Parler du "double blanc" des Beatles, c'est s'atteler à une tache gigantesque : parler du disque le plus mythique et le plus "hénaurme" de l'histoire.
Je vais donc le faire, titre par titre - et comme il y en a 30, ça va me prendre un certain temps, ha ha.
Face 1.
"Back in the U.S.S.R." : un excellent titre d'introduction, très rythmé. A ce qu'il paraît, c'est Lennon à la basse, et McCartney à la batterie, Ringo ayant déserté pour quelques temps à l'époque - les frictions étaient malheureusement nombreuses.
"Dear Prudence", composé en Inde par le Walrus (Lennon, pour ceux qui ne comprennent pas l'allusion), en hommage à la soeur de Mia Farrow, qui était aussi en Inde lors de leur pélerinage chez le Maharishi. Une splendeur.
"Glass onion" : titre à écouter, car il s'agit plus ou moins d'une vision introspective d'un Lennon qui revient sur les années psychédéliques du groupe : allusions au "Walrus", "Fool on the hill", "Strawberry fields forever", "Fixing a hole", "Lady Madonna"... titre excellent, un de mes préférés, mais trop court.
On arrive au premier passage pénible du disque (trois titres très moyens) avec "Ob-la-di, ob-la-da". ce titre chanté par Macca est assez pénible et répétitif. Un des titres les plus connus des Beatles, et franchement, on se demande pourquoi.
"Wild honey pie", long de moins d'une minute, quasi instrumental... une nullité affligeante et inutile.
"The continuing story of Bungalow Bill" : refrain répétitif, et chiant comme une pluie froide... mais couplets assez drôles. Moyen, mais amusant. Sans prétention, quoi.
Retour à de bonnes chansons.
"While my guitar gently weeps", un des 4 titres (un par face, logique) de Harrison, le meilleur titre du disque, carrément. Le solo de guitare est de Clapton (première collaboration d'un artiste externe à un disque des Beatles). Paroles subtiles, ce titre aurait pu avoir sa place sur le triple monument de Harrison, "All things must pass" (1970).
"Happiness is a warm gun", chanson sombre de Lennon, sur la drogue. Deux anecdotes :
- tout d'abord, le surnom de Yoko Ono par Lennon était "mother", terme que l'on retrouve dans le titre.
- ensuite, qui a vu le film "TRAINSPOTTING" ? Dans ce film essentiel, le dealer du héros est surnommé "Mother superior", et ce terme est dans la chanson (associé à la drogue, l'héroine - Lennon en a été addict, surtout au moment de l'enregistrement de ce disque - voir "Yer blues").
Face 2.
"Martha my dear" : une chanson aussi stupide que la Martha du titre ("hold your head up, you silly girl"). Fadoche, mais agréable quand même...
"I'm so tired", presque aussi sombre que "Happiness...", très court, assez intéressante. Du bon Lenon.
"Blackbird". Une splendeur de Macca, courte mais essentielle. Une comptine absolument magnifique et pure, ce qui n'est pas le cas de la chanson suivante.
"Piggies", de Harrison, seule chanson du disque que le fou Charles Manson n'a pas comprise de travers : une diatribe méprisante ("all they need's a damn good whacking") sur on ne sait trop qui, mais ceux qui sont visés en prennent plein la gueule. Etonnant de la part de Harrison, généralement plus doux.
Autre passage à vide dans le disque, autre trou noir : jusqu'à "I will".
"Rocky Raccoon", fausse chanson western, narrant une histoire de western. Pas transcendental, honnêtement.
Première chanson du répertoire des Fab Four à être composée par Ringo, "Don't pass me by", décidément ce disque double recèle des surprises. On ne va pas tirer sur l'ambulance : ce n'est pas un grand compositeur/chanteur (sur "Abbey road", il y aura le pénible "Octopus's garden"... là, encore, ça peut aller).
"Why don't we do it in the road ?" de Macca, moins de 2 minutes, tout est dit dans le titre. Une chanson aux paroles tellement courtes que je pourrais les recopier ici (je ne le ferai pas). Indigne des Beatles, selon moi.
