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1976 Aswad
1981 New Chapter

ASWAD - Aswad (1976)
Par KLEMAN le 27 Janvier 2013          Consultée 3024 fois

Avant la spoupe (mélange de soupe et de pop), avant les formidables expérimentations dubo-jazzistique (dub / jazz), avant les clips et les charts, Aswad a été un groupe de reggae roots. Personne ne définirait Aswad comme autre chose qu'un groupe de reggae anglais et pourtant, rares ont été les albums aussi reggae que leur premier, « Aswad ».

On est en 1976 et l'Angleterre n'est pas encore la seconde patrie du reggae qu'elle deviendra par la suite. Le mot même reggae n'est pas très connu, aucun groupe anglais ne s'est encore fait remarquer dans le domaine, et les grands labels commencent à peine à y percevoir un juteux terrain de vente.

Ça, c'était ce que le grand public voyait, mais certains signent ne trompaient pas et les esprits musicaux du monde du reggae bouillonnaient outre Manche depuis déjà quelques années. Les noirs d'origine jamaïcaine existaient bel et bien dans les ghettos du royaume du punk, où le reggae ne demandait qu'à fleurir.

Un an avant la sortie d' « Aswad », « Caught you in a Lie » de Louisa MARKS est le meilleur exemple de hit reggae anglais antérieur à Aswad, comme un signe avant-coureur. Tout d'abord par ses ventes (un million d'exemplaires vendus!!), mais aussi par sa production. En effet, même si le titre revient à Louisa Marks la chanteuse, le backing band était alors MATUMBI, le pas encore célèbre groupe de reggae anglais qui n'a percé sous ce nom qu'à la fin des années 70 début 80, accompagné du batteur d'Aswad. Dennis Bovell (de Matumbi, producteur de Louisa Marks), qui reconnaissait que « Caught you in a Lie » était un tube pop, était alors l'acteur le plus influent de la scène reggae de l'époque. Mais le style musical restait peu visible car la très grande majorité des disques étaient non pas joués par les radios nationales mais bien par les sound-systems, et n'étaient pas non-plus distribués par les magasins grand public mais par des petits disquaires indépendants, le tout constituant une sorte de réseau parallèle difficilement perceptible pour ceux n'en faisant pas partie.

Avant d'en venir au son d'Aswad je voulais introduire le contexe, car il explique la raison pour laquelle (je crois) Aswad sort un premier album très roots. En 1976, les nombreux sound systems anglais ne diffusaient que des productions jamaïcaines, aucune anglaise. Il existait chez les sound men une sorte de complexe de « non-jamaïcanitude », qui les poussaient à passer les sons les plus authentiques possibles, et ils rivalisaient pour avoir les exclusivités (ces disques étaient appelés les 'specials', pressés parfois à un seul exemplaire, sans étiquette) en provenance directe de Kingston.

C'est dans ce contexte qu'Aswad sort donc son premier album, et il fallait que le groupe assoie son identité rasta, sa jamaïcanité. Outre un son très reggae-roots, le groupe produit un message très militant dans les textes (Aswad signifie Noir en arabe), utilise l'argot des rastas jamaïcains, et couvre son album du Lion de la Tribu de Judah, rien que ça.

Les deux premières compos de l'opus, qui n'en comporte que huit, nous présentent un reggae très classique, aux arrangements simples (refrain-couplet-refrain-pont- … ). L'arrangement de « Ire woman », la dernière piste de l'album pouvant même être qualifié de simpliste, consistant en une divagation entre deux tonalités à la tierce pas très originale. On a même une piste un peu lover's reggae, « Back to Africa », s'inscrivant dans la mode anglaise du reggae de l'époque, mais qui a le mérite de ne pas basculer dans une vibe un peu gnan-gnan. Malgré ce début de description quelque peu fadasse que je vient de dépeindre, on a d'autres morceaux vraiment très intéressants. A commencer par « Natural Progression », qui commence sur le même type d'arrangement assez classique (très jamaïcain en fait), mais qui vire vers une production dub très bien sentie, avec un jeu panoramique sur la stéréophonie, présentant un mix original révélant des subtilités cachées du groupe et des capacités à la créativité qu'on ne soupçonnait pas encore, pour finir de superbe manière.

La piste précédente intitulée « Ethiopian Rhapsody » nous avait pourtant averti des penchants très dub, avec une production très réverbérisée sur des touches d'harmonica et sur la batterie, un pont à la guitare classique étonnant, des lignes de basse littéralement charmantes, un son qui coule, bref, une réalisation vraiment intéressante, énergique, nantie d'une production excellente.

Et puis « Red Up », entièrement instrumentale. Un vrai reggae aux penchants étonnamment jazzy qui peut donner un avant-goût de la suite de la discographie du groupe. On a là un morceau presque à mi-chemin entre du reggae et du jazz (lignes claviers et guitare lead), avec une production qui a su placer des micro-passages dub avec une dextérité étonnante.

En réécoutant les pistes plus classiques évoquées en premier, on se rend alors compte de toute la subtilité dans le jeu du groupe : les phrasés de chaque instru, la sensibilité qui s'en dégage, et le bon dosage des petites variations du jeu, qui se révèle alors à nous subrepticement … Et on se rend compte alors que « Aswad » n'est pas juste un album sorti des tiroirs caisse d'Island (l'album paraît chez Mango Records, un sous-label d'Island), mais bien le premier opus d'un groupe talentueux, qui pose les bases du reggae anglais (on notera de nombreuses ressemblances avec ce que pourra faire Steel Pulse par la suite pour ne citer qu'eux), malgré des premiers abords laissant parfois penser à tort à de la pâle copie jamaïcaine revisitée.


(La note de 3,5/5 m'aurais bien tenté, à défaut c'est 4)

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   KLEMAN

 
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- Tony Platt & Aswad (production)
- Angus Gaye & Bringley Forde (chant lead)
- Donald Griffiths & Courtney Hemmings & C (choeurs)
- Angus Gaye (batterie)
- George Oban (basse)
- Bringley Forde (guitare rythmique)
- Donald Griffiths (guitare lead)
- Angus Gaye (piano)
- Courtney Hemmings (claviers)
- Angus Gaye & Donald Griffiths & Courtney (percus)
- Bunny Mckenzie (harmonica)
- Adekotumba Illorin (guitare acoustique)
- Studios :
- Mixing : Basing Street (london, uk)
- Recording : Island Studios (hammersmith, uk)


1. I A Rebel Soul
2. Can't Stand The Pressure
3. Ethiopian Rhapsody
4. Natural Progression
5. Back To Africa
6. Red Up
7. Ire Woman



             



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