Avant d’inonder toutes les ondes avec sa chanson "Flowers", Miley CYRUS se déchaînait sur une boule de démolition, la langue tirée et le regard frondeur vissé sous sa coupe blonde peroxydée. À l’époque, elle portait son attitude rebelle affichée sur ses shorts à paillettes, pensant - à tort ou à raison - que provoquer valait pour libération. C’était l’ère post-Disney, celle où choquer les foules semblait être la seule façon de briser les chaînes du passé. Depuis, une décennie et une longue carrière plus tard, l’opinion publique ne lui a peut-être pas pardonné tous ses excès mais elle s’en fout car de son côté elle a fait la paix avec (presque) tout le monde, mais surtout avec elle-même.

Aujourd’hui on l’écoute ouvrir Something Beautiful, son nouvel album, sur une "Prelude" qui n’est pas juste une intro atmosphérique qui se déploie comme une vague, mais un véritable morceau de storytelling musical. CYRUS ne chante pas mais récite religieusement son texte d’une voix grave sur une instru à l’expansion ultra architecturée, mêlant électronique et section de cordes comme pour annoncer quelque chose de grand. La chanson-titre "Something Beautiful" est une belle surprise : un rythme R&B lent qui débute au piano et où les instruments se teintent doucement d’accents jazzy pendant que Miley glisse sans forcer sur cette ballade soul fragile. Puis ça explose à coups de basse et de guitare électrique, c’est un chaos expérimental, passionné et étonnamment élégant. Sa voix rugueuse épouse chaque nuance de l’instrumentation et on repense à la phase rock de Plastic Hearts, avec une touche encore plus fêlée.

Les harmonies de CYRUS sont absentes de deux interludes du disque, entièrement constituées de textures sonores flottantes. On y décèle clairement la volonté de la chanteuse de poser un pied sur un territoire plus conceptuel, dans une pop-électro quasi progressive, tout comme sur "Golden Burning Sun", un titre à la mélodie et aux percussions 100% pop qui font le pari de se marier aux nappes de synthés. Bon, au final, peu importe les influences qu’elle choisit de convoquer, CYRUS reste fidèle à elle-même et ne trahit jamais son identité, même si certaines vocalises présentes sur ce morceau solaire tendent malgré tout à épuiser à la longue.

Malheureusement, un certain nombre de titres tombent dans ce schéma un poil trop mélodique : le single "End Of The World" dont l’instru à l’ambiance disco semble recyclée droit de Endless Summer Vacation, la dance de "Walk Of Fame" et de "Every Girl You’ve Ever Loved", "Reborn" avec ses sonorités d’hymne où Miley mélange voix feutrée et élan puissant, mais aussi les ballades synthés-saxo-violons ultra produites "Give Me Love" et "More To Lose". J’ai été plus réceptive à l’orchestration de "Pretend You’re God" qui prend un virage plus sombre avec sa batterie froide et sa guitare électrique posées sur une instru brillamment exécutée. La voix de Miley prend enfin la place qu’on attend, émotive, grave et raffinée. C’est exactement ce genre de moment qu’on aimerait entendre plus souvent, tout comme le groove lustré du titre pop-rock 80’s "Easy Lover", initialement prévu pour Plastic Hearts.

Plus aucun doute possible, Miley CYRUS a bien grandi et elle n’a pas fait le choix de la facilité avec Something Beautiful, un album de pop plus adulte qui tient bon et me semble très sincère bien que je n’accroche pas sur toutes les chansons avec la même intensité. En tout cas il n’est pas plombant et l’instrumentation de l’ensemble ressemble à un travail d’orfèvre plutôt bien équilibré. On sent une exigence nouvelle de la part de Miley, celle d’une pop plus adulte qui explore l’intime sans tomber dans le fade et pour une chanteuse qu’on a longtemps réduite à ses excès, c’est déjà pas mal. Pour tout ça, et malgré quelques réserves, je lui accorde sans mal un petit 4 sur 5.