Sincere, c’est le titre du troisième album de KHALID, le prodige du R&B, qui marque un retour très attendu cet été 2024. On l’a entendu sur le bande originale de Barbie: Le Film mais il aura tout de même fallu attendre cinq ans pour qu’il nous donne vraiment de quoi se mettre sous la dent. Cet opus s’inscrit dans la continuité de son parcours, où l’honnêteté et l’introspection sont au coeur de son écriture.

Le single "Adore U" ouvre le disque : une ballade aérienne et mélodieuse où la voix enveloppante du chanteur est mise en valeur par des arrangements plutôt sophistiqués. On le comprend très vite, il y a une prédominance de ballades au tempo lent et aux sonorités éthérées sur Sincere et même si KHALID a toujours excellé dans les morceaux introspectifs et émotionnels, cet opus semble pousser l’approche à l’extrême au point d’en devenir monotone.

On baigne dans des arrangements minimalistes voire chiants, des mélodies douces et un peu brumeuses qui manquent de dynamisme et d’énergie, par exemple sur "Tainted", "Owe To You", "Decline", "It’s All Good" ou encore le single "Please Don’t Fall In Love With Me". On est d’accord, ça en fait un bon petit paquet… Les titres se fondent les uns avec les autres sans offrir de contrastes marquants et donnent à l’album une sensation continue de déjà-vu.

Les fans du chanteur de 26 ans pourraient s’attendre à une évolution marquée mais cet album reste fermement ancré dans une zone de confort où KHALID joue la carte de la sécurité et évite toute prise de risque. L’ambiance sonore est vraiment trop uniforme, avec toujours ce côté aérien qui me plaît pourtant en général et des tempos mous à s’endormir en moins de deux, comme dans "Who’s There To Pick Me Up", "Long Way Home" et le titre éponyme "Sincere". Si cela peut fonctionner sur quelques morceaux, la répétition de ce schéma au relief absent tout au long du projet crée une forme de platitude qui finit forcément par lasser.

"Broken" est une jolie ballade R&B très mélancolique avec des éléments électroniques subtiles qui accompagnent bien la voix chaleureuse et poignante de KHALID alors que la lamentation de "Dose" nous replonge dans une déprime pas tellement en phase avec ce qu’on pourrait attendre des sorties en cette période estivale. Par contre, on peut relever la collaboration avec la chanteuse anglaise Arlo PARKS sur "Breathe" - toujours aussi vaporeux - bénéficie d’un KHALID qui s’adonne à un rap léger qui tranche assez bien avec le côté soulful de la voix de PARKS.

Le très bon single "Ground" parvient à capter l’attention grâce à une livraison vocale désinvolte et détachée qui convient très bien à l’ambiance psychédélique de l’instru et du sujet (Only took a gram and a half, saw your body tessellate/We go out and skate under moonlight, disappear in the masquerade). Ca y’est, on est presque sauvé, on trouve tout de même quelques morceaux plus rythmés qui laissent entrevoir le potentiel de KHALID à aller dans le versant pop du R&B, parfois avec la douceur d’une guitare sur "Heatstroke" ou "Altitude" et parfois grâce à une intensité vocale sur le titre "Everything We See".

Mais même ceux-ci restent plutôt en retrait, sans vraiment atteindre l’audace attendue. Musicalement et techniquement, Sincere est un album solide pour tous ceux qui veulent viber pendant près d’une heure, mais il donne l’impression que KHALID se repose sur ses acquis au lieu de chercher à se renouveler.

Alors oui, KHALID reste fidèle à son univers sonore : une fusion vraiment raffinée de R&B et de pop, tout en incorporant des éléments de soul. KHALID reste le maître des ambiances douces et mélancoliques et Sincere est probablement l’album de la maturité mais c’est aussi une overdose de chialantes alors qu’il aurait gagné à s’aventurer hors des sentiers battus en explorant peut-être d’autres influences musicales ou au moins en démarquant les pistes les unes des autres avec plus de dynamisme et d’originalité. Pour moi, Sincere donne l’impression de faire du sur-place et s’il réussit à obtenir un 3 à mes yeux, ça reste un 3 sincère mais prévisible.