Quelquefois, on a beau aimer un artiste, essayer de le comprendre au mieux, ce n'est pas simple d'y parvenir. Difficile de saisir où il/elle a voulu en venir, ou alors d'accorder le crédit nécessaire à l'accomplissement de la démarche. Ainsi en va-t-il de Girl Talk, troisième album de Kate NASH, qu'elle a si vite écrit après le semi-échec de My Best Friend is You (2010).

À l'époque, elle se sent très concernée par l'affaire des PUSSY RIOT en Russie, et déjà pensé comme punk à la base, au grand dam du label Fiction qui s'y était opposé – elle le quitte alors avec conviction -, elle décide d'aller plus loin encore en offrant un disque plus 'riot grrrl' que le précédent.

Complété grâce aux avantages du crowdfunding/financement participatif, distribué par Have 10p Records et Fontana (la sous-filiale de Philips), Girl Talk est donc l'album brut de décoffrage de Kate NASH, sérieusement engagé mais manquant de subtilité. Tout le féminin/nisme énervé est concentré dans ces quelques cinquantes minutes, pas de la meilleure manière, on peut le dire.

"Part Heart" débute tel un slow indé au rythme ternaire, avec un son low-fi et la voix planante de la belle Kate sur plusieurs pistes à l'unisson. On se laisse porter de façon hypnotisante, avant que tout ne se muscle, les guitares débordant de saturation afin d'annoncer la couleur de ce qui suit. Lancé sur un riff punk traditionnel, "Fri-end?" fait preuve d'une grande efficacité, basse et guitare à l'appui.

Ensuite, l'album se fige dans cette catégorie, donnant l'impression d'une jeune artiste adolescente se formant dans son garage plutôt que d'une autrice-compositrice marquée par l'expérience. L'énergie est là, indubitablement, tout comme le caractère, d'autant plus avec le trio féminin qu'elle a monté (Fern Ford, Emma Hughes et Carmen Vandenberg), mais certains titres paraissent bien brouillons. "Sister", "All Talk" avec leurs invectives, "3AM", "Cherry Pickin" ou même la plus ensoleillée "Conventional Girl" suivent la même voie sans donner de plaisir mémorable.

Il y a bien "Death Proof" aux couleurs post-punk et à la guitare surf horrifique pour varier un peu le ton, "Rap for Rejection" au riff sautillant et au rythme exotique sympa, "Are You There Sweetheart?" qui renoue avec les ambiances dreamy/indé, mais là encore, pas de quoi se relever la nuit. Quant aux chansons calmes qui arrivent trop tardivement, "Lullaby for an Insomniac" a-cappella jusqu'à l'entrée des cordes, et "You're So Cool, I'm So Freaky" pour le côté folk convivial, elles ne figurent pas non plus dans le top de ce qu'il faut retenir concernant miss NASH.

Les seuls moments où celle-ci se surpasse sont le tandem "OMYGOD", pop-soul binaire avec basse en avant et refrain au rythme latino qui n'a rien à voir, ainsi que "Oh", à belle ambiance folk électrique roulant, tribal, épique. Cette dernière contient les choeurs de Siobhan Malhotra (avec son frère Jay à la guitare), une amie d'enfance de Kate qui décède peu de temps après d'une fibrose kystique, à 24 ans seulement. L'album qui lui est dédié atteint la 82ème place des charts britanniques lors de sa semaine de sortie. Le souci étant que, dès lors, l'artiste talentueuse va se raréfier.