Recherche avancée       Liste groupes



      
CHICAGO BLUES  |  STUDIO

Commentaires (1)
L' auteur
Acheter Cet Album
 

ALBUMS STUDIO

2004 Chicago Jump

Jimmie Lee ROBINSON - Chicago Jump (2004)
Par LE KINGBEE le 13 Novembre 2023          Consultée 330 fois

Grande figure de Maxwell Street, Jimmie Lee ROBINSON voit le jour en 1931 à Chicago. Elevé par ses grands-parents, il se lance très tôt dans l’apprentissage de la guitare au contact de son voisin Blind Percy (probable pseudonyme de Blind Joe Taggart) et commence à se produire sur l’artère de Maxwell Street dès ses onze ans. Au fil des ans, Jimmie fait équipe avec Eddie TAYLOR, côtoie Freddie KING, Elmore JAMES et Sonny Cooper et finit par intégrer l’orchestre de Little WALTER en 1955. Il quitte l’harmoniciste, personnage colérique, à la fin des fifties et entame une solide carrière de sessionman alternativement dans des rôles de bassiste ou de guitariste rythmique. C’est ainsi qu’on le retrouve auprès d’Howlin’ WOLF, Magic SAM, Jimmy REED, Willie Mabon, St Louis Jimmy Oden ou Al Smith. En 1958, le disc-jockey Big Bill Hill le recommande à Violet Muszinski, patron du label Bandera pour lequel il met en boite sous le nom de Lonesome Lee trois singles dont un est réédité par Starlite, petite maison de disques anglaise. Au tout début des sixties, devenu musicien itinérant, il fait équipe avec l’harmoniciste Shakey Jake, l’oncle de Magic Sam, et enregistre comme accompagnateur une poignée d’albums pour le label Bluesville.
En 1965, il participe à sa première tournée européenne en participant à l’American Folk Blues Festival en compagnie de Buddy GUY, Big Mama THORNTON, Eddie Boyd, Roosevelt Sykes et Big Walter Horton. A la fin des sixties, suite au décès de sa mère et à l’impopularité du Chicago Blues, Jimmie range sa guitare sous son lit et ouvre un magasin de bonbons à deux pas du West Side et de Maxwell Street. Durant les années 70 et 80, si Jimmie accompagne sporadiquement son ami harmoniciste Little Willie Anderson, la musique passe au second plan, après avoir vendu des bonbons pour les gamins du quartier, le guitariste devient charpentier, chauffeur de taxi, agent immobilier.

Ce n’est qu’à la fin des eighties que Jimmie Lee Robinson va revenir sur le devant de la scène par l’entremise de Scott Dirks, membre des Ice Cream Men *. En 1992, Jimmie enregistre Lonely Traveler album publié deux ans plus tard par le label de Bob Koester Delmark Records. Le nom de Robinson resurgit alors à l’affiche de prestigieux festivals de Blues, le guitariste rôde son petit ensemble dans les clubs de Chicago, où de nombreux amateurs éclairés ne l’ont pas oublié. Entre 1996et 1998, Jimmie Lee Robinson enregistre quatre albums pour les labels Amina (son propre label) et APO de Chad Kassem.

Figure historique de Maxwell Street à l’image de Jimmy Davis, Jimmie Lee Robinson fera la une des journaux spécialisés et des infos télévisées en 2000 en entamant une grève de la fin en protestation contre la destruction d’une partie de Maxwell Street destinée à l’agrandissement de l’Université de l’Illinois. Homme de conviction, Jimmie se convertie à l’Islam en 2001 et prend le nom de JL Latif Aliomar. Sa reconversion à l’Islam sera de courte durée, il est victime un cancer des sinus début 2002, ce qui ne l’empêche pas de se produire dans sa ville natale. Rapidement affaibli par la maladie, Jimmie se met une balle dans la tête à bord de son véhicule en juillet, capitulant ainsi contre la douleur.

Enregistré en novembre 95 et février 96 au Twist Turner’s House Of Sound, le studio du batteur Twist Turner, comme le laisse supposer son nom, Chicago Jump ne parait curieusement qu’en 2004 dans les bacs des disquaires. En effet, suite aux diverses publications éditées par Amina et APO, les bandes de ces sessions prenaient la poussière sur une étagère ; les efforts de l’opiniâtre Scott Dirks seront récompensés en persuadant Rick Congress, patron du label newyorkais Random Chance de publier ces 14 titres.

Superbement secondé par une solide équipe comprenant l’harmoniciste Scott Dirks (ex Willie Buck, The Buckinghams) également producteur, le batteur Twist Turner (ex Isaac Scott, Little Arthur Duncan), le bassiste Sho Komiya (Little Arthur Duncan, Jimmy Burns) et le guitariste Rockin’ Johnny Burgin (Tail Dragger, Eddie Taylor Jr.), le timbre menaçant et sombre de Robinson produit son effet dès "Angry Lover", ici pas de démonstration de guitare, le vétéran va à l’essentiel remarquablement épaulé par Johnny Burgin. Si le natif de Chicago ne nous offre que deux compos dont une relecture de "Chicago Jump", les douze pistes restantes sont autant d’hommages aux bluesmen avec lequel Robinson a évolué durant sa longue carrière. Il reprend Willie Mabon par deux fois, transformant "Poison Ivy", un R&B patiné de Jump enregistré en 54 par le label Chess en une pièce typique de Chicago Blues, l’harmonica nous renvoyant sur les traces d’enregistrements à la Muddy Waters. En guise de clôture, il s’attaque à "Got To Have Some", un inusité de 1962, cette fois encore toutes les facettes R&B sont gommées au profit d’un shuffle à la Jimmy REED. Du même Jimmy Reed, il reprend "Ain’t That Lovin’ You Baby" dans une formule s’approchant de l’original, seul le chant s’avère plus grondant derrière un accompagnement de métronomes. Si le titre fut cuisiné à toutes les sauces, souvent peu goûteuses (The EVERLY BROTHERS, The ROLLING STONES, The Beau Brummels) là le groupe ressuscite l’accompagnement d’Eddie TAYLOR.

