Son précédent album, Les failles, avait, à juste titre, reçu un excellent accueil, tant critique que commercial, et avait été couronné par une Victoire de la musique.

Trois années plus tard, c’est dotée d’un autre statut médiatique et armée d’un vécu bien différent que Claire Pommet nous revient avec son troisième album. Bien que sa vie ait été chamboulée depuis, on y retrouve en grande partie le style minimaliste et intimiste propre à la chanteuse et musicienne, ses chansons à la beauté sobre et légère, ses textes empreints de poésie et de douceurs.
Mais, car il y a un 'mais', l’album est parsemé de petites digressions sonores assez surprenantes, et pas forcément pertinentes, tant elles brisent par moment la douce quiétude dans laquelle l’artiste nous plonge.
C’est particulièrement le cas de l’intro, "22:51", un monologue décousu qui fait l’effet d’un cheveu dans une soupe veloutée, notamment au regard du style pratiqué par POMME. C’est également le cas du discours qui apparaît à la fin de "Nelly". On peut pourtant comprendre qu’insérer la voix de Nelly ARCAN, l’écrivaine canadienne féministe qui s’est suicidée en 2009 et qui a inspiré ce morceau, peut avoir du sens. Mais, loin d’être émouvante ou convaincante, cette intervention est plutôt perturbante, voire contre productive. Là où Alpha BLONDY avait habilement mêlé chanson et discours de personnalités dans "Épistémicide" (Eternity, en valorisant la parole des personnes à qui il souhaitait rendre hommage, là l’intervention est plus une source de perturbation et de confusion.
Dans d’autres morceaux, des petits bruitages/sonorités viennent parfois troubler la douceur et la légèreté du propos de POMME. Le point d’orgue étant "B.", un hommage très surprenant à BARBARA. En effet, le choix d’utiliser un mélange de voix fausses et de vocodeur pour célébrer la chanteuse est assez déroutant. Dans le même registre, le son du piano de "La rivière" manque parfois de clarté et de précision, ce qui vient perturber le sentiment de quiétude et de sécurité que peuvent procurer les chansons de POMME.
Mais les reproches qui précèdent ne doivent pas occulter le fait que la plupart du temps POMME parvient à faire mouche et à nous transporter dans son univers personnel où elle sait se montrer émouvante et fragile. Et on retrouve ce qui fait la qualité et la singularité de son œuvre. C’est ainsi le cas du délicat et envoûtant "Tombeau" ou bien de "Dans mes rêves", un titre que l’on pourrait qualifier de fluet, tant il apparaît insaisissable et éthéré. "Allo", et "When I c u", un titre chanté en anglais, sont également à ranger dans les réussites. Dans ce dernier, les arrangements visant à doubler les voix sont particulièrement efficaces et envoûtants. On ne peut malheureusement pas en dire autant de ceux de "Puppy" qui pâtissent d’une production si confuse qu’elle en devient repoussante.

On le voit, cet album n’est pas exempt de défaut. Il donne parfois le sentiment d’avoir été livré un peu trop hâtivement au public, sans avoir été totalement peaufiné. Mais il n’en reste pas moins que, la plupart du temps, le talent et le charme de POMME parviennent à s’exprimer de très belle manière. Globalement, si le résultat ne s’avère pas aussi inconditionnellement féérique que celui des Failles, il y a lieu de saluer un nouveau très bon disque bourré de qualité et d’élégance.