Si CLUSTER est un groupe qui n'a jamais été ni ne sera jamais un groupe mainstream, il faut cependant admettre qu'il a réussi à avoir une influence décisive sur la musique. Que ce soient ses albums électroniques, parents proches des mouvements électro/techno existant depuis une trentaine d'années (à l'heure où j'écris ces lignes), ou les premiers opus qu'ont probablement dû écouter des shoegazeux des années 90. Mais existe-t-il des groupes qui ont complètement repris le flambeau, qui sont allés plus loin que la simple recherche d'influence ? Oui, bien sûr, mais il faut les trouver dans certains cercles fermés, CLUSTER étant lui-même une formation culte de l'underground.

Des cercles, donc. Comme chez CIRCLES ? Formé en cette riche année 1983, cet autre duo allemand, formé des multi-instrumentistes Mike Bohrmann et Dierk Leitert, a connu une carrière confidentielle, ayant produit que peu d'exemplaires des trois albums sortis entre 1983 et 1987, avant d'arrêter les frais. Un énième groupe oublié, mais grâce au miracle d'Internet et à l'engouement pour le krautrock et ses satellites, CIRCLES a pu générer au XXIe siècle assez d'intérêt pour rééditer sa discographie en 2016, avec la sortie d'un nouveau disque, Structures.

De par son nom complet, Structures - Unreleased Material 1985-1989, on comprend évidemment qu'il s'agit d'une compilation d'oeuvres inédites de CIRCLES. Et c'est donc une occasion d'examiner le talent du duo en action. Le moins que l'on puisse dire, c'est que Structures abrite des morceaux franchement réjouissants, non seulement en succédané de CLUSTER, mais aussi et surtout en tant que morceaux à part entière. Bohrmann et Leitert affichent ainsi une maîtrise d'une certaine idée du minimalisme, à base de claviers mais aussi, et c'est à noter, de guitares. Si l'on ne navigue pas dans les mêmes eaux que Göttsching et Schickert, force est de constater que la six-cordes participe autant à l'installation d'ambiances sonores prenantes, si ce n'est plus sur "Track II" – qui ressemble vaguement à du POPOL VUH « démystifié », il faut l'avouer.

Ceci étant, ce constat, globalement positif, ne vaut que pour la première moitié de l'album. En effet, à partir de "Digger", CIRCLES abandonne les séquences et part sur une musique plus abstraite, moins à même de remporter l'adhésion de l'auditeur. Pour être franc, c'est là que se situent les faiblesses du groupe, qui peine (sans vraiment échouer) à proposer une musique non mélodique qui puisse être captivante. Toutefois, c'est quand même bien écoutable, et la production/remasterisation offre un rendu sonore très agréable à l'oreille.

S'il fallait trouver un bon candidat à la succession du duo allemand, nul doute que celui-là serait en bonne place. Mieux, on pourrait même dire à l'écoute des travaux de CIRCLES qu'on tient là ce qu'aurait pu faire CLUSTER dans les années 80, au lieu de lâcher un Curiosum abyssal avant de se taire toute la décennie. C'est donc une valeur solide pour qui aime l'électro vintage abstraite et non-mélodique par moments.