"I will", retour à de bons titres. Aussi court que le précédent, mais une belle chanson. De qui parle Macca ? de Dieu... ou d'une fille ?
"Julia", par Lenon, hommage à sa mère : n'y a t-il pas plus bel exemple d'amour d'un fils envers sa mère ? une beauté que ce titre, le dernier du disque 1.
Face 3.
"Birthday" : une variante à "Happy birthday", qu'on pourrait chanter à tue-tête, fringué en Beatle, lors d'une fête d'anniv'. Pensez-y, c'est une bonne idée ambiance. Excellent.
"Yer blues" : un des meilleurs titres du double, un blues violent (dans les paroles) de Lennon, qu'il reprendra avec le Plastic Ono Band. Le disque 2 commence très fort, ça ne durera pas.
"Mother Nature's son", et la platitude revient en force : Macca à son plus creux avec "Honey pie" et "pourquoi on ne ferait pas 'ça' sur la route ?".
"Everybody's got something to hide except me & my monkey" : très court (2 minutes environ) et heureusement, car ce titre lennonien est médiocre, répétitif...
"Sexy Sadie" : enfin un bon titre ! Composé à l'origine pour dénoncer le Maharishi, obsédé sexuel plutôt qu'autre chose, ce titre s'est vu radicalement transformé (pour les paroles) et est devenu ce titre-là. Bon, très bon titre.
"Helter skelter" : création du punk, du hard, du heavy, du grunge. Si, si, je vous jure ! Macca qui braille encore plus fort que Rotten ou Cobain (on est en 68, don't forget it, c'est pas trop équivalent, en fait). Seul point faible : trop de fausses fins à la fin (sic) qui nuisent, et emmerdent un peu. Ringo Starr hurle "I got bisters on my fingers !" ("j'ai des ampoules aux doigts !"), on devine comment il se les ait faites, ha ha... en fait, la prise du disque est la 20ème...
"Long, long, long", par Harrison, très belle chanson. Juste que Harrison ne chante pas très fort, déjà que la mélodie est douce...à écouter fort pour l'apprécier.
Face 4.
"Revolution 1" est une version calme du "Revolution" (face B du 45 tours "Hey Jude"). Splendide, rien à dire.
"Honey pie". Aïe, aïe, aïe. Macca à son plus creux, again. Nullité afligeante et vaine. Selon moi.
"Savoy truffle" : dernier titre de Harrison, une merveille subtile et sucrée. A savourer sans modération.
"Cry baby cry", ou la quintessence lennonienne du double blanc. On retrouve quelques envolées du "Sg. Pepper" sur ce titre, notamment les paroles. L'ambiance générale du disque se retrouve dans ce titre : tour à tour oppressante et légère, enfantine et glaçante. Un bon condensé.
"Revolution 9". Alors là, je vais être clair : 8,22 minutes de délire sans musique, avec un Lennon hurlant des "alright !", Yoko sussurant "if you become naked" (à la fin), plusieurs collages, et une voix répétant inlassablement "number nine, number nine...", je suis OK pour dire que ça peut ne pas plaire à tout le monde. Le morceau est toujours aussi destabilisant, plus de 35 ans après : original, vif, à part. Le morceau le moins aimé du répertoire beatlesien, OK. Mais "Revolution 9" est LE morceau qui dirige l'album...
"Good night" : une affligeante comptine chantée par Ringo (écrite pas Lennon/Macca), que les Stones parodieront sur "Fingerprint file", le dernier titre de leur "It's only rock'n'roll" (74) : 'good night, sleep tight'.
Que dire au final, sur ce disque ?
Trop long (95 minutes : 46 + 47 minutes, sans compter les secondes), boursouflé, mais peuplé de fulgurances, de titres merveilleux.
"Un disque simple n'aurait pas suffi à contenir le best of du disque." : David Fricke, du magazine Mojo.
"Il aurait fallu que cela ne soit qu'un simple noir" : Philippe Manoeuvre.
Un monument inépuisable du rock, malgré ses quelques petites défaillances. Le meilleur des Beatles, assurément.
J'essaierai de faire plus long la prochaine fois, ah ah...