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VARIÉTÉ INTERNATIONALE  |  B.O FILM/SERIE

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JAMES BOND - Goldeneye (eric Serra) (1995)
Par MARCO STIVELL le 1er Septembre 2021          Consultée 2080 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

An 1995 : sortie de GoldenEye et avènement du 'nouveau James Bond', plus moderne et clinquant que jamais. Timothy Dalton aurait mérité de faire quatre films au lieu de deux, mais au moment de revenir, il a décliné lui-même l'offre. D'un autre côté, la saga a eu besoin d'un hiatus de six ans, le plus long de son histoire, pour repartir sur de bonnes bases et amorcer la transition. Michael G. Wilson, scénariste attitré depuis 1981 et co-producteur depuis 1985, s'associe en termes durables (toujours actuels) avec Barbara Broccoli, la fille d'Albert 'Cubby' Broccoli, fondateur de la saga d’EON Productions qui a juste le temps de voir le nouveau bébé avant de décéder en 1996. Pierce Brosnan, acteur célèbre et playboy irlandais, obtient enfin le rôle qu’il aurait déjà pu tenir une dizaine d’années plus tôt.

C’est le moment où les scénarios de James Bond s’émancipent des romans de Ian Fleming tout en puisant quelques éléments de-ci de-là. GoldenEye emprunte néanmoins son titre au nom de la maison secondaire de l’auteur en Jamaïque sur la côte nord (lui-même ayant retenu le nom de code d’une opération durant la Seconde Guerre Mondiale). Celle où il contraignait sa femme Ann et ses invités autant que lui-même à un mode de vie spartiate, celle dans laquelle il a concentré l’ensemble de son inspiration pour l’écriture du mythe, avec sa plage privée où il a vu en direct Ursula Andress en bikini blanc jaillir de l’eau telle une sirène en 1962 pour le tout premier film. Pour une poignée de scènes, GoldenEye reprend quelques éléments du caractère bondien restés inédits jusque là ou presque, comme lorsque notre espion favori connaît une poussée de testostérone en se voyant doublé en voiture par une femme, alors qu’il roule lui-même très vite !

La plus grande partie de l'ancienne équipe est donc reléguée au passé, à un ou deux éléments près comme Derek Meddings qui dirige les effets spéciaux en effort suprême (il décède lui aussi à ce moment-là et le film lui est dédié), notre Rémy Julienne qui coordonne les cascades pour la dernière fois à son tour (course-poursuite en voiture grandiose sur les hauteurs niçoises) ainsi que le toujours excellent Desmond Llewelyn, en bougon mais sympathique armurier Q inchangé depuis 1963. Izabella Scorupco et Famke Janssen obtiennent deux rôles de James Bond girls très différentes : la seconde, en Xenia Onatopp, tueuse et dominatrice sexuelle, voit ses scènes censurées dans certains pays ! Elizabeth Hurley a failli avoir le rôle, mais elle jouera également une James Bond girl deux ans plus tard dans la parodie Austin Powers ! La coiffure de Scorupco en Natalia Simonova a beau être affreuse, l'actrice s'inscrit dans la lignée de Carey Lowell/Pam Bouvier en 1989.

L’histoire puise dans l’idée de vengeance personnelle pour James Bond ainsi qu'une véritable peinture de la Russie post-guerre froide (chose que la pause de six ans a également permis de mieux marquer), élément que l’acteur allemand Gottfried John en général Ouroumov incarne à merveille. Une autre censure sera apposée au générique de Daniel Kleinman (remplaçant attitré de Maurice Binder) pour la vision de femmes nues 'détruisant' des symboles soviétiques, dans des pays comme l'Inde (étonnant, la Chine je n'aurais pas dit, mais bon !). Cela n'empêche guère le succès total - 350 millions de dollars en recettes - et un relancement de la saga en belle et due forme !

