Avec Macula Transfer, pour la première fois, Edgar FROESE utilise son projet solo pour aller de l'avant. Aqua et Epsilon in Malaysian Pale peuvent être vus comme des compléments à Phaedra et Rubycon de TANGERINE DREAM. Cette fois, il propose une musique étrange qui annonce la B.O de Sorcerer et n'a pas grand-chose en commun avec Stratosfear. Là où ce dernier est fort mélodique, entre passages rock et tentation du classique, Macula Transfer est une œuvre planante et hermétique, fascinante et ingrate à la fois.

Avant d'aborder la musique, parlons du support. Cet album est le plus rare des Edgar FROESE. Il faut forcément trouver un vinyle d'époque, édité par Brain en Allemagne, si on veut posséder la version de 76. Il est sorti brièvement en CD mais seulement à 1000 exemplaires. Ensuite, Virgin n'a jamais daigné le ressortir. Il semble qu'ils aient les droits sur Macula Transfer mais celui-ci n'a même pas été intégré au récent coffret The Virgin Years reprenant les cinq autres albums studio. La seule chose que FROESE a trouvé à faire est de le remixer de façon aussi douteuse que les autres. Il manque forcément de la spontanéité et certains sons typiques des années 70. Faute de l'original, on peut éventuellement s'intéresser à cette version.

Ceci étant dit, le son de Macula Transfer n'est de toute façon pas extraordinaire, et c'est l'explication principale de la note qu'il me semble raisonnable de lui attribuer. En particulier, le mellotron y est décevant quand on connaît l'utilisation qu'en a fait FROESE sur Rubycon et Epsilon.... La guitare est ce qu'il y a de plus convaincant, les synthétiseurs étant de qualité variable, mais parfois peu adaptés à une musique aussi rythmique et dépouillée. On peut également qualifier celle-ci de planante, donc. Ce pourrait être un jeu de mots vu que le concept de l'album est lié aux avions, mais en fait c'est très logique. Edgar FROESE a imaginé ces cinq morceaux pendant différents vols et a d'ailleurs attribué les numéros de ceux-ci en guise de titres, ce qui ajoute une certaine impression d'abstraction.

Le premier est sans-doute le plus réussi. "os 452" est dominé par un fond de guitare monotone résonant à l'infini, à peine contrebalancé par les meilleures interventions de mellotron de l'album. Le résultat est fascinant bien que peu varié. Le deuxième, "af 765" est un peu rude. Ce titre de onze longues minutes est tout le contraire du premier : plus rapide, on y trouve un séquençage minimaliste comme base, sur lequel viennent se greffer les divagations des autres instruments et notamment une guitare fort brute. Il serait fort réussi si le son avait résisté à l'épreuve du temps. On peut faire cette dernière remarque au sujet de "pa 701" également, un titre dont le motif séquencé est magnifique mais qui est entaché par un mellotron inadapté. Les deux derniers morceaux, plus courts, sont meilleurs. "quantas 611" est le passage le plus étrange et contemplatif, le seul qui ne soit guère rythmé. Le mélange sonore y est logique. Quant à "if 810", il est une conclusion plus légère et mélodique fort agréable même si le synthétiseur aurait pu y être manié avec plus de musicalité. Il annonce clairement la direction de l'album suivant, Ages.

Macula Transfer est donc un album un peu dépassé par sa légende. Non qu'il soit vraiment célèbre, mais les amateurs d'électro vintage le placent souvent en haute estime au vu de sa rareté. Il faut dire que c'était une tentative intéressante voire courageuse, qui pêche juste sensiblement par sa réalisation. Une petite étape de la musique électronique qui vaut d'être découverte si l'occasion s'en présente.

Note : 3,5/5