Petite précision:
Paul McCartney n'a bricolé que deux fois des disques à la maison, la première en 1970 avec l'album McCartney et la seconde en 1980 et le volume "2". Mais à chaque occasion il a complété son travail en studio.
Macca a vieilli et pour la première fois ça s'entend sur disque et pas seulement parce qu'il règne un doux parfum de mélancolie dans cet opus représenté par une pochette qui découvre son auteur jeune homme, jouant de la guitare dans l'arrière cour de sa maison. Ca c'était avant. Avant le succès, le phénoménal triomphe de qui vous savez, avant la reconnaissance artistique aussi.
"Friends To Go" en est une fabuleuse illustration avec ce titre qui n'est pas simplement dédié à George Harrison, lequel connaissait bien l'arrière cour de la photo, cette chanson c'est DU George tout court. Depuis le thème dédié à la mémoire de l'ami, jusque dans le texte, dans sa mélodie, dans ses arrangements et dans son interprétation: "All Things Must Pass"…
Et puis il y a les géniales "Jenny Wren" et "English Tea" aux mélodies délicieusement surannées et toujours cette mélancolie enveloppante…
Parfois on songe à Ray Davis avec cette suite de chroniques qui sonnent tellement "British"qu'il est impossible de douter de la nationalité de son auteur/compositeur et (presque) unique interprète.
On a beaucoup comparé "Chaos…" avec les deux premiers albums de Macca quand il est paru". Passons vite fait sur l'éponyme, un truc bricolé qui contenait deux trois perles dont une est devenue un classique, et évoquons "Ram"un chef d'oeuvre qui a nécessité l'emploi de pas mal de musiciens, avec des moments intenses et orchestrés.Mais sans aucun classique dedans. Ici l'intensité est plus soyeuse et les orchestrations moins fournies.
La ligne qui sépare le création du chaos est ténue nous chante Paulo, postulat existentiel qui pourrait s'appliquer pour celles qui séparent l'éblouissant du fumeux, le fou du génie, le bon grain de l'ivraie ou encore le psychopathe de l'homme politique. Et ça remplit son office.
De l'entrainant "Fine Line" jusqu'à "Anyway" qui nous renvoie au Curtis Mayfield de "People Get Ready",Chaos… est plutôt calme comme son nom ne l'indique pas. Macca reste un génie de la mélodie, servi ici par un réalisateur exigeant avec la Star, c'est avéré, mais avant tout avec lui-même parce que le moins qu'on puisse dire c'est que l'écrin destiné à servir ces divines mélodies fait lui-même partie de l'oeuvre, cela sans jamais recourir au moindre artifice.
"I've only got two hands" en bonus est bien sympa ce qui ne gâte rien.
McCartney vieillit et se fait remettre en question. Ici il apporte la plus belle des réponses en trois quarts d'heure souvent magiques, alors on pardonne aisément les moments un peu plus faibles du disque…comme avant.