Le mois de mars annonce le printemps et le Beacon Run des Allman Brothers au Beacon Theatre à New York. Les concerts du groupe sont de plus en plus rares, vraisemblablement à cause des ennuis de santé de Gregg qui ont amené les autres membres à développer des projets solos.
Mais une fois l’an, dans cette superbe salle, le groupe se retrouve, et invite des copains pour quelques shows.

Précisons que les concerts de l’ABB sont tous disponibles en téléchargement légal et payant sur le site de Munck Music en quasi instantané. Les versions CD sortent quelques semaines plus tard et sont en commande chez Hittin’ the Note. Enfin, un coffret regroupant l’ensemble du Run sera disponible également en milieu d’année sur le même site.

On pourrait craindre que le groupe ne soit un peu rouillé pour le show d’ouverture, mais nous sommes vite rassurés dès la longue introduction de « Les Brers in A Minor » composé par Dickey Betts. Autre excellente nouvelle, Gregg a retrouvé toute ses immenses qualités de chanteur, il suffit d’écouter « It's Not My Cross To Bear » : c’est profond, soul, on sent la chaleur du Sud dans son gosier.

Derek Trucks a changé ses amplis, il utilise maintenant des PRS, ce qui semble modifier la restitution de son jeu de guitare, il se rapproche plus du son de Warren et c’est peut- être plus heavy moins fluide. Mais trêve de chipotage, quand, dans le même orchestre, cohabitent deux immenses guitaristes, on écoute leurs solos, et on dit merci.

Les set-list sont toujours composées d’une part des classiques du groupe « Statesboro Blues », « One Way Out », « Midnight Rider ». Mais ce qui retient surtout l’attention, ce sont les reprises ou les titres peu interprétés, quasi oubliés. Et on est servi avec « Rain » un morceau très peu connu des Beatles et surtout un nouveau titre « Dusk Till Dawn » composé par Warren, à la tournure originale et un morceau de Jimi Hendrix « 1983 (A Merman I Should Turn To Be) » incluant la « Mountain Jam » qui est, sauf erreur, une première dans le répertoire du groupe et est particulièrement superbe.

D’autres instants magiques avec « Key To The Highway » et « Don't Keep Me Wonderin' », enchaînement d’un classique du blues et de la chanson composée par Gregg sur un tempo très lent, et on atteint des sommets. Comme souligné plus haut, deux grands de la six cordes jouent ensemble, et jamais ils ne se marchent sur les pieds, jamais ils ne jouent à « tu as vu ce que je sais faire », le résultat est un bonheur absolu, les parties de slide sont envoûtantes, et les chorus beaux à pleurer.

Ecoutez cette version de « Good Morning Little School Girl », émouvante, lente, bourrée d’énergie contenue, puis qui se libère en un feu d’artifice de notes…L’ABB n’a pas sorti d’album studio depuis dix ans (Hittin’ the Note en 2003) et donc les set-list se composent uniquement de covers ou d’anciens morceaux, mais le répertoire est tellement riche. Ainsi ce soir-là, les chansons de filles (« Jessica », « Sweet Melissa ») n’ont pas été jouées, mais rassurez-vous elles le seront les soirs suivants.

C’est le grand intérêt de ces shows, aucune set-list identique, et même si pour le premier soir le groupe n’a pas d’invités, on retrouve, des ensembles vocaux ou des cuivres ou des amis pour emmener la musique vers de nouveaux horizons, vers les plus hauts sommets.

Leurs shows se feront de plus en plus rare au fil des ans, une raison supplémentaire de faire le plein d’envolées de guitares, de nappes d’orgues, de voix du Sud, de percussions superbes.