L’un des atouts de la discographie de Nik Pascal RAICEVIČ est sa progression constante en qualité. Nous sommes partis de trois fois rien, avec un Numbers pitoyable, pour en arriver à ce Zero Gravity remarquable, qui marque son sommet musical.

Le morceau-titre occupe la première face, une première depuis "Cannavis Sativa" (1968). Autant l’annoncer tout de suite, Nik Pascal verse une nouvelle fois dans le recyclage sonore. "Zero Gravity" est tout simplement une version augmentée de "Cannavis Sativa". Ce dernier étant tout ce qu’il y a de plus creux et vain, un tel recyclage ne peut a priori que mal tourner. Mais, ô miracle, ça fonctionne. Réorganisé, enrichi de nouvelles improvisations (une mélodie et une piste pulsée) et de nouveaux bruitages (davantage de tintements), ce long morceau en devient autrement plus intéressant. Là où "Cannabis Sativa" était statique jusqu’à la sclérose, "Zero Gravity" est une composition évolutive et captivante. Sur ces vingt-deux minutes, nous pouvons globalement distinguer deux parties. La première commence par la nouvelle piste pulsée avant de s’étoffer et s’intensifier peu à peu. Le basse en bourdon s’interrompt brièvement au milieu pour un moment d’apesanteur, avant une second partie plus fidèle à "Cannabis Sativa". Un bien beau voyage.

La seconde face est plus fractionnée mais ne démérite pas. Là aussi, Nik Pascal RAICEVIČ a trouvé sa maturité musicale. Magnetic Web était prometteur mais Zero Gravity vient confirmer pour de bon la progression. Les morceaux sont toujours réalisés en semi-improvisation, mais mieux assemblés et manifestement mieux préparés. "Robot Rock" est étonnamment mélodique et accessible, bien rythmé par le tambourin et le bruit blanc. La suite est plus proche du précédent album. "Sounds From The Blue Planet" est de nouveau assez bruitiste mais pas aléatoire, les effets sonores s’y font figuratifs ; la piste est conclue par une voix féminine, rendue difficilement compréhensible par une intonation très nasillarde : Hello… Is here any (intelligent life?) on this planet?. "IQ + U = ?" contient tout de même un semblant de mélodie comme sur "Zero Gravity", au milieu d’effets de pulsations qu’affectionne décidément Nik Pascal. "Alpha Wave Diffusion" est du même tonneau mais est enrichi par des sons de clochettes.

Voilà un bel album d’ambient, qui reste par défaut le grand-œuvre de Nik Pascal RAICEVIČ. Il est bien sûr dommage que sa carrière s’arrête là, d’autant plus que son style musical commençait à prendre forme pour de bon. Nous pouvons encore nous intéresser, dans le même style, à Gates Of Reality (1973) de Steve BIRCHALL, Silver Apples Of The Moon (1967) de Morton SUBOTNICK, People The Sky (1969) de Michael CZAJKOWSKI, ou encore… Beaubourg (1978) de VANGELIS et Electronic Sound (1969) de George HARRISON.