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- Style : Luke, Stephan Eicher

CALI - L'espoir (2008)
Par GEGERS le 18 Mai 2025          Consultée 236 fois

Je repense souvent au passage de CALI dans l'émission On Est Pas Couché en 2008. Les chroniqueurs présents ce soir-là, Eric Naulleau et un certain Eric Z (comme Zorglub) reprochaient à l'artiste une certaine mièvrerie, sa naïveté et la vacuité de combats d'un autre temps. Le chanteur, lui, dans sa fougue insatiable, monta sur le pupitre pour, de sa verve vive, s'en aller remettre à leur place ces deux esprits rabougris. Qu'attendre d'autre de celui que l'on connaît pour son lyrisme à fleur de peau, son chant écorché, et son besoin presque viscéral de mêler l'intime au collectif ? Depuis 2003 et son Amour Parfait, le perpignannais arpente les scènes, le cœur et l'âme à nu, grands ouverts, avec cette sincérité désarmante qui, si elle ne plaît pas à tout le monde, ne triche jamais. Avec L'Espoir, son troisième album publié en 2008 l'artiste, qui parlait surtout de lui et de ses amours contrariées, décide de regarder l'époque en face. Il chante, il hurle, il galvanise, la tête haute. Bref, il lutte.

L'album débute avec le morceau qui lui donne son nom (lui-même inspiré de L'Espoir de Léo Ferré, publié en 1974) : un titre rock aux sonorités hispaniques, qui semble avoir été écrit par des temps de colère froide. Un morceau qui donne le ton : "L'espoir, c'est cette boule délicieuse / Qui nous bouffe le ventre / Cet énorme soleil / Quand j'entends près de toi / Tous ces milliers qui chantent / Aux étoiles, aux étoiles". Comme une boussole morale, l'espoir devient une quête en même temps qu'une évidence pour le chanteur écorché dont le rock résonne ici avec une profondeur et une beauté bouleversantes.

Engagé aux côtés de la gauche de Ségolène Royal et Jack Lang au cours de la campagne pour les élections présidentielles de 2007, CALI chante sa tristesse, cette défaite qu'il a vécu comme un deuil, sur le morceau rock enjoué "Résistance" qui se fait la narration de cette arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy. Ce même Sarko qui décide quelques mois plus tard d'envoyer des troupes supplémentaires faire la guerre en Afghanistan, et auquel CALI oppose "Pas La Guerre", qui résonne comme un cri dans le désert, et qui sous couvert d'une chanson d'amour évoque la cruauté de ces destins sacrifiés pour un drapeau. En sous-main, le texte est une lettre ouverte, une déclaration de désobéissance. La guitare, sauvage, furieuse, illustre et donne sa saveur à ce titre rock pompeux et touchant, clôturé par des cuivres qui, dans la tristesse, font encore résonner l'espoir. Comme une litanie.

L'Espoir n'est pas qu'un disque de combat. C'est aussi un album de mémoire. En témoigne "Giuseppe et Maria", chanson dédiée par CALI à ses grands-parents immigrés, ces invisibles venus d'Italie chercher mieux que la misère. Sur ce morceau qui propose une mélodie d'une beauté déchirante, CALI jette de l'amour et de la couleur sur l'horreur humaine. Inutile de s'attendre ici à quelque fin édulcorée ou happy end cinématographique. Ici, de l'amour comme acte ultime résonne uniquement et faiblement l'espoir. Un espoir peut-être vain, peut-être pas. Mais l'espoir, lui, et seulement lui.

Il y a de la douceur sur cet album. Comme une pause, "Les Beaux Jours Approchent" se fait une valse tendre et mélancolique, comme un moment de repos. A l'opposé du spectre musical, le rock "larger than life" de "1000 Cœurs Debout" porte en lui toute la bienveillance du monde, un single-né qui frappe juste et fort. Voici qui tranche avec "Le Droit des Pères", qui s'inscrit dans un registre rare dans la chanson française : celui présentant un homme qui parle de la douleur, de l'absence de son enfant, de la place du père que l'on nie lors d'une séparation actée par la justice. CALI y chante l'impuissance de ces pères privés de l'amour d'aimer leur progéniture, avec plus de conviction qu'il a lui-même été confronté à cette situation ("Ils ne m'ont laissé que le droit de hurler ton prénom dans le vent").

L'album est produit par Mathias Malzieu de DIONYSOS (dont on peut entendre la compagne, Olivia Ruiz, sur le morceau "Je ne te Reconnais Plus), qui sait habiller les chansons sans les étouffés. Les arrangements se font plus sobres et épurés que sur Menteur, laissant les mots respirer et résonner. CALI a tout l'espace nécessaire ici pour chanter l'humain, et son propos se voit parfaitement soutenu par ces quelques envolées, chœurs et cordes, dont la rareté renforce l'impact. Ce troisième album de CALI est plein, dense, rempli de chansons qui, tour à tour, se font une morsure ou une caresse. Ni un pamphlet, ni un journal intime. Un peu des deux. L'album d'un artiste debout, en colère parfois, mais jamais haineux. Simplement humain. "Je crois que l’artiste doit prendre position, c’est une question de survie", déclare alors CALI en interview. Il le fait ici avec justesse et une foi têtue dans le pouvoir des mots. A l'heure où l'engagement artistique semble parfois calculé, CALI choisit le désordre des tripes, proposant un album un peu foutraque qui peut hérisser autant que séduire. Alors bien sûr, L’Espoir n’est pas parfait. Il est parfois un peu trop frontal, un peu trop brut. Mais il est sincère, de la première à la dernière note. Qu'attendre d'autre d’un disque qui porte ce titre ?

3,5/5

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- Cali (chant, guitares, harmonica)
- Geoffrey Burton (guitare)
- Robert Johnson (guitare)
- François Poggio (guitare)
- Hugo Baretge (guitare)
- Julien Lebart (claviers)
- Johan Dalgaard (claviers)
- Steve Nieve (claviers)
- Daniel Roux (basse)
- Patrick Felices (basse)
- Henri Serra (basse)
- Alan Gevaert (basse)
- Richard Kolinka (batterie)
- Benjamin Vairon (batterie)
- Philippe Entressangle (batterie)
- Thierry 'toune' Lemillour (batterie)
- Blaise Margail (trombone, guitare)
- Nicolas Puisais (trompette, claviers)
- Steve Wickham (violon)
- Aude Massat (alto)


1. L'espoir
2. Je Ne Te Reconnais Plus
3. 1000 Cœurs Debout
4. Comme J'étais En Vie
5. Je Suis Laid
6. Sophie Calle No 108
7. Résistance
8. Amoureuse
9. Pas La Guerre
10. Giuseppe Et Maria
11. Les Beaux Jours Approchent
12. Je Me Sens Belle
13. Paola
14. Le Droit Des Pères



             



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