Pour ma part, c'est le film de la saga James Bond que j'ai vu en premier, après avoir joué longtemps au jeu vidéo correspondant sur console Nintendo 64. À l'époque, c'était une bonne approche, connaissant déjà l'acteur Pierce Brosnan grâce à la comédie Mrs Doubtfire. Aujourd'hui, cela reste un bon cru, malgré quelques défauts évidents, à commencer par certaines scènes d'action moyennes, des enchaînements un peu étranges voire superflus (la partie 'sentimentale' à Cuba) et une belle voiture pleine de gadgets donnée à Bond par Llewelyn/Q, mais qui, au final, ne sert pas à grand-chose sinon rouler (et encore !), comme si le concepteur s'était ravisé en plein film pour interdire qu'elle soit abîmée ! Et puis les dialogues sont très contestables, notamment ceux entre 007 et l'ex-006 dans la pourtant très belle scène du 'cimetière' de statues soviétiques, qui font scène de théâtre forcée. À l'inverse, le personnage de M, chef du MI6, renaît en force et cette fois grâce à une femme (en vrai aussi, avec Stella Rimington, dirigeante de 1992 à 1996), l'excellente actrice Judi Dench, meilleur rôle féminin du film mais pour deux séquences seulement (avec le même physique de Rimington). Elle a beau se montrer implacable et lui tenir tête, on la verra souvent sensible au sort de Bond, qu'elle dépeint directement comme sexiste et misogyne (ce qu'il n'est pas franchement).

Malgré le geek-tête-à-claques Boris Grishenko (joué par Alan Cumming), GoldenEye offre encore de bons rôles secondaires à Tcheky Karyo en ministre de la Défense Mychkin et Joe Don Baker (déjà présent en 1987) en Jack Wade de la CIA pour changer de Felix Leiter (et même si l'évolution de son personnage est elle aussi contestable : à la fin il ne sert pas à grand-chose !). Sans oublier le meilleur de tous, Robbie Coltrane l’Ecossais massif en parrain russe, Valentin Zukovsky. Un rôle à ne pas minimiser, malgré celui qu’il tiendra dans les films Harry Potter dès 2001 avec le géant garde-chasse Rubeus Hagrid ! De même, je préfère voir Sean Bean qui "explose" internationalement parlant ici, rasé de frais et tenant le personnage d’Alec Trevelyan/ex-006, plutôt qu’avec un look Viking dans le Seigneur des Anneaux ou Game of Thrones ! Quant au rôle premier, il est dignement conservé grâce à la prestation de Brosnan l'Irlandais qui, sans les surclasser, semble conserver le meilleur de chacun de ses trois prédécesseurs.

Musicalement, GoldenEye est une curiosité : c'est le seul film de la saga officielle (sans compter donc Michel LEGRAND pour Jamais Plus Jamais en 1983) où la partition est gérée par un Français, à savoir Eric SERRA. Jeune prodige de la basse découvert et propulsé par Jacques HIGELIN durant les années 80, il est très vite devenu (dès Subway, son deuxième film en 1985) le collaborateur le plus proche du cinéaste Luc Besson en la matière. L'apogée avant GoldenEye demeure bien évidemment Le Grand Bleu en 1987 avec son thème principal, très planant, avec une large base de synthétiseurs ambient et un parfum fort de basse fretless très jazz et mélodique.

Eric SERRA s'est fait pas mal étriller par la critique pour s'être montré 'hors-sujet', totalement détaché de l'esprit BARRY et des anciennes BO's bondiennes. Moi-même, je m'attendais à jeter ce travail musical aux orties en y revenant, au bout de nombreuses années passées avec en tête la plupart des thèmes de GoldenEye qui n'avaient plus la même force après la découverte des films anciens. Au final, ce n'est pas tout à fait vrai, mais on comprend cependant les mauvaises réactions dès le début du film avec un gunbarrel affreusement plastique, tout en sons électoniques et aigus, criards, passant vite sans laisser aucun bon goût dans la bouche.

Première séquence forte à Arkangelsk avec le saut du barrage monumental (plus suisse que russe en réalité), l'infiltration, l'arrivée de Gottfried John/Ouroumov, la 'mort' de Sean Bean/Trevelyan/006 et l'escapade en avion pour 007. Puis c'est le générique de Daniel Kleinman avec la chanson "GoldenEye", écrite et composée par Bono et The Edge, respectivement chanteur et guitariste-compositeur du groupe irlandais U2. C'est vraiment une "irish-affair' cette histoire de 95, et c'est la première fois que des artistes non-habitués aux BOs de films écrivent une chanson pour un James Bond. Eric SERRA habille le tout de boucles mais par l'orchestre, mélange cordes pizzicato (jouées aux doigts, le "ta tin tin tin" syncopé qu'on entend au tout début de la chanson), autres cordes à l'archet qui surfent lentement sur les quatre accords traditionnels du "James Bond Theme" amenés par John BARRY en 1962, et des attaques de cuivres très léchées dans leur 'virilité'.

