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2004 Vive La Vie
2012 La Fin De L'Espèce

KLUB DES LOOSERS - Vive La Vie (2004)
Par ARCHANGEL le 16 Juillet 2025          Consultée 129 fois

LE KLUB DES LOOSERS, ça vend du rêve, non ? Et pourtant il faut qu’on en parle car si vous lâchez toutes les semaines des ça va à votre psy, que vous tirez sur votre joint du bout des lèvres en PLS sur un banc ou que vous ne vous êtes jamais reconnu dans les bulldozers du rap français, vous apprécierez peut-être la psychanalyse de survie de FUZATI. Bienvenue dans le monde de merde de ce anti-héros masqué et poète de la loose accompagné de DJ ORGASMIC au beatmaking, qui officiera plus tard avec TTC. Attention les oreilles, ça ne va pas plaire à tout le monde.

En 2004, le duo versaillais sort son premier album, Vive la Vie. Un titre ironique pour un MC qui n’a peut-être pas une voix de dingue mais qui a de la suite dans les idées. Un album concept où il dégueule sur la vie avec un arc narratif entrecoupé d’interludes-skits téléphoniques durant lesquelles FUZATI tente désespérément d’user de tous les stratagèmes pour choper Anne-Charlotte sur des samples d’Andy CLARK ("Premier contact", "Autour d’un café", "Le rendez-vous manqué", "Peut-être un verre ?" ainsi que "Il faut qu’on parle" et son morceau caché), malaise garanti.

FUZATI raconte les origines du mal sur "Depuis que j’étais enfant" : quelques notes de piano en préambule, un beat qui sent bon les années 2000 et quelques scratches permettent de remonter le fil (Je ne suis pas fait pour le bonheur, je sais c’est triste/Pourtant on finit par s’habituer en laissant passer le temps/J’avais déjà ce style étant enfant/Looser). Quand les rappeurs se battent pour flexer comme des taureaux de compétition avec leurs beaux bijoux, FUZATI se situe quelque part entre l’autodérision et l’anti-rap avec son flow désabusé, souvent posé à contre-temps et les phrases tombent comme des sentences, bref, voilà un mec qui ne va pas bien et qui le dit sans honte (Le bonheur sait où j’habite/Mais il ne vient pas très souvent).

D’ailleurs, notre loser magnifique dissèque le cadavre du rap français dans la diss track "Dead Hiphop" où ORGASMIC découpe une rythmique mécanique sur un sample de "Studio Campus" des français Francis RIMBERT et Jean-Pierre SAVELLI (Dans le hip-hop une règle est de ne pas dire du mal des prostituées/On ne se moque pas du travail des mamans des MCs français/Comment crois-tu qu’ils connaissent aussi bien la vie de rue ?), de quoi se tirer une balle dans le pied en beauté ! J’adore le contraste du beat groovy de "Avec les larmes" avec FUZATI qui déblatère ce texte tellement triste quand on s’y attarde un peu (Lassé que mes envies ne prennent jamais corps/À force on devient mort/Elles descendent en rappel lorsque j’oublie que des choses blessent/Je connais bien les vertiges des alpinistes de la tristesse).

Il y a du nihilisme sous la casquette, que ce soit sur l’instru jazzy de "Ne plus y croire" sur lequel FUZATI a vraiment lâché l’affaire, dans la ballade psychédélique "Sous le signe du V", avec le beat répétitif de "Toute la vérité" qui remplit son rôle sans vraiment prendre de risque car encore une fois, tout le cynisme se passe dans les punchlines du MC (Fuck le système/J’ai remarqué qu’à la fin de leur vie les pauvres meurent toujours/Tu rigoles mais sais-tu seulement ce que c’est de mendier le ventre vide en sachant que ce soir encore tu dormiras dans la rue ?/Moi non plus) ou encore sur "Un peu seul" (J’me rappelle de ce jour où j’ai dit qui m’aime me suive/Depuis j’attends toujours même si personne n’arrive).

DJ ORGASMIC prouve l’étendue de ses influences en utilisant un sample tournoyant de "Fugitive", composé par l’anglais Johnny PEARSON, dans l’excellent morceau "Le manège des vanités". Il l’assombrit encore davantage et sur cette valse morbide, FUZATI démonte la société avec un regard clinique et une écriture brillante, extrême, peut-être même plus proche du stand-up que du rap (Attention, prochain arrêt en gare de la normativité), comme s’il était incapable de retenir les pensées toxiques du petit diable sur son épaule.

Evidemment, impossible de parler de Vive la vie sans évoquer quelques instants le tube antisocial "Baise les gens" où FUZATI nous décrit des images aussi hilarantes que désespérées (J’aime porter des chemises roses afin de symboliser le fait que je ne suis rien de plus qu’une simple feuille de papier toilette) et pose des questions existentielles de son flow traînant et monocorde (Le dieu consommation, assis avec une bière dans le canapé de leur salon/Des millions d’écrans prêchent, remplissent leur boîtes crâniennes d’images/Pourquoi devrais-je regarder la télé, est-ce qu’elle me regarde, elle ?). Pendant qu’ORGASMIC livre l’une des instrus les plus trippantes de l’album avec un beat jazzy-lounge ralenti, un FUZATI sous Lexomil crache sur la race humaine, un choix volontairement et radicalement plat qui laisse la lumière au texte… Brutal.

Dans "Pas stable", FUZATI balance sa carte de visite sur fond d’électro (Je pourrais être n’importe où en train de faire n’importe quoi, de toute façon cela ne change rien, nulle part je ne trouve ma place), avant de livrer une ritournelle au cyanure sur "Poussière d’enfants" où le duo sample "Rio" de DURAN DURAN. Plus misogyne que jamais, FUZATI enchaîne les punchlines avec un flegme glaçant sur la boucle empruntée au compositeur italien Riz ORTOLANI dans "De l’amour à la haine" mais c’est sur l’instru hypnotique et flottante de « Perspectives » que LE KLUB DES LOOSERS signe son meilleur morceau : DJ ORGASMIC fait pulser cette boucle sombre comme un coeur sous anxiolytique tandis que notre triste MC parle de cet avenir qui n’existe pas, une nausée hardcore redoutablement bien posée.

DJ ORGASMIC construit une ambiance unique et bourrée de références, entre beats fantomatiques et instrus old school alors que FUZATI documente la médiocrité en faisant l’antithèse de la hype. Le diagnostic pique mais il est sans appel, FUZATI est aussi captivant que détestable alors Vive la vie ne fera évidemment pas l’unanimité mais reste à ce jour un classique underground du rap alternatif français, celui qui rappe sans rimer que la vie n’est qu’une farce. Un disque à écouter seul, casque vissé sur les oreilles, entre deux sessions de thérapie.

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   ARCHANGEL

 
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- Fuzati (voix, samples)
- Dj Orgasmic (platines, samples)


1. Premier Contact
2. Le Manège Des Vanités
3. Dead Hip-hop
4. Avec Les Larmes
5. Autour D’un Café
6. Ne Plus Y Croire
7. Toute La Vérité
8. Poussière D’enfants
9. Le Rendez-vous Manqué
10. De L’amour à La Haine
11. Sous Le Signe Du V
12. Un Peu Seul
13. Baise Les Gens
14. Peut-être Un Verre ?
15. Pas Stable
16. Depuis Que J’étais Enfant
17. Perspectives
18. Il Faut Qu’on Parle



             



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