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1995 The Bitch Done Quit Me

KING IVORY - The Bitch Done Quit Me (1995)
Par LE KINGBEE le 19 Juin 2021          Consultée 767 fois

Si le nom de King IVORY vous est inconnu, dites vous qu’il n’y a rien d’anormal, ce second couteau n’a enregistré qu’un unique album sur le tard. Mais ce multi instrumentiste reste l’auteur d’une carrière un peu plus conséquente.Ivory Lee Semien voit le jour en 1931 à Washington, un hameau perdu à une quarantaine de bornes au nord de Lafayette. Issu d’une famille créole d’ascendance française, Ivory se lance très tôt dans l’apprentissage du saxophone et de la guitare. A quinze ans, il décide de bifurquer par la batterie, instrument qui lui permet de partager la scène dans plusieurs petits groupes dans les environs de Melville, bourgade au nord-est d’Opelousas. Si plusieurs membres de sa famille jouent du violon et de l’accordéon dans de petites formations locales de Zydeco et de Cajun, Ivory s’intéresse avant tout au Blues.

A 18 ans, il tente sa chance à Houston, fait équipe avec Sunnyside Slim avant d’intégrer l’orchestre d’Hop Wilson pour lequel il devient également manager. A Houston, il côtoie Joe Hugues, Johnny Copeland et se produit sous le nom de King Ivory Lee au Texas, en Louisiane et tout le Golf du Mexique. En 1958, IVORY enregistre un premier single pour le label Goldband d’Eddie Shuler ; si la face A est étiquetée au nom d’Hop Wilson & His Blue Steel Guitar, "Fuss Too Much" est accrédité à son nom. Le 45 tours sera réédité pat Trey Records, l’année suivante.
Face à ses difficultés pour trouver une maison de disques, Semien lance son propre label, Ivory Records. S’il enregistre une poignée de singles à son nom, le bonhomme n’hésite pas à donner leur chance à quelques seconds couteaux Mable Franklin, Big H Williams, D.C. Bender ; il prend même sous contrat Lightnin’ Hopkins et relance les carrières d’Albert COLLINS et Big Walter Price qui sont au plus bas. Notre homme acquiert une solide réputation à Pear Harbor, l’un des ghettos les plus durs de Houston. Malheureusement, tout à une fin, au milieu des années 70, sa maison qui abrite aussi son studio d’enregistrement est ravagée par un incendie. Ivory, contraint de mettre la clef sous la porte, quitte le chemin des studios pour se lancer dans la construction et le BTP.

En 1985, les noms de KING IVORY et Hop Wilson ressortent des tuyaux suite à la parution de "Showdown!", album dans lequel Albert COLLINS, Robert CRAY et Johnny Copeland se tirent la bourre récoltant au passage un Grammy Award. Certains journalistes mettent le doigt sur "Black Cat Bone" un ancien titre d’Harding "Hop" Wilson et d’IVORY figurant dans le disque précité, mais l’affaire ne va pas plus loin.

Il faut parfois de longues années pour que l’eau puisse ressortir d’une source bouchée. Contacté par Roy C. Ames, patron du label Homme Cooking Records, KING IVORY, tel le diable surgissant de sa boite, fait un retour inattendu en 1994 avec un premier album sous son nom. Enregistré à Houston aux Riverdell Studios lors de deux sessions (novembre 94 et février 95) Semien bénéficie ici d’une production ciselée et d’accompagnateurs solides. Pour donner un peu plus de relief à certains titres, on a fait appel à la section cuivre du bassiste La La Wilson (ex membre des Jazz Cruzaders, Trudy Lynn). L’harmoniciste Joey Long ⃰ (ex Link DAVIS, Dr. JOHN, T Bone Walker), le guitariste Sideways Sumlin (ex Albert COLLINS, T Bone Walker) et l’accordéoniste Wilfred Chevis (ancien élève de Clifton CHENIER et leader du Texas Zydeco Band) viennent grossir les rangs. KING IVORY peut aussi compter sur une carte maîtresse non négligeable, celle de la composition. S’il reprend deux standards : "Little Red Rooster" de Willie DIXON et le Rock n Roll "Shake Rattle & Roll" de Jesse Stone (alias Charles E Calhoun), IVORY nous offre sept nouvelles chansons remarquablement écrites, il faut dire que le pianiste a largement eu le temps de peaufiner son répertoire en deux décennies.

Les deux covers s’emboîtent parfaitement dans l’ensemble. En milieu d’album "Little Red Rooster" se déguste comme un excellent shuffle, l’harmonica de Joey Long évoque tour à tour Lazy LESTER et Chicago Bob. Une version beaucoup plus sage et tempérée que l’original d’Howlin’ WOLF ou celle de Big Mama THORNTON. En clôture d’album, "Shake, Rattle & Roll" fait penser à une jam party. Après une quinzaine de secondes de balbutiements, ce standard prend son envol avec une grosse ligne de basse et une sobre section cuivre qui n’a pour but que de mettre en évidence le piano et la guitare. Gravé en Live du studio, ce titre termine le disque sur une note festive, spontanée et sincère. Un autre aperçu par rapport à la version R&B de Joe TURNER ou le Rock péquenot de Bill HALEY.