Tout cela instaure un beau climat noir et loin de dénaturer l'esprit 007. Le reste de la chanson est un peu plus 'commun' dans un style ballade soul enfumée, froide mais transpirante de sensualité, et l'interprète n'est autre que madame Tina TURNER, ce qui pour beaucoup de personnes suffit à porter "GoldenEye" aux nues (pas celles en bikini, cette fois). Pour ma part, je ne suis clairement pas un fan de la "Lionne", vocalement comme en termes artistiques ("Proud Mary", c'est d'abord CREEDENCE à mes yeux), mais elle a un grain original par rapport à d'anciennes Bond singers, et elle s'illustre particulièrement bien sur le tout dernier refrain. Chanson marquante, pour ce retour de 007 en grande pompe. Récemment, j'entendais un groupe de musiciens avec chanteuse la jouer sur une place face à des restaurants lors de leur retour de pause repas, alors que la nuit d'été s'installait, avec une brise légère. Et je me disais : cette intro (qu'ils prolongeaient volontiers), quelle ambiance !

La B.O de GoldenEye fait ensuite se succéder quelques moments gracieux avec de l'action pure mais toujours aux synthétiseurs et aux basses modifiées (la virtuosité de SERRA en la matière lui offrant moult amusements), ainsi que du creux, très net, il faut bien le dire. Je me souvenais déjà avec lassitude de "Ladies First", ce funk-rap (milieu années 90 oblige) avec sons scratchés et métalliques qui suit Janssen/Xenia Onatopp et Brosnan/James Bond, ainsi que son 'évaluatrice' dans leur course folle sur les routes sinueuses au-dessus de Nice et de Monaco. La légèreté est de mise, avant l'arrivée d'autres franchises centrées sur la vitesse routière, Taxi et Fast and Furious, mais en dehors de l'effet diversité, musicalement, le résultat est un peu vain.

Un peu comme ce qu'on entend dans un style plutôt planant, avec accents jazzy, au cours du thème "Xenia" (scène dans les thermes) et de la suite "GoldenEye Overture", en fait toute la partie de la B.O pré-générique, consacrée à la mission Arkangelsk. Et cependant, on peut garder en positif l'arrivée de deux agents britanniques dans la salle des réservoirs inflammables, qui fait se superposer avec subtilité les mélodies de 007 et de "Goldfinger". Pas si hors-sujet que ça, en somme. Il y a aussi quelques beaux samples percussifs 'sourds', aux textures indescriptibles qui font, tout comme l'intro du générique, la marque de fabrique de cette B.O.

En termes d'action et de tension, SERRA fait d'ailleurs très fort avec "Fatal Weakness", marche sombre, lente et spatiale, littéralement hypnotique, qui accompagne les deux séquences mises à feu des satellites GoldenEye, à Severnaya puis dans le train et à Cuba. Les mêmes samples de percussions décrits plus haut reviennent, avec un aspect encore plus tribal-world et disons-le franchement, une très belle influence de Peter GABRIEL. Du John BARRY époque Moonraker en plus noir et moderne, un des meilleurs thèmes de l'ensemble. En revanche, le Français échoue en voulant incorporer l'orchestre et les variations sur 007 dans l'une des autres scènes-phares du film : celle de course-poursuite à Saint-Pétersbourg où Brosnan/Bond conduit un tank et détruit murs comme voiture de police, en remettant convenablement son noeud papillon ! Autre sujet de critique pour SERRA et même en amont, cette séquence a été reprise et modifiée par John Altman.

