Genesis suit une trajectoire ascendante - progressive pourrait-on dire - depuis Nursery Cryme, et qui trouve ici sans aucun doute son aboutissement. Peu étonnant que ce soit donc aussi la d'une glorieuse époque, avec le départ de Peter Gabriel.
On est en présence du premier double-album de Genesis, un ambitieux disque dont le récit est sûrement aussi intéressante que la musique, sans prendre le pas sur elle, et qui se trouve aussi être porteur de nombreuses ruptures. Le thème est ici bien éloigné du folklore anglais, les sonorités participant à ce changement, comme dans le fameux Back in N.Y.C.
Le premier disque nous offre à la suite tout ce que le groupe fait de mieux, et s'amuse à accumuler les contrastes, en enchaînant le tendu Fly on a Windshield et le lourd Broadway melody of 1974, le léger Cuckoo Cocoon et l'angoissant In the cage, ou en intercalant avec une facilité incroyable le salace Counting out time entre le mélancolique Hairless Heart et le joyau pur qu'est Carpet Crawlers. Cette dernière chanson est en effet ce que Genesis a fait de mieux dans toute sa discographie, et dépasse allègrement en qualité Firth of fifth et The musical box réunis.
Le deuxième disque est, comme souvent dans ces cas-là, plus expérimental, en particulier dans The waiting room, rebutant dans un premier temps mais révélant bien vite tout le potentiel de son final. Anyway et the Lamia (inspiré d'un poème de Keats) sont aussi d'une beauté confondante, Tony Banks nous y offrant certains de ses plus beaux airs.
La dernière face est sûrement la plus difficile à digérer complètement, mais il faut que l'auditeur se souvienne qu'elle termine une heure et demie d'une longue traversée des enfers, de plus en plus inquiétante et étrange. Dans cette optique, elle joue son rôle parfaitement, à l'instar de l'interlude Ravine. Le tout se termine de manière surprenante par le mystérieux It., honnête dans son rôle conclusif.
Malgré quelques imperfections que sa longueur ne pouvait éviter, The Lamb Lies Down On Broadway reste un des plus albums les plus réussis et aboutis sur lesquels mon oreille a pu se pencher.