La douleur est utile. En plus de provoquer un plaisir malsain chez certains, elle permet de mieux mettre en exergue ce qui ne va pas pour mieux s'en débarrasser. Malheureux sont les gens qui affirment – forcément à tort – qu'ils ne souffrent jamais. Cet état de fait concerne tout le monde, riches comme pauvres, anonymes comme célébrités. Quant à Olivia RUIZ, elle fait clairement partie de cette dernière catégorie. La séparation avec Mathias Malzieu a ainsi été un prétexte pour se ressourcer à Cuba, afin de repartir du bon pied. Cet exil a été salvateur, et ça se voit en chanson avec Le Calme et la tempête, son dernier opus.

Le Calme et la tempête est un album plus qu'excellent. Il s'agit sans doute du meilleur album jamais composé par RUIZ. Enfin, pour être plus précis, c'est un excellent départ. En effet, la chanteuse a écrit l'intégralité de ses chansons toute seule, sans une quelconque aide extérieure. On ne peut que s'en réjouir, voire se plaindre qu'elle n'ait pas fait cela plus tôt. Côté musique, les touches de rock présentes sur les précédents albums ont totalement disparu. Les sonorités pop et latinos les remplacent aisément, sans compter les arrangements électro, et cela fait vraiment plaisir. Non pas que le rock soit sale, mais un peu de changement ne fait pas de mal.
Olivia Ruiz s'est ressourcée, et cela se sent. Le Calme et la tempête commence d'ailleurs in medias res avec « My Lomo and Me ». Cette chanson « tranche de vie », autobiographique, joue à merveille son rôle d'ouverture, entre paroles fort jolies et musique folk intéressante, rien n'est à jeter.

Par la suite, on plonge dans une ambiance assez sombre entrecoupée de petits rayons lumineux. La direction prise est à l'opposé des albums précédents. On ne peut qu’être frappé par la noirceur de "Larmes de crocodile". Olivia RUIZ y manie une plume acerbe et cynique, assez déroutante. Mais ce n'est pas la seule chanson dans cette veine, loin de là. La chanson-titre ne brille pas non plus par son côté joyeux. Olivia expie ses douleurs, ses expériences passées, et fort heureusement, cela ne dérive pas en lamentations risibles. Quarante minutes de pleurnicheries accompagnées par des cordes, ça aurait été lamentable (Roger, si tu nous lis...). En guise de conclusion, "La Llorona", reprise d'une chanson folklorique hispanique, s'inscrit bien dans cette optique. Notons la présence en invités de son père et de son frère, qui ne gâchent en rien la chanson.
Tout n'est toutefois pas sombre sur Le Calme et la tempête – sinon, il s’appellerait juste La Tempête. Certains titres se font plus joyeux, ou en tout cas plus lumineux. Mais seulement en apparence. « Mon p'tit chat », par exemple, sonne enjouée et rythmée, mais il s'agit en vérité d'une chanson sur le thème de l'absence. En fait, pour trouver des titres vraiment éloignés de la thématique de la séparation, il faut aller chercher du côté des bonus. Ainsi « Le Pirate » se pose en bonne reprise de souffle, et c'est tant mieux. On passera sous silence, par contre, les remixes.

Olivia RUIZ a souffert, mais a réussi à rebondir. Avec Le Calme et la tempête, elle montre que non seulement elle peut composer toute seule, mais qu'en plus, elle le fait très bien. Maintenant, il s'agit de voir si cette haute qualité sera maintenue sur le prochain album. Gageons que oui.

Note réelle : 4,5/5