Une fois n'est pas coutume, je suis en désaccord complet avec Marco Stivell... Alors allons-y pour le plaidoyer improvisé du dernier album de la prétendante au trône scintillant de "Reine de la Pop"! Je tiens à préciser que je ne fais pas partie des nombreux inconditionnels de la demoiselle et que j'ai malgré tout apprécié cet album et que je voulais rendre justice à ma façon, à celui-ci.
D'abord, passons outre la couverture ridicule à laquelle je ne me ferai surement jamais!
Musicalement ensuite, je ne saurais être aussi catégorique que notre respecté chroniqueur. Certes l'album a des faiblesses : "Governement Hooker" a un refrain presque insupportable, se donne des allures de chanson contestataire sans en avoir ni la profondeur de fond, ni la subtilité de forme.
"Scheisse" ne m'a que difficilement convaincu : une psalmodie en quasi-allemand répétée ad nauseam, ça passe peut être mieux auprès de l'amateur de techno/house en boite de nuit qu'auprès de moi. (Pour écrire ce commentaire, je réécoute cette chanson et je dois avouer un peu malgré moi que le morceau ne me déplaît pourtant pas).
"Judas" m'est d'abord apparu comme une pâle imitation de "Bad Romance". Si j'ai encore un peu de mal avec les "Judaaas, Judahas", trop peu mélodiques à mon goût, le pré-refrain et le refrain me fascinent par leur énergie contagieuse! (mais bon, c'est complètement subjectif, je comprends qu'on puisse ne pas aimer).
Mais l'album possède selon moi des qualités indéniables et je vais essayer maladroitement de défendre ma position. On peut d'abord saluer l’éclectisme des influences de Gaga: de la chanson hispanisante "Americano" à la ballade rock "Yoü And I", de l'inclassable "Bloody Mary" au mega-hit taillé pour les radios "Judas", cet album nous fait indéniablement voyager d'un univers à l'autre.
Ensuite pour un album pop, la production est impeccable (en même temps, c'est pas comme si elle manquait de moyens) et fait relativement rare, toutes les mélodies me rentrent assez facilement en tête et j'ai eu la surprise de me revenir en tête certains morceaux sur lesquels je n'avais pourtant pas retenu particulièrement mon attention. Pari réussi donc pour un album qui se veut l'album de la décennie (il n'en a surement pas l'étoffe, admettons-le, mais s'en approche par moment).
"Marry The Night" qui ouvre l'album en est la parfaite illustration : début piano-voix calme et doux, puis le refrain approche et une tornade de synthés nous embarquent vers un morceau complètement différent. Multiples breaks, qui renforcent peu à peu le morceau.
Bref, j'ai été complètement balayé et je ne m'y attendais pas du tout... (non, sérieusement!)
Vient le morceau éponyme, aux arrangements électro complètement fumés (qu'avait pris RedOne le producteur avant de lâcher ça), un air de "Express Yourself" tant dans le message que dans la mélodie. On le condamne à l'oubli dans les mois à suivre.
Et pourtant, ce morceau devient l'hymne de toute une génération de "Little Monsters" qui brandit l'acceptation de soi en bannière! On peut critiquer Stefani sur bien des points, elle aura quand même réussi à créer par son charisme (et oui, je ne trouve pas d'autre mot) un véritable phénomène socio-musical.
(Quant à moi, j'avoue apprécier le dernier "post-refrain" dénudé avec ses simples claquements de main laissant enfin paraître une voix puissante mais mesurée)
"Americano" mérite plus que de faire "carrément pleurer... de désespoir". "Flamenco-house", l'expression est bien trouvée! Mais je ne la connote pas aussi négativement! Certes, l'accent de la Lady en espagnol est quelque peu pathétique et la structure de la musique est plutôt simpliste. Malgré tout, elle reste entraînante et rafraîchissante et j'ai un faible pour les "Don't you try to catch me..." de fin de morceau et je pense qu'une telle chanson me ferait bien plus danser en soirée que certains tubes passés en club.
