Ah le Danemark ! Quel beau pays, quelles belles Danoises ! Et cet alcool au goût de réglisse, anodin à la dégustation, fatal le lendemain matin (d’ailleurs si l’un d’entre vous connaît le nom de ce truc à 40° faites-moi signe dans les commentaires, le nom de la bouteille ressemblait phonétiquement à quelque chose comme « fiskeufitch »). A cette liste de spécialités renommées il va bientôt falloir ajouter Karsten PFLUM, de son vrai nom Jacob HELVERSKOV MADSEN, bidouilleur électronique pas manchot malgré la latitude. Son cinquième album est sorti chez les Allemands d’Hymen, label berlinois bien connu qui a vu passer quelques grands noms comme HECQ, VENETIAN SNARES, GRIDLOCK et SOMATIC RESPONSES.

Voilà pour la carte de visite. Le parti pris de Karsten PFLUM sur son dernier opus est assez audacieux. Il a ajouté une grosse louche de dubstep à son IDM habituelle, ce qui donne un mélange assez fascinant. Les basses wobblées cohabitent avec les mélodies sucrées et les percussions décousues made in Rephlex. Une manière comme une autre de donner un coup de fouet à un genre qui tourne un peu rond… l’IDM ou le dubstep ? Les deux !

Malheureusement, au lieu de mener son hybride jusqu’au bout, le Danois a choisi une bête montée en puissance pour faire passer ses audaces. Au lieu de proposer des morceaux à la fois IDM et dubstep, il a tranquillement divisé son disque en trois parties. L’album s’ouvre sur trois titres très IDM, avec un effort d’originalité sur les sonorités. Ça change un peu de l’IDM/Acid House à la The TUSS qui fait tant d’émules depuis 2007. Puis, de « Dansk Notebook Center » à « IpKip », c’est un voyage dans le temps qui nous ramène au milieu des années 90, avec des recherches rythmiques ardues dignes du… I Care Because You Do d’APHEX TWIN (ça y est, la référence est lâchée !).

Dernière étape, le passage à un dubstep bien nerveux, avec du wobble en veux-tu en voilà. C’est comme une grande rétrospective de l’électronique actuelle qui essaye de tenir en une heure et quart. Entamer l’album avec les titres IDM est un choix assez habile ; No Noia My Love avait bien besoin d’une accroche mélodieuse pour faire passer ses rythmiques imposantes. De ce côté-là, il y a du bon et du mois bon. Et même de l’excellent : « Frø » et ses boucles torturées ; « WrRaOu » et ses résonnances métalliques. Dommage que la monotonie d’un « Ipkip » vienne un peu tempérer l’enthousiasme.

Pour ce qui est du dubstep (on va y arriver), rien de bien nouveau sous le soleil. Au lieu de mixer ses basses distordues avec son IDM envoûtante, Karsten PFLUM propose une sorte d’EP dubstep assez commun en fin d’album. Des titres très efficaces (« Mud Mining » surtout), mais pas très fins au regard de ce qui précède. Pourtant, quand l’artiste danois choisit de marier tous ces éléments, ça donne « Imun Card » et surtout « The Hand », un bijou d’électronique comme on en croise rarement. Une mélodie rêveuse se perd dans les distorsions de la basse, le tout supporté par une rythmique ciselée à la perfection.

No Noia My Love est un album très intéressant mais aussi très frustrant. On a l’impression qu’en allant juste un peu plus loin dans sa démarche, Karsten PFLUM aurait pu sortir quelque chose de vraiment grandiose, un disque qui aurait été le compromis idéal entre la danse et la contemplation. Au lieu de ça un bon album, voire très bon, si on arrive à tenir la longueur.