PIERRE DE GRENOBLE est le premier album de Gabriel et Marie Yacoub, couple de passionnés de musique traditionnelle qui donnera bientôt naissance au plus beau des bébés, MALICORNE. On ne saurait réellement dissocier les deux groupes entre eux, MALICORNE étant la suite logique de ce premier projet personnel, mais par respect pour l'oeuvre originale, nous parlerons bien du groupe PIERRE DE GRENOBLE dans ces lignes.

Gabriel avait fait ses premiers pas sur disque en compagnie d'Alan STIVELL, c'était donc avec une certaine expérience des enregistrements que sa femme et lui entament leur propre carrière sous ce premier nom. Hugues de Courson qui rejoindra le groupe MALICORNE par la suite est ici à la production, bien meilleure que sur l'album suivant sorti l'année d'après (à moins que cela ne soit un bienfait de la réédition 2005...). Parmi les autres invités, on pourra également remarquer Dan AR BRAZ et sa guitare électrique, qui accompagnera Alan STIVELL encore quelques années avant de voler lui aussi de ses propres ailes.

Bien que la maison d'édition ait décidé pour des raisons évidentes de marketing d'accoler un MALICORNE sur la pochette et si parallèlement, la voie musicale adoptée ici n'est pas si éloignée du second groupe, PIERRE DE GRENOBLE possède bien un caractère propre. L'album navigue dans des eaux plus celtiques, alors que MALICORNE voguera sur le grand océan des autres régions de France. L'apport de Dan Ar Braz (dont un superbe solo sur le titre éponyme) et des autres invités est également vecteur d'une densité de styles qui empêche encore Gabriel et Marie de s'affirmer complètement dans leur propre voie. Il ne s'agit pas là d'un gros reproche, mais ce point s'avère gênant dans la mesure où MALICORNE affirma une personnalité beaucoup plus marquée, et que du même coup PIERRE DE GRENOBLE restera à jamais dans l'ombre de sa succession.

Quelques tubes sortent du lot, tout de même, notamment un "Prince d'Orange" au souffle chaud et vibrant d'un couple basse/guitare, à la manière grinçante d'une vielle à roue. "Pierre de Grenoble" tire également magnifiquement son épingle du jeu. Le reste, malgré tout, satisfera moins les avides d'originalité. Binious, guitares, dulcimer et violon se font la cour, TRI YANN fera plus tard bien mieux dans ce domaine. "La fleur de lys" par exemple, propose également un choeur a capella digne des prouesses de MALICORNE mais ne décolle pas vraiment. D'autres morceaux sont plus avenants, à l'image de la chanson rythmée "Au chant de l'alouette" ou bien du planant "Le long de la mer jolie".

Si vous avez fait le tour [des premiers albums] de MALICORNE et êtes aujourd'hui en attente de plus, PIERRE DE GRENOBLE deviendra par la force des choses indispensable. C'est un bon disque, avec de belles chansons, qui nous évitent de tomber encore et toujours sur les mêmes "tubes" de musique traditionnelle. Dans le cas contraire cependant, MALICORNE devrait rester votre priorité.