Les démêlés de CERRONE avec sa propre maison de disques ne l’auront pas empêché de publier trois albums sous son nom en la seule année 1980. Passons sur le très oubliable troisième volet de Brigade Mondaine. Panic est le véritable successeur de Angelina (1979) et le moins que l’on puisse dire est qu’il porte bien son titre. CERRONE y abandonne le Disco au profit d’une musique plus atypique et tourmentée.

Si Panic a été publié en catimini et n’a guère percé dans les charts, il reste garni de compositions accrocheuses. Sur ce plan-là, c’est même l’un de ses albums les plus riches, au même niveau que The Golden Touch (1978), nonobstant la différence de style. "Portrait Of The Modern Man" et "Panic" se succèdent en introduction, l’un solennel, un instrumental joliment porté par une section de bugles qui semblent très proches du style du trompettiste Pierre DUTOUR, l’autre plus urgent, un single en puissance, avec cependant une pointe de crispation qui le différencie des tubes de CERRONE. "The Flash" et "Time Is Running Down" sont des rocks arides avec quelques accents ska et forment une continuité avec Angelina. Libéré de la référence Disco, CERRONE s’autorise davantage de fantaisies mélodiques et rythmiques. Bien que certains titres soient plus calmes, il n’y a aucune véritable ballade. Par ailleurs, on peut être étonné d’une aussi importante proportion d’instrumentaux. Seuls "The Flash", "Time Is Running Down", "Happiness Pill" et le morceau-titre sont chantés, et encore, le chant y est nettement plus en retrait que sur la plupart des autres morceaux de CERRONE.

Les cordes se sont volatilisées, les cuivres et le saxophone se font de plus en plus rares, l’instrumentation est limitée à l’essentiel: des claviers, des guitares, une section rythmique, laissant le champ libre à Georges RODI aux synthétiseurs et à l’orgue. Le son est beaucoup plus abrasif qu’auparavant, et sans doute plus que sur tout autre album de CERRONE. Celui-ci aborde par ailleurs des registres que l’on ne retrouvera nulle part ailleurs dans sa pourtant imposante discographie. "Memory" est une petite composition presque entièrement électronique dont l’élaboration rappelle The STRANGLERS – on peut penser aux ballades feutrées de Feline (1983). "Rendez-Vous" est pleinement mené par un bugle haut perché. "1982" achève de faire de Panic un album à part. Il s’agit d’un solo de batterie augmenté d’effets électroniques, cependant bien plus radical et sinistre que "Sweet Drums" (1977). Sa position en fin de disque, juste avant un bref rappel du premier morceau, lui donne encore davantage de poids. Ce n’est pas du WHITE NOISE mais c’est tout de même une jolie boutade de la part d’un compositeur qui semble plus décidé que jamais à se défaire de son image d’excentrique bling-bling.

Panic est un disque en total décalage avec tous les autres de CERRONE, qui a pourtant commis quelques drôles d’oiseaux tels que The Collector, Human Nature ou Cerrone Symphony: Variations Of Supernature. Assurément le CERRONE le plus sous-estimé.