Toujours dans la partie négative : le caractère russe-soviétique de certaines parties de la B.O à travers des voix programmées, comme sur "Run, Shoot and Jump", "D.M. Mychkine" pour le côté marche militaire, ou "Our Lady of Smolensk" (Scorupco/Natalia dans l'église) sur le versant ambient-world, tous anecdotiques. On préfère légèrement la première partie de la suite "Whispering Statues", où Brosnan/Bond aux aguets marche dans le 'cimetière' de statues soviétiques et qui, par ses cordes sombres et tâtonnantes, emprunte à un autre thème ("The Same Passions", au port de Monte-Carlo). La deuxième partie, "Two Faced", est le seul thème de piano plutôt doucereux car évoquant la nostalgie de 007 en découvrant que son ami, non seulement vivant, l'a trahi et utilisé.

La B.O regagne de l'intérêt d'ailleurs avec ses quelques thèmes tendres, notamment l'ensemble de la "Severnaya Suite" mâtinée de quelques ombres, mais aussi "Bond at the Casino" (pas encore royale et pourtant !) lors de la partie de baccara monégasque. Un des meilleurs moments du film, là aussi. Néanmoins, ces titres, sous couverts de l'effet reprise logique dans une B.O, sont resservis durant la séquence romantique à Cuba avec peu de variation, de quoi allonger la durée sans que ce soit justifié. Le générique de fin, "The Experience of Love", est une ballade exotique et chaloupée plutôt appréciable, avec quelques restes 80's dans le son et chantée par Eric SERRA lui-même et co-produite par le grand Rupert Hine. On reconnaît la capacité de ce dernier à convaincre les non-chanteurs de prendre confiance en eux, comme il l'avait fait pour Anthony PHILLIPS, l'ex-GENESIS, à la fin des années 70, à juste titre ! SERRA croone mais ne force pas trop et s'en sort bien sur ce titre lumineux, bien accompagné par la chanteuse israélienne NOA aux choeurs.

Le Français a eu là une belle opportunité mais unique, et son travail n'est à bouder que de moitié (2,5 arrondi à 3). Quant à James Bond, s'il a depuis traversé avec brio les années 90, 2000 et 2010, bientôt 2020 malgré la concurrence rude des sagas susmentionnées et notamment fantastiques (Seigneur des Anneaux, Harry Potter etc), c'est parce que GoldenEye existe, malgré tous ses défauts, et arrive à point nommé en 1995.

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Dans une base clandestine à Cuba :
« Et comment va ce vieux Q ? demanda Alec Trevelyan sournoisement en éteignant la montre-détonateur de Bond.
-M'en parle pas, grogna 007. Toujours râleur, et bientôt il aura une gueule de Monty Python. »

Perchés au bord de l'antenne, au-dessus du vide :
« Pour l'Angleterre, James ? souffla Trevelyan.
-Non, pour moi. Dernière chance de vivre : quel est ton nom ?
-Alec Trevelyan.
-Quelle est ta quête ?
-Le Saint-Graal.
-Quelle est la couleur du maillot de Natalya ?
-...Blanc...
-Mauvaise réponse ! lança Bond souriant en lâchant prise.
-Aaaah ! hurla Trevelyan en tombant.
-Je déconnais, en fait c'était la bonne ! »

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   MARCO STIVELL

 
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- Eric Serra (compositions, orchestrations, chant)
- Tina Turner (chant)
- Bono, The Edge (composition)
- Rupert Hine (paroles, production)
- Noa (choeurs)


1. Gunbarrel
2. Goldeneye
- the Goldeneye Overture
3. (a) Half Of Everything Is Luck
4. (b) The Other Half Is Fate
5. ( C ) For England, James
6. Ladies First
- we Share The Same Passions
7. (a) Bond At The Casino
8. (b) The Same Passions
9. A Little Surprise For You
10. Xenia
11. D.m.mychkine
- the Severnaya Suite
12. (a) Among The Hell
13. (b) Out Of Hell
14. ( C ) The Husky Tribe
15. Our Lady Of Smolensk
- whispering Statues
16. (a) Whispers
17. (b) Two Faced
18. Run, Shoot And Jump
19. A Pleasant Drive In St. Petersburg
20. Fatal Weakness
21. The Trip To Cuba
22. That's What Keeps You Alone
- dish Out Of Water
23. (a) A Good Squeeze
24. (b) The Antenna
- the Scale To Hell
25. (a) Boris And The Lethal Pen
26. (b) I Am Invicible
27. For Ever, James
28. The Experience Of Love



             



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