Mais c’est bel et bien Little WALTER, personnage colérique, qui recueille les plus gros clins-d ’œil avec pas moins de quatre covers : "Ah’w Baby", enregistré en juin 57 en compagnie de Robert Lockwood et de Jimmie Lee reprend les bases de l’original révélant néanmoins une cadence légèrement plus élevée. On appréciera la guitare rythmique de Johnny Burgin, véritable métronome tandis que le chant de Robinson se fait plus déclamatoire que celui de Little Walter. Gros tube enregistré en 54, "Last Night" ** bénéficie ici d’une rallonge amplement méritée. Si cette tuerie de Slow Blues a été distillé sous plusieurs formes (Paul BUTTERFIELD, FLEETWOOD MAC, CLAPTON ou Johnny WINTER), le combo nous offre ici une interprétation intense, le chant s’avérant plus dramatique que celui de Little Walter, meilleur harmoniciste que chanteur selon nous. On se laisse toujours prendre par les paroles : Last night I lost the best friend I ever had - Well, she gone off and left me, oh. L’éternelle histoire de la belle quittant son homme pour son meilleur ami. Autre Blues au tempo modéré, "Confessing The Blues" est en fait un titre du pianiste Jay McShann dont s’est accaparé Little Walter. La chanson est tombée au fil des ans dans de nombreux filets (Chuck BERRY, BB KING, Esther PHILLIPS et les STONES) le combo nous en délivre ici une version solide dans laquelle le jeu d’harmonica de Scott Dirks est un modèle du genre. Mais s’il fallait décerner une mention, "Tell Me Mama" remporterait probablement la plus grosse part des suffrages. Gravé initialement en mars 53 avec les Frères Myers et Willie DIXON, le morceau inspiré à l’origine par "Back Door Blues" de Casey Bill, prend ici une forme Rockin’ Blues de haute volée, la guitare s’offre quelques passages dévastateurs poussée dans ses retranchements par l’harmonica, Robinson semble fulminer.

D’autres musiciens sont également mis à l’honneur. Le combo reprend "3O’clock Blues", accrédité comme souvent au tandem BB KING/Jules Taub (pseudo Jules Bihari) mais œuvre de Lowell Fulson. Si BB King a posé sa griffe sur son emprunt avec des duos en compagnie de Bobby BLAND puis de CLAPTON, la présente version nous parait plus sincère et reste en droite ligne avec celles son véritable créateur ou celle plus récente de Jimmy Burns. Autre témoignage à un autre King, Freddie en l’occurrence avec "See See Baby". Pas de cuivre contrairement à l’original mais une bonne complémentarité entre les deux guitares, Robinson allant à l’essentiel ne délivrant que le strict nécessaire. La cadence ralentit encore avec "Drifting Blues", un R&B de Johnny Moore métamorphosé en Blues lent hyper collant.
Si "In Love With You Baby" une compo d’Arthur Scott conçue pour l’album navigue entre Chicago et West Coast, deux compos de Robinson viennent fleurir le CD sous forme d’instrumentaux. "Jimmie’s Jam" permet de marquer une rupture avec l’ensemble. Impression similaire avec "Chicago Jump", titre fétiche enregistré en 1960 pour Bandera Records. Par rapport à l’original, l’absence de cuivre permet de mettre en valeur un rythmique impeccable, véritable gardienne du temple, tandis que les deux guitares s’entrelacent formidablement.

La voix parfois menaçante de Robinson n’a pas perdu de sa vitalité, l’orchestre réduit qui l’accompagne diffuse un excellent grain remettant au goût du jour la sonorité du West Side de la première moitié des seventies. Le choix des reprises nous semble judicieux, mêlant inusités et hits mineurs chicagoans. Un disque, malheureusement posthume, produit sans esbroufe qui permettra aux néophytes de découvrir un guitariste trop peu reconnu.


*Groupe de Chicago, homonyme à un trio suisse.
**Titre homonyme à ceux des Mar-Keys, des Crickets, des Merseybeats et des Traveling Wilburys.

A lire aussi en BLUES par LE KINGBEE :


Freddie KING
Burglar (1974)
Antépénultième album du colosse texan.




The ANIMALS
Trackin' The Hits (1990)
Compilation idéale pour découvrir le groupe


Marquez et partagez





 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- Jimmie Lee Robinson (chant, guitare)
- Rockin' Johnny Burgin (guitare)
- Sho Komiya (basse)
- Twist Turner (batterie)
- Scott Dirks (harmonica)


1. Angry Lover
2. Poison Ivy
3. Drifting Blues
4. Ain't That Lovin' You Baby
5. Tell Me Mama
6. Jimmie's Jam
7. 3 O'clock Blues
8. Ah'w Baby
9. In Love With You Baby
10. Last Night
11. See See Baby
12. Confessing The Blues
13. Chicago Jump
14. Got To Have Some



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod