Recherche avancée       Liste groupes



      
CHANSON JAZZ  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 


 

- Style : Mouss Et Hakim, Serge Gainsbourg , Bernard Lavilliers , Art Mengo , Michel Legrand

Claude NOUGARO - Je Suis Sous... (1964)
Par RAMON PEREZ le 5 Août 2025          Consultée 337 fois

Au long de sa carrière, NOUGARO fut tiraillé par deux forces opposées : une qui l’incitait à être accessible, populaire ; l'autre qui l’amenait à être exigeant, élitiste. Ses albums ont constamment navigué entre ces deux tendances, des parutions ouvertes à tous alternant avec d’autres plus hermétiques. Cela a commencé dès les premières années. Sous la houlette de Michel LEGRAND, les débuts sont tout feu, tout flamme. Le cinéma en 62, avant deux 45 tours l’année suivante pour enfoncer le clou. Etonnamment, ces deux-là n’ont pas été regroupés dans un 33 tours malgré leurs succès*. Le second est porté par "Chanson pour Marilyn", typique de ce style Nouvelle-vague que les deux hommes affectionnaient alors. Ils s’amusent aussi avec un autre titre d’être "A la mode".

Mais c’est plutôt sur le troisième morceau qu’il faut s’arrêter, "Pauvre Nougaro", car il est précurseur de l’évolution que l’on peut constater à l’écoute de Je suis sous…, le 25 cm de 1964 qui est nettement plus sombre. Ce n’est pas encore le cas de cette chanson, qui montre toujours un NOUGARO lumineux orchestré positivement par Legrand. Mais il fait en réalité bonne figure. Un peu avant, il a percuté un mur en voiture, il en a été quitte pour un long séjour hospitalier. Alors il joue un peu au clown pour positiver en racontant cette histoire, mais cela n’aura qu’un temps. C’est son ami Hubert Géraud qui est à ses côtés en cette épreuve ; il lui compose cette chanson de réconfort. Une fois remis sur pied, NOUGARO a envie de travailler plus sérieusement avec lui. A deux ils vont créer cinq chansons pour le nouvel album, dans un style assez différent de ce qu’il faisait avec Michel LEGRAND.

En réalité, l’évolution de fond est là. Dans sa construction artistique, Claude avait besoin de s’émanciper de la tutelle bienveillante de son premier compositeur. Hubert Géraud le lui permet donc. Il faut dire que ce n’est pas n’importe qui, c’est un compositeur établi depuis une quinzaine d’années avec quelques succès notables à son palmarès (en particulier "Sous le ciel de Paris" qui connait une destinée internationale). NOUGARO lui fournit des textes plus introspectifs, il les habille de partitions plus chics. Pas forcément plus recherchées, mais assurément plus concentrées. Il force le chanteur à se faire plus fin, à poser davantage sa voix qui gagne immédiatement en maturité. Elle approche parfois le registre de la confidence, nous parle de l’amour, de la difficulté de parler aux femmes ou de se sentir homme au milieu des coqs.

Peu évidents, ces cinq morceaux constituent pourtant le socle du disque. Il reste à les orchestrer. Jusqu’ici, c’était à nouveau Michel LEGRAND qui s’en chargeait. Mais puisqu’il faut le laisser en-dehors pour pouvoir grandir, Claude se retourne vers l’un de ses proches amené à devenir son principal complice : Maurice Vander. Celui-ci monte un ensemble où figure un autre musicien important dans l’univers nougarien, l’organiste Eddy Louiss. Ces deux-là se font la main sur l’une des premières chansons du toulousain, "Il y avait une ville", déjà présente sur le premier disque de 1958. Les deux compères la magnifient dans cette nouvelle version, par un arrangement qui illustre davantage qu’il n’accompagne ce texte déjà sombre. Artifice simple, les effets de l’orgue soulignent la menace des mots. Il n’y a rien de très compliqué dans ce que propose musicalement ce disque, mais c’est toujours impeccablement pesé et finalement plutôt sophistiqué malgré cette simplicité. Chic, à nouveau.

Pas de cuivres ou de chœurs. Juste une contrebasse, une batterie, un piano et l’orgue pour l’essentiel des morceaux. Avec à peine une guitare ou des percussions placées de temps à autres pour colorer. Cela fait immanquablement penser au GAINSBOURG des mêmes années qui expérimentait lui aussi ce minimalisme, avec Confidentiel et Gainsbourg Percussions. Des textes plus sombres, des compositions moins accessibles, une orchestration volontairement limitée… Tout pour aller dans la direction du NOUGARO exigeant qui signe avec ce petit album sa première apparition. Comme ce sera invariablement le cas lorsqu’il se laissera par la suite aller à cette inclination, il ne rencontre pas le même succès que précédemment. Ce n’est que partie remise en attendant le disque suivant qui, en revenant franchement dans l’autre direction et en introduisant les adaptations de standards jazz, va l’installer pour de bon.

Il y a pourtant une chanson parmi les plus populaires de NOUGARO, celle qui a fini par donner son nom à ce disque (paru initialement sans titre, parfois appelé N°2 – ce qui révèle à nouveau le peu de cas fait de son tout premier album) : "Je suis sous…", une composition de Jacques Datin (comme la plupart de ses premiers succès). Une sorte de survivante de l’esprit précédent du chanteur au milieu de l’humeur du moment. Mais elle est tellement bien faite, immédiatement drôle dans son texte, son accompagnement et son interprétation, qu’elle trouve toute sa place en contrepoint de ce disque si sérieux. A noter pour finir que Datin a également composé la chanson d’ouverture, ce "Mon assassin" qui renvoie dans l’intention au style Nouvelle vague du disque d’avant, avec toutefois une orchestration très intéressante à base de percussions étonnantes. Tout le reste, c’est de l’introspection nougarienne, portée par des notes classieuses. Le toulousain ira plus loin dans cette veine par la suite, par exemple sur Sœur Ame. Mais c’est déjà un très beau premier pas dans cette direction. Celui qui achève cette période des débuts. Il a maintenant toutes les cartes en main pour passer à la vitesse supérieure.

* Le premier 45 tours a parfois été ajouté à l’album Le Cinéma tandis que le second a rejoint dans certaines éditions Je suis sous…, ce qui est peu heureux au regard de la différence de ton de ce dernier.

A lire aussi en VARIÉTÉ FRANÇAISE par RAMON PEREZ :


OLDELAF & MONSIEUR D
Derniere Chance D'etre Disque D'or (2009)
Aussi bien qu'un bon vieux Franquin.




Les OGRES DE BARBACK
Quercy-pontoise (2018)
A l'occitane


Marquez et partagez





 
   RAMON PEREZ

 
  N/A



Non disponible


1. Mon Assassin
2. La Marche Arrière
3. Il Y Avait Une Ville
4. Parler Aux Femmes
5. Je Suis Sous...
6. Sensuel
7. Les P'tits Bruns Et Les Grands Blonds
8. Regarde-moi
9. Pauvre Nougaro*
10. Chanson Pour Marilyn*
11. Tout Feu Tout Femme*
12. A La Mode*


             



1999 - 2025 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod