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1979 Live + Well

Fernest ARCENEAUX - Live + Well (1979)
Par LE KINGBEE le 31 Octobre 2018          Consultée 912 fois

Natif de Carencro, une bourgade touchant Lafayette, où il voit le jour en 1940, Fernest Arceneaux est issu d’une famille de fermiers très ancrée dans la tradition créole. Le garçon s’initie à l’accordéon dès six ans et maîtrise l’instrument deux ans plus tard. Fernest a le malheur de perdre sa mère à douze ans et se met alors à la guitare, jouant localement dans un petit groupe de Rock. Il délaisse la guitare au profit de l’accordéon mais ne joue plus que sporadiquement dans sa région natale au cours de kermesses, de fêtes paroissiales ou de soirées d’anniversaires.

Totalement disparu des écrans radars, il réapparaît tel un beau diable au milieu des seventies. Il enregistre en 1976 un premier disque pour Blues Unlimited, label de la famille Miller, mais c’est grâce à son idole Clifton CHENIER qu’il prend véritablement son envol. Le King du Zydeco prend ce grand dégingandé sous son aile et lui permet de se produire une première fois en Europe.
Paradoxalement, ce brillant accordéoniste ne connaît pas dans un premier temps une énorme popularité sur ses terres, se produisant principalement dans les environs de Lafayette et dans l’est du Texas où sa côte est au maximum. Ce manque de notoriété s’explique par une déficience au chant. Asthmatique depuis l’enfance, Fernest a longtemps fait appel à d’autres chanteurs (Bobby Price et Gene Morris) chose rarissime en Zydeco, registre dans lequel l’accordéoniste considéré comme leader officie également comme chanteur. Ce n’est donc qu’après sa période Blues Unlimited que Fernest décide de prendre en charge le micro.

Robert Sacre, enseignant à l’Université de Liège et chroniqueur dans plusieurs revues spécialisées recommande l’accordéoniste au producteur Rolf Schubert. On ignore si le nom prédestiné du producteur allemand joua un rôle, toujours est-il que Fernest Arceneaux & The Thunders vont traverser l’Atlantique pour se produire en Europe.

« Live + Well » contient six titres captés en public à L’Université de Bonn, à un jet de pierre de Cologne, le 28 septembre 1979, et six autres enregistrés deux jours plus tard au domicile de la famille Von Krosigk, un couple d’amis du producteur Siegfried Christmann, patron du label Ornament Records, une petite maison de disque qui a déjà enregistré John Lee HOOKER et Louisiana Red. Une vraie House Partie !

Ce second disque permet de découvrir un accordéoniste au sommet de sa forme avec ses accompagnateurs habituels : deux membres du futur Creole Zydeco Farmers : le guitariste Chester Chevalier et le batteur Clarence « Jockey » Etienne, un ancien jockey ayant joué avec Slim HARPO, Fats DOMINO et Lightnin’ SLIM et enfin le bassiste Wayne Burns.

