Dans le genre « pochette trompeuse », celle d'Another Dawn, nouvel album des vétérans TEMPEST, se pose là. Symboles runiques, drakkar sur fond de coucher de soleil, tout porte en effet à croire que nous allons avoir affaire à un énième groupe obscur de pagan metal scandinave. Que nenni ! Originaire des Etats-Unis, TEMPEST propose depuis 1988 un folk-rock progressif d'obédience celtique. La particularité du groupe demeure néanmoins dans la nationalité de son leader et compositeur principal, le norvégien Lief Sorbye, qui apporte au combo de nombreuses influences issues du folklore et patrimoine musical scandinave. Et si Celtie et Scandinavie n'ont pas toujours fait bon ménage (Norvège et Écosse se sont affrontées à plusieurs reprises durant le Bas Moyen-Âge pour obtenir la souveraineté des Hébrides), il semble qu'elles aient ici trouvé un terrain d'entente musical.

C'est par l'enjoué « Let's Live For Today » que débute cet opus. Originellement composé par les Grass Roots en 1967, le morceau se voit ici accéléré et doté d'attributs celtisants (bodhran, violon) du plus bel effet. Porté par un Leif Sorbye dont la voix grave fait merveille, ce morceau séduit dès la première écoute grâce à un refrain immédiatement assimilable et porté par des chœurs fédérateurs. En mettant tout d'abord en avant son côté folk/rock festif le plus accrocheur et accessible, TEMPEST met également toutes les chances de son côté pour séduire un public folk « mainstream » pas nécessairement familier avec le penchant progressif du combo. Manque de chance, en agissant de la sorte, le groupe propose également d'entrée le meilleur morceau de l'album, même si ce dernier ne manque pas d'atouts.

Alternant compositions originales, reprises, et adaptations de traditionnels celtiques et norvégiens, TEMPEST propose un répertoire riche et varié. Riche en cassures de rythme, « Verses of Grace » (un des deux seuls morceaux composés intégralement par le groupe) constitue une pièce ambitieuse et intéressante. Mettant en avant violon, piano et guitare électrique, ce morceau témoigne d'un groupe audacieux et au savoir-faire avéré. Proposant des ambiances tantôt délicates et intimistes, tantôt dansantes et joyeuses, Another Dawn parvient à maintenir durablement l'attention de l'auditeur, que ce soit sur les titres chantés ou sur les longues pièces instrumentales et progressives (« The New Squire », « Dagda's Harp », « High Rise »).

Néanmoins, comme indiqué précédemment, ce sont les reprises qui offrent à l'album son véritable intérêt : « Never Tire of the Road » (Andy Irvine) et « The Moving-on Song » (Ewn MacColl) tirent l'album vers le haut, lui offrant un côté lumineux et attachant. Handicapé par quelques titres dispensables (comme le traditionnel norvégien « Jomfru »), Another Dawn se révèle néanmoins être un album attachant et sympathique, faisant honneur à la longue discographie de TEMPEST. Et si l'album ne s'adresse qu'à un public restreint (les amateurs de musique celtique ET de progressif ne sont pas si nombreux), il devrait au minimum satisfaire les amateurs du combo américain. Toujours ça de pris !