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KID CUDI - Passion, Pain & Demon Slayin' (2016)
Par ARCHANGEL le 8 Juin 2025          Consultée 185 fois

Quand on cumule à la fois la passion, la douleur et ses propres démons, on ne vit plus vraiment et survivre devient la seule issue. C’est l’état de Kid CUDI au moment où il façonne son sixième album. Loin des élans cosmiques de ses débuts ou du punk-rock suicidaire de Speedin’ Bullet 2 Heaven, le chanteur ne revient pas du gouffre, il s’y trouve toujours. Le gouffre de la santé mentale, des addictions, de la détresse. Sorti en 2016, Passion, Pain & Demon Slayin’ est né dans la torpeur d’un combat intérieur, avec un retour aux nappes spatiales et à l’introspection néo-psyché qui ressemble à ce qu’on connait de CUDI mais qui est parfois trop complexe et trop lourd à digérer.

Un projet-fleuve - encore - en quatre actes (Tuned, Prophecy, Niveaux de l’Amour et It’s Bright & Heaven Is Warm) dont les 19 chansons sont produites principalement par ses collaborateurs habituels Plain Pat et Dot da Genius, piliers de son esthétique depuis les débuts, mais aussi par Mike Dean dont la présence ajoute cette patine synthétique épaisse typique des années 2010. Le single "Frequency" offre une ouverture sensuelle et narcotique à l’album où CUDI ne rappe plus vraiment - il murmure et traîne sa voix comme un fumeur de minuit. Les basses vibrent lentement et les synthés serpentent pendant que Kid CUDI évoque ses vices sur ce hip-hop planant (Couple girls, couple stories and a couple shrooms/Couple clubs and I’m in the zone).

L’atmosphère se densifie et se fait de plus en plus pesante sur les synthés hypnotiques de "Swim In The Light", un titre qui démontre aussi une certaine forme de lucidité de la part du chanteur (You could try and numb the pain but it’ll never go away), une ligne qui résume l’un des noeuds de son oeuvre : l’impossibilité d’échapper à soi-même, même par l’excès et la défonce. "Releaser" offre une belle montée en intensité grâce à son ambiance saisissante, cette boucle de piano et la voix distordue de CUDI, faisant penser davantage à une interlude texturée qu’à une chanson standard, tout comme "Mature Nature" qui me séduit cependant beaucoup moins, trop suffocant.

Bien plus énergique, "By Design" présente une jolie synergie entre CUDI et André Benjamin (a.k.a. ANDRE 3000) qui chantent avec une légèreté euphorique l’importance de garder la foi sur un beat aux influences ragga produit par Pharrell WILLIAMS, tandis que pas mal d’autres morceaux ont du mal à se distinguer même après plusieurs écoutes, comme "Cosmic Warrior", "The Guide", "Does It", "Dance 4 Eternity" ou même le banger nébuleux "All In", la faute à des structures assommantes et à des refrains flous. CUDI nous livre encore trois featurings touchants mais qu’on ne retiendra pas plus que ça : le rap alternatif de "Rose Golden" interprété avec Willow SMITH, le beat expérimental et désarticulé de "Flight At First Sight/Advanced" produit et chanté avec Pharrell ainsi que "Baptized In Fire" dont l’instru de trap brumeuse se prête bien au duo CUDI-Travis SCOTT sans pour autant marquer les esprits.

Parlons un peu de ce qui sort du lot, en particulier le titre "ILLusions" avec ses arrangements plus minimalistes qui en font une plage contemplative pour un Kid CUDI qui livre ici l’un des meilleurs refrains de l’album, en plein bad trip (These illusions in my head/I never wanna leave/Hallucinating, flying through the air/To the demons in my head). Malheureusement, on repart toujours sur des pistes desquelles on décroche facilement telle que "Distant Fantasies", une rêverie vaporeuse faite de claps et de nappes ambient où CUDI chante d’une voix presque fantomatique ou encore "The Commander" dont les synthés me fichent la migraine malgré le ton conquérant du chanteur.

La confession "Wounds" met un peu de temps à s’installer mais c’est un des tout grands moments du disque. Les synthés sont lourds, les percussions puissantes, le sujet est grave et CUDI le retranscrit très bien (Imma sew these wounds, Imma sew these wounds myself) et l’émotion est hautement palpable, comme souvent chez CUDI. Notons "Kitchen", un titre-signature où Kid CUDI a apposé sa patte si reconnaissable et qui rappelle les grandes ballades mélodieuses de Man On The Moon II avec sa section de cordes dramatique. Pharrell WILLIAMS pose un beat beaucoup plus pop et très enjoué sur "Surfin'" pour clôturer cet album pesant de luttes intérieures. CUDI nous laisse souvent sur des notes plus optimistes comme dans ce titre sur lequel les cuivres et la guitare sont loin, très loin du désespoir pour nous laisser sur un Kid CUDI dansant et libéré qui célèbre ce qui reste à fêter : son indépendance artistique (Now, I ain’t riding no waves/Too busy making my own waves, baby).

Passion, douleur, démons… avec un tel triptyque on ne vit pas, on tient. Le disque aussi et s’il s’étale sur près d’une heure trente, ce n’est pas la structure ambitieuse et rituelle de Kid CUDI qui nous en empêche dans ce projet, puisque nous sommes désormais habitués aux voyages intérieurs à étages… Non, ce n’est pas ça, ni même la sincérité du propos. Kid CUDI est un rappeur qui sait nous parler grâce à sa capacité à marier la grandeur cosmique du spleen à des architectures musicales souvent très aventureuses, mais Passion, Pain & Demon Slayin’ nous laisse en retrait. Quelque chose d’essentiel semble s’être figé dans l’épaisseur de la douleur et juste après l’annonce de sortie de l’album, CUDI entre volontairement en désintoxication pour dépression sévères et pensées suicidaires - un aveu rare dans le rap game mais cohérent avec le parcours d’un artiste qui n’a jamais voulu maquiller ses failles. Assiégé par ses démons, Kid CUDI livre ici un disque fait pour survivre, un disque pour tenir debout… Un disque créé dans l’effondrement. Et cela s’entend.

Note réelle : 2,5

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   ARCHANGEL

 
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- Kid Cudi (chant)
- Dot Da Genius (claviers)
- Mike Dean (claviers)
- Alex Iles (trombone)
- Alison Bjorkedal (harpe)
- Brent Paschke (guitare électrique)
- Dan Fornero (trompette)
- Danny Parader (piano)
- Doug Tornquist (tuba)
- Matthew Byas (batterie)
- Rob Schraer (trompette)
- Steve Trapani (trombone)
- Steven Velez (violoncelle)


- act 1: Tuned
1. Frequency
2. Swim In The Light
3. Releaser
4. By Design
5. All In

- act 2: Prophecy
1. Illusions
2. Rose Golden
3. Baptized In Fire
4. Flight At First Sight/advanced
5. Does It

- act 3: Niveaux De L’amour
1. Dance 4 Eternity
2. Distant Fantasies
3. Wounds
4. Mature Nature
5. Kitchen

- act 4: It’s Bright And Heaven Is Warm
1. Cosmic Warrior
2. The Guide
3. The Commander
4. Surfin'



             



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