I Against I, troisième opus des Brains sorti en 1986, fût une surprise remarquable : les rastas punks américains osaient sortir des sentiers battus et s'affranchir de leurs racines punk hardcore pour nous proposer une mixture nouvelle et avant-gardiste, appelée à avoir une influence durable sur tous les futurs groupes alternatifs américains estampillés "fusion".
Pourtant, la suite des évènements ne fût pas de tout repos. Le chanteur H.R. et son frère Earl Hudson, batteur du groupe, quittent ainsi momentanément les BAD BRAINS en 1988. Dr. Know et Daryl Jenifer finissent alors la tournée I Against I en compagnie du chanteur Taj Singleton et du batteur Mackie Jayson (CRO-MAGS)...
Malgré ces bouleversements, le nouveau line-up commence déjà à travailler sur un nouvel album. Mais alors que l'album est quasiment fini, les frères Hudson réintègrent le groupe. H.R. réécrira donc la totalité des paroles et réenregistrera l'intégralité de l'album dans l'urgence.
Earl Hudson, en revanche, aura moins de chance et devra se contenter de figurer sur la pochette de l'album. Les pistes de batterie que l'on entend sur ce quatrième album sont donc bien celles enregistrées par Mackie Jayson.

Ce quatrième album se présente comme la suite logique de son prédécesseur.
L'album commence d'ailleurs très fort, avec un "Soul Craft" amené à devenir un nouveau tube du groupe de Washington DC : un riff puissant, une basse très lourde et un chant aux frontières du hip hop. "Voyage To Infinity" est du même genre.
"The Messengers" voit les Brains revenir à leurs sonorités punk hardcore de leurs débuts : H.R. s'y fait ainsi éminemment violent et cogneur, avec une voix rauque et agressive. Des subtiles sonorités reggae réussissent cependant à s'incruster dans la chanson.
Le titre "Don't Blow Bubbles", titre punk hardcore assez réussi au demeurant, fera cependant débat du fait des propos ambigus contenus dans la chanson à l'égard des homosexuels. Bien des années plus tard, le bassiste Daryl Jenifer exprimera ses regrets concernant cette polémique, considérant que les membres du groupe n'avaient pas réellement saisi la portée de leurs propos...

Plus encore que sur I Against I, les guitares se font ici éminemment metal ("Sheba"), et globalement, l'album est très agressif, lorgnant fréquemment du côté du thrash metal alors à la mode. L'album peut donc être considéré comme un véritable album de crossover thrash, ce style hybride à mi-chemin entre le thrash metal et le punk hardcore qui fleurissait alors en cette fin de décennie.
Ce qui fait que par bien des aspects, Quickness se révèle un peu moins facile d'accès que son prédécesseur, du fait d'une production très crue et d'éléments fusion un peu moins mis en avant. Les influences new wave sont toujours présentes, en témoigne "Yout' Juice", aux sonorités inspirées des moments les plus expérimentaux des CLASH... Le son metal en plus.
Le reggae, grand absent d'I Against I, refait fugacement son apparition sur cet album ("The Prophet's Eye"). Mais pas non plus de façon très affirmée, et les quelques passages d'influence jamaïcaine que l'on peut entendre ici sont quand même assez peu convaincants. Mais pas inintéressants non plus.

Quickness confirme donc qu'en 1989, les BAD BRAINS comptent désormais parmi les leaders d'une nouvelle scène metal fusion américaine, innovante et rafraîchissante, amenée dans les années à venir à conquérir les ondes du monde entier.
L'un des meilleurs albums de l'âge d'or du groupe, comportant un bon nombre de classiques et de titres majeurs du répertoire des Brains.