Ayant reçu de nombreuses louanges de la part de ses pairs pour ses deux premières œuvres, Roy Harris, toujours épaulé par Serge Koussevitzky, composa sa troisième symphonie en réponse à une commande de Johannes Hendrikus Philip (dit Hans) Kindler, violoncelliste et chef d’orchestre pour le National Symphonic Orchestra.
L’enthousiasme critique fut immédiat et les compliments ne se firent point attendre : « Une œuvre d’une infatigable vitalité » (Boston Globe), « Mature dans tous les sens du terme, magnifiquement proportionnée, éloquente, maîtrisée et émouvante » (Leonard Bernstein), « La quintessence de la Symphonie Américaine » (John Canarina) a-t-on pu entendre ça et là dans les hautes sphères des têtes pensantes mélomanes.

Et elles n’eurent pas tout à fait tort, car Harris étale ici une palette technique remarquable. La symphonie est monobloc, mais se divise en cinq suites bien distinctes car exposant des musicalités plus qu’intelligibles ; on notera donc « Tragique », « Lyrique », « Pastoral », « Fugue Dramatique » et « Dramatique Tragique ».
Cette troisième symphonie possède de forts échos des précédents travaux du compositeur, ceci est principalement dû à une reprise de matériel présent sur la symphonie No.2 ainsi que sur d’autres œuvres antérieures.
La position de Harris est particulière, elle prend ici des tournures de mieux en mieux ficelées. Sa musique se place dans une synthèse de styles renaissance, hymnologique et chant populaire. Si la musique classique opérait à l’époque des virages drastiques, son dessein était de créer des paysages familiers, envoûtants, dynamiques et parfois très populaires (cf. 4e Symphonie) ; Œuvres accessibles mais sans toutefois renier une évidente complexité, possédant ainsi plusieurs niveaux de lecture.

La présente œuvre a presque une vocation pédagogique, on y retrouve des lignes solennelles de violoncelles, de fines alliances de pizzicatos et de phrasés de clarinettes, des rythmes syncopés, des jeux de tonalités, des développements canoniques… Ce qui donne à la symphonie cette variété de couleurs étonnante. La progression et l’assurance de Roy Harris se dessinent peu à peu, il livre ici sa première pièce importante qui fera date.

Notons pour finir que c’est à partir de la Symphonie No.3 que furent réédités dans la collection Naxos : « American Classics » la quasi totalité des travaux orchestraux de Harris. Une aubaine pour tout amateur du genre.