Derrière CORNELIUS on trouve le chanteur, guitariste et touche-à-tout japonais Keigo Oyamada (né en 1969). Ce cinquième album Point est l’une des pierres angulaires de sa discographie avec le précédent Fantasma de 1997. Il faut dire que Point est un album très réussi de bout en bout. Foncièrement pop, le Japonais nous offre un album lumineux, décontracté, très varié, presque expérimental du fait de son éclectisme ; derrière – presque - chaque titre on y retrouve un goût certain pour l’ambient et l’électronique, un ambient qui incorpore aussi des sons provenant de la nature, une particularité que l’on retrouve souvent dans la musique ambient japonaise. Ainsi, "Drop" incorpore des bruitages qui semblent liquides, un titre qu’on pourra qualifier de ‘frais’, un adjectif qu’il faut pourtant utiliser avec parcimonie en musique ; et "Bird Watching at Inner Forest", "Brazil" ou "Tone Twilight Zone" nous font voyager en forêt avec leurs bruits de pépiements d’oiseaux et autres insectes. Autre particularité, qui tient plus à Oyamada qu’à l’album d’ailleurs, le chanteur japonais apprécie les arrangements vocaux en canon ("Point of View Point", "Drop", "Bird Watching at Inner Forest"). La réinterprétation du titre de samba "Aquarela Do Brasil" (par Ary Barroso – 1939), ici dénommée "Brazil", apporte également une touche de chaleur et d’exotisme ; comme le dernier titre "Nowhere" avec sa musique easy-listening idéale pour siroter une piña colada au bord de la plage. L’utilisation de la guitare sèche ("Drop", "Bird Watching at Inner Forest", "Brazil", "Point of View Point", "Nowhere") renforce l’idée d’une volonté de musique cool et chaleureuse. Il y a bien quelques titres qui détonnent pourtant dans cet ensemble apaisé : tout d’abord l’introductif, mais anecdotique, "Bug" d’ouverture, ou "I Hate Hate" qui n’est pas loin de ressembler à un passage furieux de MINISTRY, période metal indus, avec sa guitare électrique déchaînée. Ou "Another View Point", un morceau particulièrement dansant, efficace et groovy grâce à une belle complémentarité de la basse et de la guitare. "Smoke", de son côté, est une chanson pop que la rythmique de guitare colore de funk. Essentiellement chanté en japonais, avec quelques titres en langue anglaise ("Point of View Point", "Brazil"), l’intérêt des paroles ne donne pourtant pas lieu de s’attarder sur celles-ci ; de toute façon la langue japonaise étant inaccessible à la quasi-totalité des auditeurs occidentaux la barrière de la langue est ici un bon prétexte pour ne pas y perdre du temps. Point donne au final la sensation d’être un chaleureux terrain de jeux musical et sonore ; d’autant plus intéressant que presque toutes les compositions sont attachantes. Qu’elles soient joliment rythmées, qu’elles nous amènent vers des ambiances plus doucereuses, ou parfois un peu agressives, le tout est un joli pot-pourri musical vers lequel on aime revenir.

Note : 4.5/5.