On ne perdait pas de temps dans les seventies ! Alors sous les ordres du producteur Humbert Ibach, la belle Isabelle Morizet, plus connue sous le nom de scène de Karen CHERYL, s'est remise en selle pour un second album en anglais. Le précédent ayant eu un impact considérable sur la jeunesse française, un titre de gloire dont l'artiste peut s'enorgueillir. Si on compare les chanteurs préfabriqués d'aujourd'hui et Karen, je n'ai pas le moindre doute qualitativement parlant : la jeune femme passe ses journées à s'entraîner, à répéter, avec ses danseurs ou avec ses profs de chant. Tout ceci pour un résultat franchement sympa, son éclatante beauté n'y étant certes pas pour rien, son regard pétillant, sa jolie voix et son dynamisme faisant le reste.

Alors oui, Karen est un produit préfabriqué. L'Isabelle d'aujourd'hui n'aime d'ailleurs guère épiloguer sur le sujet tant elle en a conscience. Aujourd'hui animatrice/Intervieweuse chevronnée de la radio, sans regretter cette époque, elle déplore de n'avoir pas eu 'mieux' à proposer. Pourtant, j'affirme personnellement que tant qu'elle chante en anglais, sa postérité reste fort digne. Il fallait sonner 'américain' de toutes manières, comme c'est le plus souvent marqué sur les pochettes de disques. Alors, ce second opus dans la langue de Shakespeare la voit continuer sur le même rythme, avec à mon goût les mêmes qualités.

Le succès ne s'arrête pas, le disco est toujours bien sûr à l'honneur, et "Tchoo Tchoo" poursuit la quête des sorties du week-end avec bonne humeur et talent. Les compositeurs se sont encore surpassés ; ce titre reste pour moi un instant très fort de mes premiers émois musicaux. N'était-ce pas ma chanson préférée à l'époque ? C'est bien possible, je ne passais pas mon temps à dix ans à faire des tops. Exactement la même efficacité que "Sing To Me Mama", ce qui n'est pas peu dire. Un bref instant de recueillement pour les créateurs René Rinieri, Alain Ward et donc Humbert Ibach qui, s'il voyait avant tout les billets verts, n'en était pas moins un sacré visionnaire doublé d'un vrai compositeur. Quand on réalise que MADONNA faisait d'ailleurs partie des danseuses régulières de Karen en 79, on se dit que c'est dingue, non ?

Il y a aussi "Show Me You're Man Enough" qui reste relativement sympa, avant de malencontreusement se transformer en "La marche des machos" sous la main de fer des Carpentiers pour le besoin des shows télévisés du samedi soir et qui, au final, détournera Karen de l'anglais. Enfin, un troisième single existe, "Making Up Making Love" totalement oublié - et absent sur le disque - malgré un joli refrain dynamique. La recette moins disco se veut plus variété rock, une inflexion sans doute peu judicieuse. Ce sera le dernier single en anglais de Karen.

Le disco garde ses droits sur "Liars Beware", pas si mal foutue, avec ses riffs de synthé tellement typés ! Et ce petit accent de Karen sur les paroles, c'est charmant, mais je suis peut-être partial, allez. "Tonight In Hollywood" est aussi de belle allure, avec son ambiance exotique, un des titres à retenir de cette livraison. Karen y est à son top et la compo superbe. J'adore, ça c'est du disco ! On n'est pas si loin que ça de certains titres classiques d'ABBA de la même année. Les gros cuivres de "Lady Luck" poursuivent la quête festive, avec de jolies harmonies et de la bonne humeur.

L'agréable "Keepin It Up" se veut plus funky, mais j'y entends – à nouveau – peu notre Karen, bien aidée par des co-lead vocals de belle qualité. C'est aussi le cas de "Stone Man" qui chasse sur des terres un brin plus roots, qui se rapproche de ce que fait un Adrian GURVITZ en cette fin de décennie. Vous voyez que les références n'ont rien de ridicule. On reste stable sur "Stand Up performance" qui penche plus vers des influences funky iliennes. Enfin, son chant est moins réussi sur "Ready For Love", mais la compo se laisse bien apprivoiser jusqu'au refrain raté à mon sens.

En deux mots comme en cent, l'analyse est fort aisée. Karen CHERYL va essentiellement souffrir de la décision, après cet album, de quitter l'anglais et le disco pour des sonorités plus franco françaises de variété vaguement yéyé. On doit cependant s'incliner devant le nombre effarant de disques vendus par l'artiste – elle en clame 20 millions, à vérifier -. Car cet album, autant que son prédécesseur, d'une fort belle qualité, propose quelques classiques intemporels. Je ne trouve rien à redire aux compositions, La suite sera hélas bien plus critiquable. Je reste donc sur un fort joli 3,5 pour cette livraison, sa meilleure. Merci Isabelle, d'avoir été si fraîche et si jolie pour des millions de jeunes ! Si tu me lis bisous !