En ouverture, la reprise de « Please Don’t Leave Me », standard de Fats DOMINO, pourrait laisser croire qu’Arceneaux rend un premier hommage à la Nouvelle Orléans. Cela semble réducteur, en fait l’accordéoniste délivre un clin d’œil à Clifton Chenier, lui aussi repreneur du morceau via un duo avec Rod Bernard. Ici, c’est un petit accordéon double rang qui remplace l’accordéon triple rang du grand maître et le piano de la version originale conférant une sonorité rurale.
Quand on vous disait que la famille Arceneaux était très ancrée dans la tradition créole, Fernest délivre avec « Persone Polé Dansé Avec Moin », une valse mid tempo qui pourrait s’inscrire dans le registre cajun. Seconde composition avec « Goin’ Back To Lafayette », titre qui rend hommage à la ville du même nom. Si Lafayette a été mis en chanson notamment avec « Allons à Lafayette » popularisé dès la fin des années 20 par Cleoma Breaux et Joe Falcon, l’un des premiers disques cajuns, repris au fil du temps par Harry Choates et Beausoleil, Fernest nous assène un two-step hautement vitaminé et personnel avec une démonstration de batterie (double kick) de Clarence Etienne.
Si « Honest I Do », un gros classique de Jimmy REED flirtait entre Chicago et Swamp Blues, Fernest et ses trois sbires nous emmènent pour une ballade au cœur de la Crescent City, le jeu de guitare de Chester Chevalier n’ayant rien à envier à celui d’Eddie Taylor. Autre reprise bien connue avec « Rockin’ Pneumonia ». Si ce classique New Orléans de Huey « Piano » Smith ne connut qu’une modeste 52ème place dans les classements lors de sa sortie en 1957, le titre rencontra un succès étonnant en 1973 via une reprise de Johnny Rivers. Musicalement lié à la Crescent City, Arceneaux oriente encore une fois sa reprise vers celle du tandem Rod Bernard/Clifton Chenier, la sonorité du petit accordéon nous ramenant résolument vers les bayous, transformant le R&B en two-step.
Le combo revisite le « The Things I Used to Do » de Guitar SLIM, transformant ce Blues torturé en une ballade louisianaise. Un peu comme si l’accordéon, telle une couche nuageuse, s’étirait dans le ciel pour laisser place aux rayons du soleil.
Issu du Folklore appalachien mais d’ascendance irlandaise, « In The Pine » aurait connu près de 170 variantes, les plus connues étant celles d’Arthur Smith et de Bill Monroe ou celle plus tardive de Doc Watson. Sous l’intitulé de « Black Girl », Leadbelly et Pete Seeger ramèneront la chanson dans le camp de la musique Folk. Grand Trad. de la musique populaire américaine, la chanson connaît aussi quelques répercussions via « Where Did you Sleep Last Night » interprétée entre autre par Leadbelly (encore lui), en acoustique par NIRVANA ou plus récemment en Soul par KIMBEROSE. Les Cajuns allaient eux aussi en faire une adaptation avec « Ma Negresse »♠ popularisée par Nathan ABSHIRE et reprise au fil du temps par les Hackberry Ramblers, Ernest Thibodeaux, Rockin’ Dopsie et en duo par Cedric Watson/Corey Ledet. Un morceau montant crescendo et servant de pont entre les traditions créoles et cajuns, deux mondes pas aussi éloignés : « Waouh –Ho ma négresse !- ayou toi t’as partir hier soir, ma négresse ? T’as rivé é à matin- ça m’fait d’la peine … … ».
La frontière entre la Louisiane et le Texas est des plus mince, Fernest reprend ici une ballade Soul de Don Robey popularisée par Bobby « Blue » BLAND qui semble obtenir l’approbation du public. Si Wilson PICKETT marcha en 68 dans les pas de Bobby Bland (quoi de plus normal pour une ballade), cette ballade intemporelle sera remise au goût du jour par Cindy LAUPER en 2010 dans son album « Memphis Blues ». Enregistré pour le label Excello en 1956 par Guitar Gable, « Irene » pourrait faire figure d’archétype de la ballade louisianaise, un juste retour aux sources pour Clarence Etienne, présent dans la version originale.
On ignore dans quel état était le domicile du couple Von Krosigk après « Zydeco Bogaloo », œuvre probable de Stanley Dural, un two-step entraînant que tout musicien louisianais a collé à son répertoire. Là, la version s’appuie sur la basse de Wayne Burns et le petit accordéon d’Arceneaux qui pour la première fois relance par deux fois les chanceux présents lors de cette house party. On note au passage que Fernest présente le morceau sous l’intitulé Zarico Boogaloo, le Zarico étant une autre expression pour désigner le Zydeco, au même titre que le Zologo, le Zodico ou La La Music.
Valse devenue l’un des hymnes de la Louisiane, on ignore avec exactitude qui est l’auteur de « Jole Blonde ». Certains prétendent qu’il s’agirait d’une compo d’Amedee et Cleoma Breaux, d’autres d’Andreas Lejeune. Peu importe, tous ces gens sont morts et la jolie blonde de la chanson aussi, mais c’est Harry Choates, une véritable étoile filante mais virtuose du violon qui popularise la chanson en 1946, gravée sur le label Gold Star. Toujours est-il que cette valse hyper lente permet de faire retomber la tension. On retrouve toutes les influences du terroir louisianais dans « Et Là-bas », une pure chanson cajun interprétée en black cajun.

Ce disque rare fait figure aujourd’hui de brillant témoignage de la musique louisianaise des années 70. Il a fait l’objet d’une réédition sous format CD en 1991 via Ornament Records avec une jaquette différente et en 1992 par Chrisly Records sous le nom de « Rockin’ Pneumonia ». Ces deux éditions proposent une haute qualité sonore.

♠ A titre informel, il n’y a aucune connotation raciste ou discriminatoire dans la chanson « Ma Negresse », le titre fait référence à une petite amie, un amour de jeunesse.

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   LE KINGBEE

 
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- Fernest Arceneaux (accordéon, chant)
- Chester Chevalier (guitare)
- Clarence 'jockey' Etienne (batterie)
- Wayne Burns (basse, chant 4-5)


1. Please Don't Leave Me.
2. Persone Polé Dansé Avec Moin.
3. Goin' Back To Lafayette
4. Honest I Do
5. Rockin' Pneumonia
6. The Things I Used To Do
7. Ma Negresse
8. Don't Cry No More
9. Irene
10. Zydeco Boogaloo
11. Jole Blonde
12. Et Là-bas



             



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