Si la pureté dans le rock était incarnée par un homme, elle porterait certainement le nom de Steve Albini. Personnage évoluant dans la sphère post hardcore originaire de Chicago, l’homme est d’abord connu pour son aversion des grosses maisons de disques. Son groupe des années 80, BIG BLACK, reste une référence pour tous les apprentis “noiseux” de la planète. Il est aussi un véritable rond de cuir du boucan ayant produit tout ce qui se fait de plus noisy (des PIXIES aux STOOGES en passant par JESUS LIZARD, NEUROSIS ou NIRVANA) en matière de rock se voulant réellement indépendant. Il est aussi reconnu pour avoir créé, par la suite, des groupes tout aussi intransigeants comme RAPEMAN (qui s’attira la haine des féministes) et… SHELLAC. A l’instar des groupes précédents, SHELLAC développe un NOISE ROCK solidement charpenté depuis au moins plus de vingt ans de carrière.

Et en 2014, on ne change pas une formule qui marche, la preuve avec ce récent “Dude incredible”.

Qu’est ce qui fait un bon disque de SHELLAC ? Des lyrics désespérés, une intonation tendue au niveau de la voix, toujours en perpétuelle rupture mais qui (alors là nouveauté !!) peut se faire sentir plus mélodique (voir le premier titre éponyme de l’œuvre) que sur les précédents disques nettement plus abrasifs. Attention, l’introduction de “The people’s microphone” montre qu’Albini et ses “soudeurs” maitrisant l’acier trempé sont toujours maitres du riff tendu à tête chercheuse. Les neuf titres sont, d’ailleurs, souvent lourds et répétitifs (Presque à la HELMET, le coté strictement heavy metal en moins) entrainant un coté hypnotique accentué par le jeu de basse très post punk. On le ressent surtout sur “compliant” avec aussi des intermédiaires plus ou moins silencieux. Sur une “ballade” teintée de noire mélancolie comme “riding bikes”, on pourra même entendre un écho cafardeux au spleen de JOY DIVISION. On parlera presque d’une ambiance bluesy, pas au sens scolaire comme peut l’être un POPPA CHUBBY, mais plutôt dans le sillage d’un NICK CAVE (à travers ses différents groupes) d’un MARK LANEGAN ou du GUN CLUB. Quelque part entre un SWAMP ROCK sombre et un rock noisy déjanté…

Certains pourront rectifier, cependant, qu’Albini ne se renouvèle encore pas assez mais Shellac est au noise rock ce qu’est AC/DC pour le hard rock et les RAMONES pour le punk. De l’invariance, certes, mais avec toutefois quelques subtilités sur ce dernier disque qui se révèle finalement surprenant après plusieurs écoutes.