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The CRAMPS - Gravest Hits (1979)
Par TOMTOM le 27 Mars 2012          Consultée 3043 fois

Nous sommes en 2010, au début du mois d’août, vers 5h du matin. Le gardien de l’hôtel, sous mescaline depuis minuit, nous débine son trip « Paradise City ». Bah oui, nous sommes à Los Angeles. Plus précisément, mon compatriote et moi nous apprêtons à quitter la ville. Etrange paysage que celui qui se presse aux portes coulissantes, alors que les feux rouges brûlent mes yeux endormis, que l’humidité attaque mes bronches nicotinées. Premier bus de la journée, la lourde carlingue ramasse clochards mexicains, flous alcooliques et autres épaves de la nuit. Parmi elles, cet obèse vétéran sur béquilles nous parle de crucifixion et de Jésus apparu en pleine rizière Viêt-Cong, un lieu manifestement peu reluisant mais que notre interlocuteur avait choisi comme terrain de jeu après s’être mangé en pleine tronche et en live l’assassinat de Kennedy à la télé. Légère gène, atmosphère malsaine, l’homme se fait violent. Je n’y tiens plus et me fourre les écouteurs d’Ipod dans les oreilles.

Seize minutes, cinq chansons et 40 pulsions meurtrières plus tard, j’avais compris ce que tout cela voulait dire.

Oubliez votre DVD de Pulp Fiction, vos posters de films de zombies, votre collection de K7 pornos ou votre best-of des Beach Boys : seuls les crimes collectifs n’engagent personne. Expérience totale, se balancer un disque des Cramps c’est embarquer dans un mystery train américain qui ramasserait au passage les poubelles de toutes les sous-cultures qu’a pu compter ce beau pays : Rockabilly, Surf Music, Acid Rock, Garage Rock, comics, films de série z… le tout agrémenté d’une forte dose de sexe et de violence, encore et toujours. Ultra-violence même, mais pas seulement.

Lors d’un concert surréaliste au Napa State Mental Hospital (!) en juin 1978, Lux INTERIOR balance au public déphasé : « Somebody told me you people are crazy. I’m not so sure about that. » Le gars s’y connaît, la vraie démence est sur scène, libre et inconsciente du mal qui la ronge. Et fortement contagieuse qui plus est. Car il me paraît impossible d’apprécier ce qui dégouline de ces enceintes si ce n’est que fortement perturbé, hanté par tous ces reliquats que la société récuse, fasciné par les postures obscènes et les cris d’animaux, par tout ce qui est « inattendu et incontrôlable ». Se foutre un album des Cramps dans le cerveau a pour condition nécessaire et suffisante l’annihilation complète de toute décence. Lux INTERIOR nous invite à le suivre, impossible de refuser. On lui doit bien ça.

The Cramps (littéralement « douleurs menstruelles ») est un gang d’authentiques dégénérés dopés au heavy trash jusqu’à la moelle. Pas un ne sait jouer, surtout pas Bryan GREGORY dont le jeu à deux accords est noyé sous un fleuve de larsen et de fuzz. A la batterie, Nick KNOX se complait dans la reproduction de rythmes tribaux, les peaux régulièrement percées. Lux INTERIOR est ce grand chaman rock n’ roll, translation obscure d’un Elvis dont la place est désormais libre. Avec la sulfureuse Poison IVY, son auto-stoppeuse de compagne depuis 1971, il monte un projet de vie sexuel, sauvage, direct, qui dès 1976 enflamme (au propre comme au figuré) la scène new-yorkaise du CBGB puis les bacs à vinyles, avec deux singles sortis en pleine année Punk et compilés deux ans plus tard dans le présent Gravest Hits.

Tout semble ici ode aux héros d’INTERIOR et d’IVY, retour primal à l’essence d’un underground idéalisé. Le « Surfin Bird » des Trashmen et ses guitares toujours discordantes, son explosion suicidaire au bout de deux minutes et trente secondes dépasse de très loin la version contemporaine des Ramones. « Domino » est un chef d’œuvre de surf music distordu et chevrotante pendant que « Human Fly » (seule composition du groupe), joué très près de l’ampli, est une ode au son dégueulasse des premières galettes vinyles. « The Way I Walk » est une reprise barrée de Jack Scott et pourrait être la musique d’accompagnement d’un cow-boy perdu dans un cimetière. Lux brouille les pistes, multiplie les hoquets et autres gimmicks Rockabilly, susurrent ses incantation avant de gueuler la seconde d’après. Son groupe s’approprie tout, et tout lui va comme un gant. Impossible a priori de discerner les reprises des compositions. Le tout est habité, sauvage mais, et n’en doutez pas, tellement sérieux. Reste la cadavérique et spatiale « Lonesome Town » piquée à Ricky NELSON. Brian GREGORY s’y contente de s’accorder dans un étrange mouvement slide. A elle seule, cette chanson justifie l’attente du premier véritable album studio.

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   TOMTOM

 
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- Lux Interior (chant)
- Poison Ivy Rorschach (guitare)
- Brian Gregory (guitare)
- Nick Knox (batterie)


1. Human Fly
2. The Way I Walk
3. Domino
4. Surfin' Bird
5. Lonesome Town



             



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