Depuis leur premier EP en 2016 déjà, le duo SOFI TUKKER a trouvé son créneau : une électro-pop tribale, doucement house et des chansons hautement vitaminées en influences brésiliennes. Mais Bread (Be Really Energetic And Dance), sorti en 2024, derrière sa pochette où Sophie pose fièrement aux côtés de Tucker dans une robe faite de pain, ouvre une page encore plus dense pour le groupe. Ce troisième album studio marque une nouvelle étape dans leur évolution artistique, où leur recette s'enrichit tout en conservant sa joie communicative.

Une chose que j’apprécie toujours chez SOFI TUKKER, c’est cette capacité à mélanger les cultures comme une danse, et ce patchwork linguistique qui ne se contente pas d’ajouter une teinte exotique mais qui est un élément fondamental de leur identité sonore. Dans la chanson éponyme "Bread" par exemple, on entend Sophie chanter en anglais sur des samples de portugais glitchés et des guitares latines tissées dans cette prod’ électro qui reste parfaitement dansante.

Sur "Cafuné", elle chante sur un fond de bossa électronique en duo avec le rappeur californien Channel TRES. Ici comme dans "Jacaré", le beat est à la fois simple et riche, construit autour de percussions qui donnent une assise rythmique solidement frénétique tandis que les claviers jouent avec un accent baile funk. Les cuivres latins s’échappent de l’ensemble avec un éclat qui rappelle les fanfares brésiliennes tout en s’intégrant facilement à l’univers du duo.

"Woof" est un titre enflammé où la guitare se fait plus rythmique et crée une ambiance un peu folle, mais je dois avouer que les effets ultra-prononcés appliqués sur la voix de Tucker me fatiguent par ce côté trop artificiel qui parasite un peu l’écoute. En revanche, Sophie réussit à ancrer le morceau avec des vocalises tandis que l’apparition de la chanteuse nigériane KAH-LO relève vraiment l’ensemble, une dynamique féminine qui équilibre bien l’exubérance instrumentale du titre.

La seule chanson où SOFI TUKKER ralentit un peu le tempo c’est "Hey Homie" où les guitares sont plus douces, imprégnées d’une ambiance lo-fi, assez loin de l’énergie débridées des autres titres. Justement, le reste de l’album, fidèle à son nom, prétend constamment nous faire danser en enchaînant les beats puissants mais j’ai moins accroché avec un certain nombre de morceaux comme "Throw Some Ass", un banger qui met le feu au dancefloor de manière un peu trop lourde, ou encore "Guardian Angel (Stand By You)" et "Spiral" avec leurs sonorités eurodance mainstream. "Goddess In Disguise" signe le retour de ces cuivres aussi solaires qu'enjoués et on termine sur "Perfect Someone", un titre où le duo hésite entre danse et rêverie, un final un peu plus sobre mais pas super mémorable.

Au final, Bread regorge d'idées sympas et surtout d’une richesse culturelle qui fait la force singulière de SOFI TUKKER. Malgré tout, l’album n’arrive pas à me convaincre pleinement : le côté house-dance parfois trop insistant alourdit à outrance certains titres et écrase la chaleur des influences latines. Pour toutes ces raisons, je ne peux pas leur attribuer plus qu’un 3,5, une note respectable qui reflète le pouvoir dansant du disque, mais aussi une marge de progression pour le duo new-yorkais.