Dans la discographie pléthorique de FAIPORT CONVENTION, The Five Seasons fait partie des albums perdus, publiés sur de petits labels (en l'occurrence New Routes) et jamais réédités. Une belle photo nous montre les cinq membres en grand, chose rare là aussi.

En plus d'être rare, cet effort de la bande à Simon Nicol n'est pas ce qu'on peut appeler un essentiel. Nous sommes en 1990 et les années 80 ne se sont pas encore tout à fait terminées. C'est donc une suite à ces albums faits un peu de bric et de broc, quoiqu'on y décèle une unité plus forte qu'en 1985 ou 87. Il est enregistré d'avril à août dans la commune Barford St. Michael (comté d'Oxford), aux studios Woodworm (ce nom deviendra celui de leur futur label), comme les trois disques précédents.

Le contexte rural se mêle avec plus ou moins de bonheur à l'étiquette saisonnière mise en exergue sans toutefois donner lieu à un concept album. Avec "Claudy Banks" d'entrée et "All Your Beauty" un peu plus loin, FAIRPORT persiste dans une pop ensoleillée, pour ne pas dire reggae dans le deuxième cas, espérant peut-être rassembler plus de fans que leurs habitués.

Ce qu'ils font, ils le font bien, mais "All Your Beauty", avec son côté oldie et un arrangement violon-mandoline traité comme une fanfare, apparaît simplement gentillet là où "Claudy Banks" est enthousiasmant. De la pop fraîche avec du gros son et des éléments folk en pagaille, des soli de violon très inspirés par Ric Sanders, la voix toujours juste de Simon Nicol, de belles ruptures rythmiques et, chocolat blanc sur le gâteau au chocolat, la 12 cordes électrique de fin.

"Ginnie" est mignonne avec son piano digital et son enrobage sucré. "Gold" propose un piano ample en intro, bien adapté à la voix grave de Simon Nicol. Instant magique, avant de se transformer en composition blues agréable, basée sur des accords inhabituels pour FAIRPORT CONVENTION, et garnie de choeurs et de mandoline à-propos. Il faut savoir néanmoins que tous ces titres sont des reprises, traditionnelles ou chansons d'autres artistes, comme Peter Blegvald pour "Gold" et Huw Williams pour "Ginnie".

La meilleure d'entre toutes reste "The Wounded Whale", final superbe d'un album au demeurant simple. L'air chanté par Simon Nicol sur fond de nappes de synthétiseur est tout ce qu'il y a de plus merveilleux en folk. Pour ce poème épique du folk-singer Archie Fischer, la densité globale intègre son lot d'arrangements fabuleux comme la batterie forte, caisse claire militaire comprise, guitares électriques blues... Le solo de Maartin Allcock (qui se charge de tous les arrangements) à la toute fin tend à se rapprocher du chant des baleines. Un bijou ! Rien à voir mais un an plus tôt, JETHRO TULL publiait un morceau appelé "The Whaler's Dues" (album Rock Island, 1989), et sur lequel Dave Pegg jouait aussi.

Il partage le micro avec Simon Nicol sur l'énergique et éclatant "Card Song/Shuffle the Pack", débuté par un rythme blues titubant et prolongé par une chanson à boire avec choeurs masculins forts, en toute logique. C'est le seul effort collectif du groupe, coécrit par Nicol, Mattacks et Allcock. Ric Sanders fournit le set "Mock Morris 90's" où le violon domine forcément, passant d'un quadrille à un pas de trois temps pour revenir finalement à un reel/bluegrass endiablé.

Même si la plupart des reprises sont franchement convaincantes, il est dommage que le groupe ne puise pas assez dans ses propres ressources pour créer ou se contenter de traditionnels anonymes. Les arrangements sont parfois discutables, certains choix de production également, mais en dehors de cela, The Five Seasons est un bon album.