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POP / ROCK / BLUES  |  STUDIO

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GOLDMAN JEAN-JACQUES - Entre Gris Clair Et Gris Foncé (1987)
Par SUNTORY TIME le 18 Septembre 2010          Consultée 12435 fois

Connaissez-vous la théorie des gris colorés ? Cette théorie picturale vise à nous montrer que le gris n’est pas que le fruit d’un mélange de noir et de blanc. Il existe des gris rouges comme des fumées surgissant de je ne sais quel volcan ou des gris-bleu d’un ciel d’orage pesant et majestueux. Tout cela pour dire que les gammes de gris sont extrêmement nombreuses, variant du plus clair au plus foncé. Une couleur au final des plus riches et variées.

En 1987, Jean-Jacques GOLDMAN est une méga star en France, l’un des chanteurs les plus populaires et les plus talentueux de sa génération. Cependant, il n’a pas encore une stature de grande référence, toujours cantonné au rôle de jeunot débutant. Il lui manque l’album qui le consacrerait définitivement comme un artiste qui laissera son nom dans l’Histoire de la chanson française. Après une tournée triomphale et un album En Public qui capte l’énergie de différents concerts, GOLDMAN retourne en studio pour enregistrer ni plus ni moins qu’un album magistral : Entre gris clair et gris foncé.

Un album ? Non, un double-album ! Vingt chansons entre rock et intimité. Un premier disque Gris Clair, lumineux et électrique, puissant et rock, tout simplement. Un deuxième disque Gris foncé plus intimiste et calme (mais pas acoustique pour autant).
Le premier disque s’ouvre a capella, puis les instruments arrivent petit à petit, accompagnés par les chœurs puissants de Carole FREDERIKS, nouvelle venue depuis la tournée de 1986. Tout d’un coup, le rythme se fait plus rapide, une boucle de riffs de guitare absolument dantesque nous entraîne jusqu’au bout de ce titre que conclut un dialogue saxo/lead guitare de toute beauté ! Premier titre magistral que ce "A Quoi tu Sers ?" au texte grinçant. "Il changeait la vie" est un tube typiquement Goldmanien et très efficace. "Tout petit monde" est une ravissante petite chanson humaniste aux claviers poignants et au final ravageur. Quant au morceau titre "Entre gris clair et gris foncé", il est malheureusement méconnu, mais il est sûr qu’il aurait squatté le hit parade s’il était apparu en face A de 45-tours. C’est un titre excellent, puissant et imparable.

Le grand tube de l’album, c’est évidemment "Là-bas" en duo avec SIRIMA, chanteuse sri-lankaise que notre J.J. national a rencontrée dans le métro parisien. Cette chanson raconte le déchirement d’un couple (on peut supposer mexicain) dont le mari rêve de partir aux USA, contre l’avis de sa femme qui sait les désillusions qui l’attendent. Le clip tiré de la chanson est très fidèle au texte. Quand à SIRIMA, elle était promise à une grande carrière, carrière qui n’aura jamais lieu car elle fut assassinée par son mari en 1988. "Là-bas" est une belle chanson, mais elle est de mon point de vue loin d’être la meilleure du double-album.

"C’est ta chance" et "Des bouts de moi" ont un potentiel tubesque remarquable, et les synthés imitant les riffs de guitare n’ont pas trop mal vieilli avec le temps. "Des bouts de moi" s’achève par un bad-trip de saxo particulièrement inattendu transitant vers des pleurs de bébés et des chants d’enfants qui introduisent, eux, "Fais des bébés !" qui s’apparente davantage au hard-rock. Ayant comme thème la fécondation in-vitro, ce titre est un concentré d’humour et de riffs saturés. Un pur bonheur !

"Puisque tu pars" représente le sommet de l’album par la longueur comme par la qualité. Avis aux fans de PINK FLOYD : avez-vous reconnu l’intro de cette chanson ? Il s’agit d’un extrait de "Is There Anybody Out There ?" de l’album The Wall. Quant à la chanson elle-même, il s’agit d’un slow poignant au possible, où J.J.G chante mieux que jamais, et nous offrant quelques-uns de ses plus beaux solos de guitare, dans le style de David GILMOUR comme par hasard. Malgré ses 7,35 minutes, cette sublime chanson qui remporte un très grand succès clôt le premier disque en beauté.

