Tout est là. Est-ce une question de foi ? Une question d’argent ? Une question d’orgueil ? Une envie de vivre à nouveau les feux de la rampe et la gloire du moment ? On n’en sait rien et, malgré toutes les interviews, il semble complexe de démêler les informations. Mais, peu importe finalement, l’analyse doit primer pour nous ; alors qu’attendre du quatuor viking après 40 années de silence en tant que groupe ? La réponse va commencer à se dessiner avec la sortie de ce premier double single. Comme d’habitude, Björn et Benny sont à la baguette, Anni-Frid et Agnetha chantent. Les gars, c’est la fête !

Quelques écoutes attentives de "I Still Have Faith In You" sont éloquentes. La magie opère à pleins tubes, comme si The Visitors datait de la semaine dernière. On pourra gloser des heures sur la voix totalement intacte d’Anni-Frid. Cela a-t-il une quelconque importance si les moyens ont été conséquents pour pallier aux déficiences de l’âge ? Surtout en nos temps où la technologie remplace beaucoup du reste. Au moins, nous sommes certains que le talent des compositeurs est bel et bien là, comme aux plus beaux jours. Le refrain a lui seul est sublime. J’ai entendu des comparaisons avec "The Winner Takes It All" et, bien que je ne sois pas d’accord, ce serait un raccourci bien trop simpliste.

Et quelle voix ! De quoi avoir envie de verser une larme ou deux face à la beauté du moment ! Et que dire de l’instant où la blonde Walkyrie rejoint la brune sur ce refrain fabuleux d’aisance. Non, il n’y a guère d’équivalent qualitatif dans la musique d’aujourd’hui. Bienheureux ceux qui vécurent comme moi ces instants géniaux où les tops du billboard étaient occupés par les artistes dits classiques d’aujourd’hui. Imaginez un peu la tête de tout ça dans quelques décennies ! L’orchestration est parfaite et les paroles plus objectives qu’on voudrait bien le croire. Alors, en sont-ils toujours capables ? La réponse semble limpide. Tant mieux, voilà de quoi garder la foi !

Comme toujours, les filles se partagent les chansons et, sur le second titre de ce single, c’est Agnetha qui officie. Là non plus, pas la moindre faiblesse à déplorer, mais une évidente maturité. Un rythme plus dansant, disco mais oui. "Don’t Shut Me Down" me semble plus pop, plus mainstream aussi. Mais, une fois de plus, le refrain qui associe les voix des deux déesses nordiques fonctionne remarquablement. Le morceau est sans doute moins mémorable que le premier, mais reste de très bon aloi. Il sonne peut-être un peu plus passéiste aussi. Qu’en pensez-vous ? Ah, tous ces violons ! On se croirait revenu en 1980 ! Quelle merveille, non ?

Il nous faut désormais attendre la sortie de Voyage pour confirmer cette première excellente impression. Vous pensez bien qu’aucun des membres d’ABBA n’a besoin d’un plan épargne retraite et que l’avenir reste assuré pour plusieurs dizaines de générations de petits vikings. Le seul élément probant dans la démarche relève de la Foi, de l’envie, du pied de nez face au temps qui passe. C’est ça aussi, l’humanité : se sentir vivre jusqu’au bout, jusqu’au dernier moment. Depuis la nuit des temps, et Hector face à Achille, chacun devrait ressentir cette sensation vibrante : la vie. Avant qu’on nous prouve le contraire, on ne vit qu’une fois.