"Hair" est une chanson inspirante et galvanisante, au refrain "catchy" souligné par un écho persistant mais discret (oh oho) et sublimé par le saxophone de feu Clarence Clemons. On regrettera le passage "post-refrain" qui aurait volontiers pu se passer de toutes ces fioritures électro qui font un peu retomber la sauce. (l'écouter en live à Taratata, c'est changer d'avis sur ce dernier point))
"Bloody Mary" est l'ovni de cet album... Un rythme mid-tempo, une mélodie hypnotisante, des choeurs masculins scandant "Gaga", une phrase en français qui passe presque inapperçue ("J'veux pas mourir toute seule"), un refrain que j'ai toujours trouvbé fascinant et qui m'est revenu plusieurs fois à l'esprit inopinément.
Un de mes coups de coeur et pour moi une grande réussite en terme de composition et de réelle prise de risque par rapport à ce qu'on aurait pu attendre de l'auteure-compositrice qu'est Gaga.
"Bad Kids": nouvel hymne à la jeunesse qui l'écoute, paroles contestataires un peu plus poussées que d'habitude porté par un riff de guitare sympathique et au refrain un peu surproduit à mon goût. Moins de synthés façon 80s aurait peut être fait plus honneur à cette chanson.
"Highway Unicorn" démarre sur une autre mélodie entêtante dont les thèmes rappelle l'engagement de Stefani auprès de la communauté gay. Beaucoup (trop?) de synthétiseurs ici aussi mais les couplets ont le mérite de s'éloigner de la routine de la pop et le bridge final accompagné par des orgues inattendues mettent bien en valeur la voix de Gaga.
"Heavy Metal Lover": ici rien qu'un "true" métalleux ne pourrait apprécier contrairement à ce qui est annoncé par le titre. Le refrain bien ficeléet des breaks techno-dance sauvent la chanson de couplets catastrophiques. On aime ou on aime pas mais ce morceau a un certain charme et une excentricité indéniable.
La dernière partie de l'album inaugure les débuts "rock" de Lady Gaga et je tiens à la mettre en exergue pour sa qualité selon moi relevée:
"Electric Chapel" est un excellent morceau électro-rock porté par des riffs simples mais efficaces, une mélodie catchy où la voix de Stefani est aussi puissante dans les couplets que dans le refrain (qui est par ailleurs accompagné de cloches d'église bien placées), un solo de guitare qui ne fera pas frissonner les amateurs mais qui a de quoi étonner et est somme toute plus que convenable
(Quelques mots sur "The Queen", présent dans la version deluxe et qui illustre parfaitement la transition d'un morceau à l'autre: les cloches résonnent encore du dernier morceau quant on repère une subtile allusions la "Killer Queen" du groupe légendaire. Puis refrain encore une fois entraînant, break retour sur le couplet, re-refrain et la guitare surgit à nouveau pour quelques notes et accompagne ensuite Gaga dans des arpèges complètement inattendus. Solo, je dois dire très bien réalisé [Brian May, es-tu là?] et on enchaine sur la chanson suivante)
"Yoü And I", autre de mes coups de coeurs, est une ballade rock comme on aimerait voir Gaga en chanter plus souvent: une batterie lente mais puissante, des choeurs superbement bien placés, une guitare (et une basse?) tout en finesse derrière la mélodie principale, des claquements à la "We Will Rock You", un refrain magnifique qui reste en tête des heures et enfin une véritable démonstration des capacités vocales de la belle Stefani, détrônant le pourtant exceptionnel "Speechless" de l'album précédant!
Un autre solo bref mais saisissant de Brian May et on est fixés: quand Lady Gaga se lance dans ce genre, elle est la digne héritière des légendaires Queen (et je mâche mes mots)
Après un tel ouragan rock, "The Edge Of Glory" se démarque pourtant comme un très bon morceau! Enfin de l'électro-pop où la voix de Stefani a une importance au moins aussi importante que les très bons arrangements qui l'accompagnent! Un air auquel on ne s'attendait peut être pas de sa part porté par une instrumentation remarquable de subtilité et transformé finalement par Clarence Clemons et son inimitable saxophone qui nous entraîne dans le dernier solo de sa carrière et certainement pas un dont il aurait à rougir!
Bref vous m'aurez compris si vous m'avez lu jusque là, j'ai trouvé "Born This Way" très bon malgré des faiblesses que j'ai évoqué plus haut! Peut être pas la révolution qu'on nous promettait mais un album bien mieux produit et composé que la majeure partie de la pop mainstream qu'on nous sert ces dernières années, et d'une qualité sublimée par les goûts originaux de la seule et l'unique Stefani Germanotta, also known as Lady GaGa!
Théo, fan agréablement surpris
