La carrière de Chris DE BURGH est un peu comme une longue tirade de Shakespeare, une grande envolée lyrique empreinte de poésie romantique. Car le chanteur est un amoureux permanent. Non pas un « latin lover » qui use de son verbe pour canaliser sa fougue emplie de testostérone, façon Julio Iglesias, mais un amoureux gentleman, mettant tout son flegme britannique au service de ses velléités platoniques. « I'm ready for romance », clame-t-il sur fond de saxophone et de clavier démodé sur « Ballroom of Romance », l'un des titres de ce huitième album du chanteur. Un morceau, au moins, fait que Chris DE BURGH n'est pas inconnu de vos oreilles franco-françaises : « Lady In Red », tube interplanétaire* qui voit le crooner au service de sa majesté déclarer sa flamme à sa tendre épouse sur fond d'une rythmique tribale, façon Toto. Un titre qui trusta la pole position des charts américains et européens pendant une bonne partie de l'année 1986. Un tube, que dis-je, une véritable déclaration d'amour !

C'est vrai, aujourd'hui, Into The Light peut sonner légèrement daté et mielleux. Malgré tout le soin apporté à sa conception, la pop-rock de l'artiste a du faire face au difficile passage du temps. Mais attention, il faut veiller à ne pas prendre Chris DE BURGH pour un Frédéric François britannique. Car si du miel il y a, il est étalé avec force et talent sur des compositions qui n'en oublient pas pour autant de laisser un espace d'expression suffisant à la guitare électrique, à l'image de celle qui prend son envol sur la deuxième moitié de l'énergique « Say Goodbye To It All », un des meilleurs titres de cet opus. Tout amoureux transi qu'il est, ce bon vieux Chris n'utilise pas ses sentiments comme prétexte à des mélodies niaises et inutilement doucereuses, mais constitue un réel répertoire musical foisonnant d'ambiances et d'instruments variés, se confondant dans une harmonie bienveillante qui se charge, justement, de susciter cet envahissant sentiment d'amour.

Un travail complexe donc, qui se voit magnifié par le talent vocal de Chris DE BURGH, dont le charisme et la voix chaude et puissante font des merveilles sur le lancinant « Fire On The Water » au refrain prégnant. Résolument calme, tant rythmiquement qu'au niveau des envolées lyriques, cet album transporte l'auditeur dans des ambiances délicates qui ne peuvent laisser indifférents. Il suffit de jeter une oreille sur « For Rosanna », ballade piano/voix dédiée à la fille du chanteur (devenue depuis Miss Monde 2003) pour se rendre compte de la sincérité qui transporte un Chris totalement habité par son propos. Si vous n'avez pas un cœur de pierre, vous ne pourrez qu'être convaincu par cette petite merveille aux allures discrètes de berceuse. Il en ira de même pour « What About Me », ballade finale (un exercice dans lequel le chanteur excelle), que les incursions de guitare électrique transforment en une pièce épique de toute beauté.

L'amour donne des ailes. Il permet aussi à Chris DE BURGH de se transcender lui qui, avant de devenir un crooner pour maisons de retraite, a été un des plus fervents défenseurs de ce sentiment enivrant. Impeccable vocalement, proposant de très nombreux morceaux dignes d'intérêt, le chanteur livre avec Into The Light une de ses œuvres les plus marquantes, et un de ses rares albums réellement indispensable. Un opus nécessaire en tous cas pour se rappeler, encore une fois, de la beauté de la dame en rouge...

* Mais si, rappelez-vous : http://www.youtube.com/watch?v=4kOs0dGZH04&feature=related