UP, le onzième album de R.E.M, dépasse l’heure d’écoute : pour la seconde fois d’affilée, les mecs ne se sont pas moqués de nous. On pourrait néanmoins se demander l’utilité de "Airportman", le cotonneux premier morceau. Nouveau suicide commercial ? Non, le départ de Bill Berry, difficile à digérer, a finalement été mis à profit pour pouvoir s’engager vers d’autres voies plus synthétiques, et ce qui suit accroche d’entrée. Le superbe et lancinant "Lotus" commence par rectifier le tir. Même style pour "Suspicion" et son refrain d’une grande finesse, qui anticipe même déjà l’orientation de l’album suivant REVEAL. "Hope', dont la mélodie rappelle Léonard Cohen à tel point que le groupe le créditera, fait plus dans l’électro. Vient ensuite un des grands moments du disque, "At my most beautiful", riche compo au piano enjôleur. Changement d’ambiance avec le sombre "The Apologist" puis le calme "Sad professor".
La seconde partie est moins immédiate mais les réécoutes révèlent quelques pépites. Chose rare, Michael Stipe déchire un peu sur le refrain de "You’re in the air" en forçant un chant trop maniéré. "Walk unafraid" tout en finesse et subtilité, est beaucoup plus réussi, une vraie perle (le morceau sera légèrement accéléré en concert). Ce n’est pas le cas de "Why not smile" dont le motif récurrent n’incite pas à la fête. A ce stade, pas sûr que R.E.M réussisse à garder tout le monde jusqu’au bout. Dommage car bien emmenés par la belle ballade "Daysleeper" qui rappelle l’époque AUTOMATIC FOR THE PEOPLE, les ultimes morceaux "Diminished" (dont la partie vocale finale est délicieuse), "Parakeet" ou "Falls to climb", sans atours clinquants, dévoilent une belle intensité émotionnelle venant dissiper toute forme d’ennui initial.
A l’arrivée UP, album pour lequel le rock des années initiales a pris quelques vacances, est donc tout aussi dense que son prédécesseur NEW ADVENTURES IN HI-FI. Rien à voir avec le Mac Do de MONSTER à la séduction immédiate. On a une fois encore ici un repas complet avec entrée, dessert et spiritueux pour lequel il faut prendre son temps. A défaut, il apparaîtra peut-être indigeste. A part "Lotus" et "At my most beautiful", mieux vaut éviter cet album pour une toute première approche, ou alors se l’approprier par moitié.
Mon ressenti 2024 : TRIPPANT (5) : Néant. DELECTABLE (4,5) : "Lotus", "At my most beautiful", "Walk unafraid". SEDUISANT (4) : Suspicion, "Parakeet", "Falls to climb", "Diminished", "Daysleeper". PLAISANT (3,5) : "Hope", "The apologist", "Sad professor". INTERESSANT (3) : "Why not smile". EMOTION LIMITEE (2,5) : "You’re in the air". AUCUNE EMOTION (2) : "Airportman". DEPLAISANT (1,5) : Néant. PENIBLE (1) : Néant. Bilan : 3,68 et Top 5 à 4,30 : UP cote pour moi 3,99 et arrive en 8ème position dans mon classement personnel des albums de R.E.M.
Du côté des fans, on ne peut pas dire que UP soit franchement plébiscité car il arrive 12ème sur 15. Seuls les singles "Daysleeper" et "At my most beautiful" accrochent presque les 50 premières places, "Walk unafraid" parvenant lui à intégrer le Top 100. Arrivent ensuite respectivement et péniblement "Lotus" (surprenant si loin), "While not smile" (surprenant mais dans l’autre sens), "Sad professor", "Falls to climb", "Hope", "The apologist", "Suspicion", "Dimished", "You’re in the air", "Parakeet", quelques farceurs (des faux fans certainement) ayant même donné un de leur vote à "Airportman".
Pour les complétistes, il faut surtout signaler en cette fin de siècle le single "The great beyond" (4) (B.O du film Man on the moon) qui se bonifie avec le temps, tandis que "Draggin’ The line" (3,5) (B.O Austin Powers) se laisse écouter. Inutile de se précipiter vers les B-sides, c’est encore le service minimum avec "Enphysema" (2) et "Surfing the Gange" (2), et je préfère ne même pas évoquer les disques pour les fans.