette volonté de coller à un classiscisme certain tout en rameutant une nouvelle génération me fait penser à un cador du genre : Monsieur Robbie WILLIAMS. Non, Harry STYLES n'a pas encore le talent et le bagage de Rob. Mais s'il nous pond un second album dans la même veine que celui-ci, juste un poil plus solide, il en prendra certainement la direction.

La direction, vous avez compris ?