It's All Around You est un album rassurant. Rassurant dans le sens où il permet de retrouver un groupe que l’on croyait perdu dans le n’importe quoi sous prétexte d’évolution.
Le premier contact est d’abord visuel. Une jolie pochette succédant à la lourde symbolique de Standards. Ensuite vient la musique et là, on sourit. La modernisation à outrance qui a bien failli leur coûter une crédibilité fait désormais partie du passé. On redécouvre ce post-rock électronique et contemplatif parsemé de détails ayant fait la réputation de TORTOISE. Loin du m’as-tu vu de Standards.

Cependant, est-ce pour autant un bon disque ? Ce n’est pas parce que vous mangez une nourriture au goût similaire à votre plat préféré qu’elle est aussi bonne. C’est là où le bât blesse : les compositions sont anodines en majorité.

Pourtant, la Tortue ne manque pas d’idées. Les voix féminines éthérées de « The Lithium Stiffs » et la guitare shoegaze de « Five Too Many » en sont de bons exemples. La mélodie de « On The Chin » n’est pas d’une originalité folle (on croirait entendre une chute de TNT), mais se laisse déguster avec plaisir. Quant à la lente progression de « Crest », il s’agit du meilleur moment de cette œuvre. Une majestueuse avancée seulement interrompue par une gratte noisy du plus bel effet. Comme peut l’être une rencontre entre le VELVET UNDERGROUND et le fantôme du progressif des 70s. Curieux anachronisme n’est-ce pas ? Mais cette formation est décidément spécialiste pour mélanger les époques.

Hélas, les mélodies auraient mérité d’être plus franches. Même chose concernant le groove. Pas toujours mis au service des morceaux les plus remarquables qui soient (« Stretch » et « Unknown » ne décollent à aucun instant). Une critique récurrente qu’on pourrait adresser à It's All Around You, puisqu’elle est due à cette malheureuse démarche de privilégier les sonorités aux mélodies.
C’est particulièrement dommage car les arrangements n’ont jamais été aussi maitrisés que sur ce skeud. On peut même utiliser ce terme cliché de disque de la maturité tant leur son est désormais professionnel. Sauf que l’arrivée de la maturité est souvent synonyme de manque de surprises. Alors quand les morceaux ne sont plus suffisamment bons pour nous le faire oublier, ça devient vite problématique.

Le milieu des années 2000 n’était pas ce qu’on pouvait qualifier de grande période pour le post-rock. Le genre étant submergé par de nombreux imitateurs (YNDI HALDA, EXPLOSIONS IN THE SKY et RED SPAROWES) au talent discutable. Les bons disques se retrouvant noyés dans une infinité de sorties allant du correcte au médiocre. Difficile de voir clair à cette époque tant Internet a su donner une visibilité énorme à une musique autrefois très confidentielle dans années 1990. Si TORTOISE réussit toujours à se démarquer de la masse par sa singularité, ce n’est malheureusement plus grâce à son talent.

Ne soyons pas trop sévère avec cet album, il est vrai, très anecdotique. Car il aura permis de remettre ces intellos de Chicago sur de bons rails. C’est bien entendu facile de dire cela quand on connait Beacons of Ancestorship. Toutefois, qu’est-ce que je ne ferais pas pour ce groupe ô combien attachant en dépit de ses erreurs.