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- Style + Membre : The Hanseroth Twins

Brandi CARLILE - By The Way, I Forgive You (2018)
Par GEGERS le 24 Juin 2025          Consultée 57 fois

By The Way, I Forgive You marque un tournant dans la carrière de Brandi CARLILE. Ce sixième album est en effet le premier sur lequel la chanteuse et ses deux fidèles camarades, Phil et Tim Hanseroth, sont crédités de manière indifférenciée sur les morceaux qui le constituent. Fruit d'un an de travail, l'album voit l'Américaine repenser ses méthodes de travail, pour se préserver et concilier sa carrière et sa vie de famille. Une forte consommation d'alcool et de médicaments mêlés ayant endommagé ses cordes vocales, l'artiste cesse de boire avant les concerts, et choisit d'écrire moins s'accordant le temps de préparer, avec sa compagne Catherine, l'arrivée de leur deuxième enfant. "S'il me faut désormais deux ans pour écrire une bonne chanson, alors qu'il en soit ainsi", déclare-t-elle alors dans ses mémoires. "Je suis en paix avec cela. Le plus important pour moi est que cette chanson ait quelque chose d'important à dire. Si l'inspiration a besoin de me trouver, alors elle sait où je suis. By The Way, I Forgive You a nécessité un an complet d'écriture, et j'en suis très heureuse".

Le travail préparatoire achevé en octobre 2016, Brandi et son groupe se rendent à Nashville, pour mettre en boîte l'album, faisant pour cela appel à un duo de producteurs, Shooter Jennings et Dave Cobb. Tous deux spécialisés en musique folk et country, ils vont donner une couleur résolument roots et ouatée à ce travail qui sera couronné par une victoire dans trois catégories aux Grammy Awards (pour six nominations) l'année suivante. Un album "blockbuster" donc, qui hissera jusqu'à la cinquième place dans les charts au pays de l'Oncle Sam. Une belle performance qui assoit définitivement Brandi CARLILE comme une artiste qui compte, et qui lui ouvrira de nombreuses portes.

C'est la première chanson, "Every Time I Hear That Song", composée par Phil Hanseroth, qui donne à l'album sa thématique. Comme son titre l'indique, By The Way, I Forgive You possède en effet un fil rouge, celui du pardon. Au fil des morceaux, Brandi et ses acolytes triturent, tournent et retournent cette thématique. Il s'agit ici de pardonner à nos parents qui vont nous quitter, de pardonner nos anciennes amours fanées, de pardonner à nos enfants qui, un jour, voleront de leurs propres ailes, délaissant le cocon familial. Porté par ce sujet devenu antienne, l'album est ponctué de coups d'éclat, ou plutôt de coups de génie, qui lui confèrent une délicate puissance. Parmi les grands morceaux, citons en premier lieu "The Joke", sans doute le titre le plus emblématique de cet album. Un piano tendre et désabusé, accompagné par un violoncelle, ouvre ce titre qui permet à Brandi de retourner, progressivement, dans ce sentiment de colère qui l'habitait sur l'interprétation de "The Story". La chanteuse y livre en effet une prestation écorchée, viscéralement habitée, rehaussée par la force des instruments à cordes frottées qui, mêlés aux guitares, renforcent l'intensité du morceau. Ce morceau est né en studio alors que Brandi, piquée par une remarque du producteur Dave Cobb ("Brandi, en tant qu'interprète, tu n'as jamais fait mieux que sur "The Story"), a décidé de composer un titre mettant en valeur sa voix à la fois puissante et singulière, en permanence sur le fil. En résulte un des plus beaux titres de sa carrière.

"The Mother" n'est pas loin derrière. Cette ballade folk voit en effet la chanteuse évoquer la naissance de sa première fille et les profonds changements de vie qui l'ont accompagnés, de même que les renoncements, les incertitudes, et le besoin de se projeter dans ce petit être qui devient un univers. Un morceau d'une beauté pure, renforcé par le contexte familial de Brandi, qui doit donner à sa fille la force de se battre dans un pays où la parentalité homosexuelle est souvent vue d'un mauvais œil ("Le monde qui se dresse contre toi donne du sens à notre combat", chante Brandi avec délicatesse). Plus enjoué, avec ses chœurs pouvant rappeler les BEATLES ("Hold Out Your Hand") est une pépite folk qui cristallise l'œuvre d'un groupe soudé et porté par une inspiration commune.

Titre americana pur jus, "Sugartooth" apporte une saveur différente. Evoquant le suicide d'un ami de Brandi, accro aux drogues dures, le morceau déploie des ambiances apaisées et intimistes, le mélange entre piano et guitare agissant comme un cataplasme sur le texte plus torturé. Et puis il y a la ballade finale, "Party of One", dont la grandeur presque opératique est une douceur au palais. Inspiré par la chanson "The Last Time I Saw Richard" de Joni Mitchell, le morceau est porté par les arrangements de Paul Buckmaster en compagnie de l'Orchestre Symphonique de Nashville. Le collaborateur d'Elton JOHN réalise ici ses derniers travaux avant son décès sur ce titre qui, débutant en piano-voix, s'enrichit peu à peu d'éléments symphoniques qui en décuplent la beauté. Brandi propose ici une interprétation vocale d'une beauté désarmante.

L'album se fait néanmoins légèrement moins équilibré que son prédécesseur, puisque malgré une profondeur émotionnelle rarement atteinte jusque-là, By The Way, I Forgive You peine à maintenir cette tension sur toute la ligne. Quelques titres ("Fulton County Jane Doe", ou "Harder to Forgive") s’avèrent un peu plus convenus, voire anecdotiques dans leur traitement. Non pas qu’ils soient dénués de qualité (le songwriting de Brandi CARLILE et des jumeaux Hanseroth conserve une haute tenue), mais ils semblent faire office de respirations un peu fades au regard de la puissance évocatrice de morceaux tels que "The Joke" ou "Party of One".

Reste que cette œuvre incarne un sommet dans le parcours de l’Américaine, un album fait de country et de cordes caressantes, conçu dans un moment charnière, alors que Brandi devait choisir entre l’ambition et son équilibre de vie. Elle choisira les deux. L'artiste choisit ici de creuser plus profond, de chanter plus juste, plus fort, plus vrai. Et si "The Joke" l’a consacrée aux yeux du grand public (elle interprétera le titre aux Grammy Awards 2019 devant une salle debout, larmes aux yeux), c’est tout l’album qui impose la voix d’une artiste enfin pleinement elle-même, qui entame ici ce qu'elle considère être le plus beau chapitre de sa carrière.

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- Brandi Carlile (chant, guitare acoustique, piano)
- Phil Hanseroth (basse, chœurs, guitare)
- Tim Hanseroth (guitare, chœurs)
- Shooter Jennings (piano, orgue)
- Dave Cobb (guitare acoustique, percussions)
- Chris Powell (batterie, percussions)
- Paul Buckmaster (arrangements orchestraux)
- Kristin Wilkinson (alto)
- David Angell (violon)
- David Davidson (violon)
- Carole Rabinowitz (violoncelle)
- Nashville Symphony (sur party of one)


1. Every Time I Hear That Song
2. The Joke
3. Hold Out Your Hand
4. The Mother
5. Whatever You Do
6. Fulton County Jane Doe
7. Sugartooth
8. Most Of All
9. Harder To Forgive
10. Party Of One



             



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