Les compositions restent les dépositaires d’un registre bien ancré dans le Texas Blues. L’épicé "Look Good Woman" évoque W.C. Clark, le groove est présent d’un bout à l’autre. Les amateurs de Slow Blues devraient être aux anges avec "Can’t Help But To Love You". Les instruments semblent flotter comme en apesanteur, la guitare tranchante juste comme il faut de Charlie Chavira s’offre d’excellents passages en contrepoint de l’orgue de Jack Truett. Le chant de King Ivory est renforcé par la douceur du timbre de Reecee Semien, la fille de notre pianiste batteur chanteur. Du cousu main pour 6 minutes de bonheur. Le piano endosse le premier rôle sur "Find Yourself A Job", alliant Swing et rythmes typiques au Blues Texan avec des chœurs qui apportent un incontestable plus. La guitare de Sideways Sumlin prend le relais sur "Sweet Black Woman" accentuant le côté dramatique. Si la distance entre Houston et la Nouvelle Orleans frise les 500 bornes, la tonalité de la Crescent City est bien palpable sur "C’Mon, Don’t You Wanta Go" dont la mélodie s’inspire du "Baby What You Want Me To Do", standard de Jimmy REED. Si le titre ne frappe pas par son originalité, le groove et la cohésion entre les différents vétérans ne peut que sauter aux yeux (ou aux oreilles). "Let’s Have A Good Time" rappelle combien la musique peut être chaleureuse et festive. Là, la richesse musicale est évidente, on est en plein dans un carrefour où les Caraïbes, le Mexique, le Zydeco et le Blues se côtoient allègrement pour fusionner en un délicieux mélange aussi odorant que persistant.
Si vous avez bien lu les lignes précédentes, vous vous êtes sans nul doute rendu compte que je me suis mélangé les pinceaux avec le nombre de compos. En fait, KING IVORY reprend l’un de ses anciens titres avec "Alley Oop", un titre court qu’il avait mis en boite dans les années 60 sur son propre label. Le titre ne pourra rappeler l’univers de Ray CHARLES. Un morceau dansant, aussi court qu’imparable. Terminons, une fois n’est pas coutume, par le titre d’ouverture avec "The Bitch Done Quit Me". Si la guitare tranchante de Joey Long apparait dès les premières notes, on entend vite le gri-gri d’un frottoir avant que l’accordéon de Wilfred Chevis ne vienne colorer le morceau d’une teinte Zydeco. Le parfait mélange entre Texas Blues, Zydeco et ballade louisianaise. Mais là, King Ivory, tel un messager ou les bluesmen d’antan, alerte l’auditeur sur les ravages du Sida, maladie dont était grandement victime la population afro-américaine.

Si KING IVORY demeure largement inconnu dans notre contrée, ce disque mérite un petit détour. Ce multi instrumentiste figure parmi les rares entrepreneurs noirs à s’être lancer durant les sixties dans le marcher du disque et de la musique, à une époque, rappelons le, où certains énergumènes jugeaient de bon ton de trainer derrière leur véhicule ou de pendre à un pont certains de leurs voisins. Du Down Home Blues urbain qui fleure bon le Texas, la Louisiane et le New Orleans Sound. Ce disque sera réédité sous forme de CD par Collectables. En 1999, le label hollandais Blues Factory publiait une anthologie dédiée à KING IVORY. Editée sous le titre "Beating The Odds", elle reprenait le présent opus agrémenté de onze titres piochés dans le répertoire Ivory Records. Il ne manquait que les faces Goldband. Si ce disque ne devrait pas défrayer les compteurs de lecture du site, il n’en mérite pas moins une attention soutenue.

⃰ Le guitariste harmoniciste Joey Long (ex Ivory John Hunter, Clarence "Frogman" Henry, Doug Sahm) est décédé d’une hémorragie cérébrale, en mars 95 juste après la dernière session. En 1992, Joey avait participé au Blues Estafette Festival à Utrecht malgré de gros problèmes de santé.

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- King Ivory (chant, piano, batterie)
- Joey Long (guitare, harmonica)
- Sideways Sumlin (guitare)
- Charlie Chavira (guitare)
- La La Wilson (basse)
- Roy Turner (basse)
- Gene 'chunga' Garcia (batterie)
- Jack Truett (orgue)
- Cedric Cormier (saxophone)
- Alger Jones (trombone)
- William Dromgoole (trompette)
- Wilfred Chevis (accordéon 1)
- Alton Damageaux (frottoir 1)
- Reecee Semien (chant, chœurs)
- Marie English (chœurs)
- Sidonie Scott (chœurs)


1. The Bitch Done Quit Me
2. Look Good Woman
3. Can't Help But To Love You
4. Find Yourself A Job
5. Sweet Black Woman
6. Red Rooster
7. Alley Oop
8. C'mon, Don't You Wanna Go
9. Let's Have A Good Time
10. Shake Rattle And Roll



             



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