La passion ! C’est la donnée de base qui devrait sous tendre tout projet artistique. La dessus nous devrions tous être d’accord et se mettre en rang d’oignon derrière toutes les démarches authentiques… Je ne vous refais pas le laïus de la starac et de la voice, des show telés qui n’ont pas d’autres buts que de réduire à néant toute originalité et créativité. Dans le paysage musical de notre hexagone, il faut donc farfouiller pour dénicher de la qualité, c’est le jeu. Alors quelle merveille lorsqu’on tombe enfin sur de la musique de qualité avec des fondations solides reposant sur la tradition, l’histoire et la maîtrise instrumentale.

ORIGINEM est le projet de Jean-Michel Wizenne, musicien chevronné qui a roulé sa bosse dans de nombreux styles, et qui trouve un nouvel élan dans cette quête occitane, voyez plutôt : les paroles sont en latin et en Occitan, on nage dans la culture du 14eme siècle, pas si obscur que cela, et la musique oscille entre sacré et conteur, on s’adresse donc à tous les fans de musique médiévale, du traditionnel au pagan. Jean-Michel se réclame des Goliards et campe un prêtre défroqué, dont la résurgence pourrait être symbolisée par le « Carmina Burana » de Carl ORFF, ou l’Abelard de... Héloïse ! Mais oui ! Vous voyez que cela va partir dans tous les sens, ouvrez tous vos oreilles, car le concept risque de se révéler aussi intéressant que la musique!

"Maudita raca de criminau" symbolise à merveille la proposition effectuée par SEDITIONEM. Pour rester dans le mainstream on peut dire que tout ceux qui parmi vous écoutent WARDRUUNA ou HEILUNG y trouveront largement de quoi se sustenter. Bien sur, les aspects traditionnels sont soulignés en permanence dans la musique de Jean-Miche Wizenne, mais on ne peut oublier cette guitare lumineuse dont les interventions sont toutes de petits chefs d’oeuvre qui nous rattachent à diverses branches du Metal. Les afficionados de Pagan metal vont d’ailleurs se pâmer devant "Vengut Lo Jom", l’atmosphère sombre et les aspects drone de la musique rehaussés d’une flûte terrible sont tout bonnement supra adictifs, d’autant que la guitare n’est pas en reste.

Et il y a de l’imprécation ! La gratte de Jean-Michel lance "Siguetz Mauditz", avec une vivacité et une force qui plaira a tous les amateurs de metal folk et pagan, voire par instant de spimélo. La flûte piccolo nous plongent dans l’ambiance d’un 14eme siècle plus moderne qu’on voudrait bien le croire. Les licks de six cordes et les flûtes traditionnelles se succèdent avec bonheur pour le meilleur des époques concernées. Le prêtre défroqué nous annonce donc une malédiction car notre société n’est guère méritante. Le solo doit pas mal à Steve MORSE, nous ne sommes clairement pas face a un manchot. Et puis il faut se pencher sur les paroles, ainsi, "Al vista lo lop" fustige une société qui n’a toujours pas trouvé ni l’égalité ni un quelconque équilibre, une forme de rusticité presque punk s’en échappe malgré la guitare toujours luminique. Le chant se pose en accusation directe, ainsi que le veut la culture des Goliards chers à l’artiste.

Enfin, l’éponyme "Seditionem" est en latin voyez-vous cela ! Un ancien texte de Goliard que Jean-Michel a mis en musique avec talent. Voyez donc ce riff qui donne envie de sauter dans tous les sens et de pogoter comme un beau diable. Le chant est annoné et sonne trivial, est-on si loin que cela du triton et des accords interdits pronés par l’église… "Sedition" voila qui vous pose un texte, les « eh »scandés du morceau emporte en tout cas franchement l’adhésion. Vraiment enthousiasmant, tant d’un point de vue culturel que rythmique et le solo de Jean-Mi est à tomber par terre ! La création d’un morceau pareil n’est pas à la portée de tout le monde, voila qui pose une première œuvre !

J’aimerai faire le rêve qu’un jour, les tenants de la créativité tels Jean-Michel et ses pairs – qui sont nombreux ! - puissent un jour trouver une forme de justice en passant à la place des pseudos artistes d’aujourd’hui dans des télés crochets qui auraient alors le mérite de proposer de la culture et de l’originalité à la télévision… Je vous accorde que ce n’est pas gagné. Le prête défroqué héros de ce premier EP, à la parole puissante et à l’invective lourde de sens y trouverait une juste reconnaissance, qu’on lui souhaite vivement. C’est un puissant quatre !