Rendez-vous au Country Club, puisque les FATALS PICARDS montent en grade, soignent leur standing ? Que nenni, voici une nouvelle pantalonnade de notre quartet rock préféré, qui joue la carte "folie des grandeurs" pour mieux se poser en parangon d'un rock à la française qui doit beaucoup à sa présence. Car l'humour qui caractérise chaque album du groupe et qui sert de liant entre chacun des morceaux bariolés du groupe ne doit pas faire oublier que, sous une bonne couche de parodie et quelques touches de blagues potaches, il y a là un des meilleurs groupes rock actuels, dont les compositions tout autant que l'exécution valent largement ceux qui, par usurpation ou le truchement des médias, se voient propulsés en tête de gondole.

Trois ans après le très réussi 7ème Ciel qui marquait le retour en des eaux plus calmes après une période plus troublée à la fin des années 2000, Fatals Picards Country Club s'inscrit dans la droite lignée de son prédécesseur, à savoir un gros rock aux riffs plaqués, à la limite parfois du punk, qui propose son lot de mélodies intéressantes, qui soutiennent parfaitement des textes aux petits oignons, tour à tour absurdes ou porteurs d'une conscience sociale, s'inscrivant parfaitement dans l'ambiance des titres écrits depuis les débuts du groupe. L'album, relativement long pour le style pratiqué (plus de 50 minutes), n'est pas avare en titres réussis, qui doivent autant aux ambiances qu'aux textes. "Pourquoi", rock rageur, voit le groupe fustiger toute cette génération d'artistes qui rendent hommage aux Goldman, Renaud ou Téléphone par le biais d'albums-tribute imbitables. Un texte irrésistible. "La fête de l'école", version déglinguée d'une kermesse écolière, témoigne de cette absence de concessions dans la musique des FATALS, plus rugueuse que jamais. "A la vie, à l'armor", ou "Le magnet du jura", plus conventionnels dans leur structure, sont également de bons moments, tout comme "Le défibrillateur" qui voit Paul Léger se poser une question existentielle sur fond de rock léger : ce mec qui est en train d'avoir une crise cardiaque mérite-t-il d'être sauvé ?

La ligne de basse façon "Billie Jean" de la reprise de "L'amour à la plage" ou encore les sonorités ska-rock de "Fils de P." sont quelques unes des surprises qui émaillent cet album. Avec son ambiance tahitienne, "Tais-toi et creuse" critique ouvertement les conditions de travail sur les chantiers de la Coupe du Monde 2022 au Qatar (cette fameuse compétition "climatisée") et se rapproche de "Chinese Democracy" sur l'album Le Sens de la Gravité, qui dénonçait l'immense hypocrisie des JO chinois de 2008. Une réussite.

Alors que l'album est bien fourni, seuls deux titres semblent superflus : "J'aime, j'aime j'aime", dont les sonorités zouk ne parviennent pas à cacher une grande vacuité, et "Le Club", interlude electro dénué d'intérêt. Ces deux titres exceptés, Fatals Picards Country Club est un album mûrement rempli de délectables gamineries ou de réflexions plus profondes sur la condition humaine, qui séduira à n'en pas douter les amoureux de l'univers rock du quartet. L'humour est là, bien sûr, mais il n'est qu'une des nombreuses facettes du talent des FATALS qui, sans véritablement se renouveler, proposent un album savamment construit et agencé, qui fait honneur à leur (déjà longue) carrière.