Le deuxième disque est un peu particulier car la plupart des morceaux datent des débuts de GOLDMAN en solo (époque Démodé). Des chansons comme "Doux", "Filles faciles", "Appartenir" ou "Je commence demain" sont en effet contemporaines de "Il suffira d’un signe", premier grand succès du chanteur. Elles contrastent par leurs arrangements sobres, moins électriques que sur le premier disque, à l’exception de "Quelque part quelqu’un" aux claviers très prononcés qui n’auraient pas fait tâche avec les neuf premiers morceaux.
"Doux" et "Il y a" sont de belles ballades où GOLDMAN chante accompagné de sa guitare et de discrets claviers. " Filles faciles" et "Reprendre, c’est voler" sont dominés par un piano tantôt léger tantôt mélancolique. "Je commence demain" est un blues assez sobre qui aura son heure de gloire dans les années à venir, et "Elle a fait un bébé toute seule", autre grand succès de l’album (et suite de "Fais des bébés !"), est une amusante ballade country.

D’autres titres comme "Qu’elle soit elle" ou "Appartenir", voire "Il me restera" dans une moindre mesure, semblent être des ébauches, des chansons inachevées, au vu de leur courte durée. Mais elles ne sont peut-être que des petites mélodies que J.J. voulait concrétiser, quitte à ce qu’elles n’aient pas un format standard. Bien sûr, le grand morceau de ce disque "Gris foncé" reste "Peur de rien blues" où la guitare de GOLDMAN atteint des sommets. Le meilleur morceau de blues de toute sa carrière, plus de 6 minutes de puissance et de solos divins.

Deux disques pour un album, aussi majestueux que différents, par la variété de style, la richesse des arrangements, la qualité des parties de guitare électrique comme acoustique. GOLDMAN fait preuve d’inventivité en composant des chansons à la construction complexe ("A quoi tu sers ?" notamment). Si le deuxième disque est moins efficace musicalement, il met davantage en valeur les textes, là aussi très réussis. J.J est décidemment un compositeur ainsi qu’un auteur de grand talent. Et avec Entre gris clair et gris foncé, Jean-Jacques GOLDMAN devient clairement un géant de la chanson française, un 'boss' comme se plaisent désormais à le surnommer certains.

Preuve est que le monde n’est pas tout blanc ni tout noir, mais résulte d’une infinité de valeurs de gris. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cet album nous en offre une large palette. Le premier chef-d’œuvre de Jean-Jacques GOLDMAN, même si le meilleur reste encore à venir.

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- Jean-jacques Goldman (chant, guitares, piano, claviers)
- Michael Jones (guitare, choriste)
- Patrice Tison (guitare)
- Claude Samar (guitare, dobro, banjo)
- Christophe Deschamps (batterie -titres 4, 7, 9 & 14)
- Joe Hamer (batterie -titres 1-2, 5-6, 12)
- Roland Romanelli (synthétiseur)
- Carole Fredericks (choriste)
- Sirima (chant - titre 5)
- Jean-Jacques Milto (harmonica - titre 12)
- Patrice Blanchard & Patrice Mondon (violon - titre 12)
- Patrick Bourgoin (saxophone - titre 1)
- Prof Pinpin (saxophone - titre 2)
- Guy Delacroix (basse)


1. À Quoi Tu Sers ?
2. Il Changeait La Vie
3. Tout Petit Monde
4. Entre Gris Clair Et Gris Foncé
5. Là-bas
6. C'est Ta Chance
7. Des Bouts De Moi
8. Fais Des Bébés
9. Puisque Tu Pars

1. Filles Faciles
2. Je Commence Demain
3. Elle A Fait Un Bébé Toute Seule
4. Quelque Part, Quelqu'un
5. Qu'elle Soit Elle
6. Doux
7. Reprendre C'est Voler
8. Il Y A
9. Peur De Rien Blues
10. Il Me Restera
11. Appartenir



             



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